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4G dans les îles : Vodafone veut s’épargner « un dispositif ruineux »

Vodafone attaquait ce mardi au tribunal administratif un arrêté du Pays, relatif à l’octroi de son agrément d’opérateur de téléphonie mobile : le cahier des charges lui impose le déploiement de ses propres antennes 4G dans les îles éloignées, quand l’opérateur veut privilégier le recours à l’itinérance. Le rapporteur public conclut à l’annulation partielle de l’article visé, voyant là « une erreur manifeste d’appréciation du Pays ».

La société Pacific Mobile Telecom est passée une énième fois devant le tribunal administratif ce mardi. Cette fois, pour faire annuler une partie d’un arrêté du Pays, qui, en 2023, lui avait renouvelé son agrément d’opérateur de téléphonie mobile, obtenu en 2010 sous la marque Vodafone.  Cette première autorisation comprenait alors un cahier des charges strict, fixant notamment un calendrier de déploiement d’infrastructures. PMT était ainsi chargé de déployer son réseau, et donc des infrastructures, entre 2017 et 2020 dans différentes îles éloignées. Des objectifs qui n’avaient été que partiellement atteints, avant d’être revus dans le renouvellement d’autorisation de 2023. Le cahier des charges mis à jour prescrivait alors un déploiement de la 4G dans les îles, de 2024 à 2026 en ce qui concerne l’archipel de la Société et de 2027 à 2036 pour 25 autres îles, dans des zones faiblement peuplées et éloignées.

Vodafone demande au Pays de se « conformer aux prescriptions de l’APC » 

Au tribunal, Pacific Mobile Telecom soutient ne pas être en mesure de satisfaire ce cahier des charges, en ce qui concerne la deuxième phase de déploiement (2027-2036). Un « dispositif coûteux, ruineux, qui n’a pas de sens, puisqu’il faudrait trois antennes – une par opérateur, Viti ayant aussi un cahier des charges à respecter –  les unes à côté des autres dans chacun des villages des Tuamotu, ce qui n’apportera rien », soutient l’avocat de PMT Me Quinquis, qui conteste ainsi « cette obligation de déploiement physique, privilégiant de recourir à l’itinérance dans les zones peu denses, ce qui est conforme aux prescriptions de l’Autorité polynésienne de la concurrence ».

En juillet 2023, l’APC avait en effet estimé qu’ « imposer aux opérateurs alternatifs des obligations de déploiement de leurs réseaux trop ambitieuses et décorrélées de toute logique économique » n’était pas justifié. Et notait qu’il  était « complexe d’envisager d’autres modalités que l’itinérance pour permettre l’accès aux opérateurs alternatifs ». Cette question fait l’objet de nombreux contentieux entre PMT, Viti et l’opérateur historique Onati. L’exploitant du réseau Vini avait bénéficié, en juillet 2022, d’une subvention de 250 millions pour déployer ses antennes 4G dans les îles. Une subvention attaquée sans succès par les concurrents dans ce même tribunal administratif, qui avait permis à Onati de développer ce réseau et donc de pouvoir réguler les prestations d’itinérance, « sans tenir compte des besoins de ses concurrents, placés devant le fait accompli », soulignait l’APC.

Un effet négatif sur la concurrence

Selon le rapporteur public, « la prescription faite par le Pays à PMT implique la mise en place de boucles locales dans les îles éloignées. Mais il est peu probables que des subventions équivalentes soient accordées ». Il soutient qu’imposer aux concurrents d’Onati un tel déploiement à grand frais « aurait un effet négatif sur la concurrence, dès lors que les opérateurs alternatifs ne pourraient proposer de tarifs équivalents à ceux de l’opérateur historique ». Le rapporteur juge donc qu’« en imposant à la société requérante de développer ses propres boucles locales sur les îles éloignées, le président a entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation ». Et recommande donc d’annuler l’article attaqué par PMT, seulement en ce qui concerne le calendrier de déploiement 2027-2036, dans les îles les plus éloignées. Il recommande en revanche de ne pas annuler les prescriptions fixées pour Tahiti, Moorea et les Raromatai (2024-2026), « pour lesquelles les problématiques d’éloignement nous semblent beaucoup moins prégnantes« . La décision du tribunal est attendue le 12 novembre.