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75 ans après l’armistice, Ari Wong Kim devra encore patienter pour recevoir la Légion d’honneur

Le 8 mai est l’occasion de se remémorer l’odyssée des Polynésiens engagés dans le Bataillon du Pacifique. Il n’en reste qu’un : Ari Wong Kim, 96 ans, qui n’a pas encore pu, pour cause de Covid-19, se faire épingler au revers la Légion d’honneur qui lui a été attribuée le 1er janvier dernier.

Ari Wong Kim est né à Tahiti en 1924, d’un père chinois né en Chine et alors apatride, et d’une mère tahitienne. Il a grandi comme enfant fa’a’amu chez son oncle et sa tante maternelles « Papa et Mama Ta’aroa » à Papara sur la propriété de la famille Rey. Sa langue maternelle fut donc le tahitien, son éducation religieuse, le purera’a porotetani. Il fréquenta l’école Viénot et l’école des frères. À 16 ans, mentant pour cela sur son âge et sur son identité, il s’engage aux côtés de la France libre. Comme 300 autres Polynésiens et 300 Calédoniens, il intègre le Bataillon du Pacifique commandé par le capitaine Félix Broche le 3 mai 1941 à Nouméa, et fît de 1942 à 1944 toute la prestigieuse campagne de guerre de ce mythique « Bataillon des guitaristes » qui fut partie prenante de tant de batailles héroïques : débarquement de Provence, bataille d’Italie, Bir Hakeim, El Alamein. Revenu au fenua, il vit de petits travaux, marqué par les années de guerre. Ari repart en France dans les années 50 sous la pression de sa sœur qui craint le pire pour lui. Un séjour dans la Polynésie des années 90, où il ne retrouve pas ses souvenirs d’enfance, le convainc que sa vie est désormais en France. Il y vit encore, avec sa seconde épouse, Odette, en Normandie, après une vie professionnelle entièrement passée au Bon Samaritain à Paris. Mais il a gardé l’accent tahitien.

Ari (à g.) et Odette Wong Kim avec Arnold Teriitaumihau ©DR

Ari Wong Kim a un temps été perdu dans les limbes de l’Histoire, car jusque récemment il était admis qu’il n’y avait plus de survivants du Bataillon du Pacifique. C’est grâce aux travaux de Jean-Christophe Shigetomi et Georges Buisson (le neveu d’Ari), au titre de l’Association mémoire polynésienne et de la Fondation de la France libre section Polynésie française, que l’erreur a pu être corrigée. Et ce sont eux qui ont écrit, en septembre dernier, au Président de la République, pour solliciter la reconnaissance de la France. C’est ainsi que Ari Wong Kim s’est vu décerner la croix de chevalier de la Légion d’honneur, avec en mention : « 79 années de service ». Une phrase résume à elle seule, Ari Wong Kim, écrit Jean-Christophe Shigetomi : « Si c’était à refaire, je le referai sans la moindre hésitation. »

Une cérémonie annulée par l’épidémie de coronavirus

La cérémonie de remise de cette décoration était prévue le 5 avril dernier, aux Invalides. Ari Wong Kim devait la recevoir des mains d’un célèbre Compagnon de la libération, Hubert Germain, âgé de bientôt 100 ans. Les amis de Ari espèrent à présent pouvoir rapidement organiser cette cérémonie par visio-conférence, compte tenu de son grand âge.

Le travail de mémoire ne serait pas complet sans mentionner Maxime Aubry, aujourd’hui âgé de 101 ans, lui aussi « Tamarii volontaire » qui s’illustra dans les troupes de marine.

Bibliographie :

  • « Tahiti 40, récit du ralliement à la France libre », Émile de Curton, 4e trimestre 1972, Société des océanistes
  • « Tamari’i volontaires », Jean-Christophe Shigetomi, 2014
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