Il participe à une soirée arrosée sur un lieu public, sans masque, en état d’ivresse avancé et insulte des gendarmes. Résultat, 80 heures de travaux d’intérêt général.
« C’est pas de notre faute si le covid il est ici, alors je trouve pas juste qu’on nous interdise de boire, alors que c’est un autre qui a pris la décision pour nous tous » tente de se justifier Nestor*, ce vendredi à la barre, pour avoir traité de noms d’oiseaux des gendarmes qui l’interpellaient, alors qu’il participait à une soirée arrosée sur un lieu public et qui plus est, sans masque.
« Dégagez, on est chez nous, la route est à nous. Tu nous parles de porter un masque, mais c’est de ta faute si le covid il est chez nous. C’est les gendarmes qui ont apporté le virus, rentre chez toi en France » lit le juge, « vous avez bien dit cela ? »
« Y’avait du monde, ils peuvent pas dire que c’est moi qui a dit ça. J’suis désolé, mais pour un Français, les Tahitiens ils se ressemblent tous. » « Vous n’êtes pas Français ? » le titille le juge, sourire aux lèvres. « Vous comprenez ce que je veux dire, j’sais pas comment on dit ca… » explique Nestor, tête basse et l’air ennuyé, « Français de France ? »
« Métropolitains » rectifie le juge. « Voilà c’est ça. Pour vous on se ressemble tous, c’est comme nous quand on vous voit » s’enfonce Nestor, alors que juge et procureur refrènent une furieuse envie de rire. « C’est ça que je trouve injuste, poursuit Nestor, c’était interdit les regroupements de plus de dix personnes, et moi j’étais tout seul, et c’est moi qu’on interpelle. »
« Mais j’suis pas bête, hein, ma mère est directrice d’école »
Selon les gendarmes, Nestor se serait débattu comme « un beau diable », alors qu’ils le maintenaient. Il les aurait traités de « titoi, pédales » en les menaçant de les rosser. « Ce que j’essaie de vous dire c’est qu’il y avait un groupe de plus de dix personnes en train de boire et ils ne se sont même pas arrêtés », insiste Nestor.
Le juge explique, « Ils vous prennent vous, parce vous étiez ivre et qu’ils vous ont vu plusieurs fois au cours de la soirée. Certes, vous ne trouvez pas juste que sur les dix, c’est vous qu’on attrape. Mais ils vous connaissent et vous avez un casier avec huit condamnations, la plupart pour des conduites sous état alcoolique. » Nestor se fait tout petit.
« Vous avez trente ans et vous n’avez toujours pas compris que lorsque l’on se fait interpeller, il vaut mieux faire profil bas ? Si vous vous étiez laissé faire vous ne seriez pas là devant moi. » Le juge le sermonne, « vous n’avez rien de mieux à faire que de vous retrouver devant moi pour avoir dit titoi à un gendarme ? C’est stupide, faut réfléchir un peu. Vous êtes toujours en colère contre les gendarmes ?»
Nestor relève la tête, « j’suis en colère, ils m’ont cassé une côte. Je leur ai dit que j’allais rentrer, je voulais pas dormir au cachot. Ils m’ont jeté par terre et écrasé ma côte avec leurs genoux. C’est pas juste, j’étais tout seul et c’est pas interdit d’être tout seul. C’est les groupements de dix qui sont interdits. J’étais à trente mètres du groupe. »
Se refaisant la scène, il explique « Ils ont peut-être cru que c’est moi qui les avais insultés. C’est vrai que quand je suis bourré, j’fais des conneries. Mais j’suis pas bête, hein, ma mère est directrice d’école » assure-t-il, cherchant du regard un quelconque assentiment du juge. Ne voyant rien de ce côté, il insiste « j’suis pas bête, j’vais pas insulter des gendarmes alors que je vais bientôt avoir un bracelet électronique. Mais quand c’est injuste, j’peux pas me laisser faire. »
Nestor a été condamné à un travail d’intérêt général de 80 heures et 5 000 Fcfp d’amende.
*Prénom d’emprunt