ACTUS LOCALES

87, 88 ou 89… Enfin le droit de conserver son indicatif en changeant d’opérateur ?


Viti demande devant la justice administrative la « portabilité » des numéros de téléphone mobile. En clair : le droit d’emmener avec soi son 87, 88 ou 89 lors d’un changement d’opérateur. Le tribunal administratif pourrait lui donner gain de cause et forcer le gouvernement à enfin appliquer une loi de 2013 qui prévoit cette possibilité.

Pour Viti, aucun doute, il s’agit là « d’un frein total à une concurrence effective sur le marché des télécoms ». La « portabilité », garantie par la règlementation en métropole et dans toute l’Europe depuis plus de vingt ans, c’est le fait de pouvoir garder son numéro de mobile quand on change d’opérateur. « Tout » son numéro de mobile, insiste Viti qui après avoir ferraillé au tribunal jusqu’en 2018 pour obtenir sa licence d’exploitation, compte encore une fois sur les juges pour forcer le Pays à agir. Car au fenua, s’il est souvent possible de garder 6 des 8 chiffres du numéro, un changement de réseau implique obligatoirement d’adopter l’indicatif propre de l’opérateur.

Une loi inappliquée depuis dix ans

Pas d’exception : les abonnés Vini sont joignable sur un numéro en 87, à Vodafone le 89, et à Viti, ou plutôt Ora Mobile, le nom de marque exploité par la jeune société, le 88. Un cloisonnement strict en pleine contradiction avec une loi de 2013 signée par le président d’alors, Oscar Temaru. Le texte oblige théoriquement les opérateurs à proposer la conservation du numéro à leur clients migrateurs, et renvoyait l’organisation technique de cette possibilité à un arrêté… jamais adopté par le gouvernement. Une façon de ne pas « déverrouiller » le marché, explique Me Mourad Mikou. « Tant qu’on doit perdre son numéro pour changer d’opérateur, on ne changera pas d’opérateur, explique l’avocat de Viti. C’est une évidence, toutes les études l’ont démontré, c’est quelque chose dont ont conscience beaucoup d’administrations et d’autorités, et même la Polynésie française a reconnu dans ses écritures l’importance de mettre en oeuvre effectivement la portabilité pour permettre un déverrouillage complet du marché ».

 

Interpellé sur la question en septembre 2022, le gouvernement d’Édouard Fritch avait effectivement reconnu que la portabilité était un « moyen d’émulation important » du marché des télécoms mais avait demandé du temps pour mener les discussions techniques avec les opérateurs. Des réunions avaient bien eu lieu début 2023, mais les arrêtés, eux, ne sont jamais sortis.

Six mois pour s’exécuter ?

Une façon, peut-être, de préserver l’OPT et Onati, qui craignent en cas d’application de la portabilité une fuite massive de clients encore retenus, pour des raisons personnelles ou professionnelles, par leur 87. Vodafone, qui avait un temps porté le dossier, ne le défend plus depuis sa percée sur le marché et insisterait même désormais, d’après le Pays, sur la lourdeur technique qu’implique cette portabilité. Viti reste donc seul à mener la bataille, mais pourrait bien la remporter. Le rapporteur public, ce matin, lui a donné raison et propose aux juges de contraindre le gouvernement à prendre les arrêtés d’application de la loi de 2013 sous six mois, avec 100 000 francs d’astreinte par jour de retard. Viti applaudit une astreinte plus lourde et des délais moins longs, après 10 ans d’attente. « La Polynésie, on le sait très bien, n’a pas besoin d’un délai aussi long, ce n’est qu’une question de volonté, insiste Me Mikou. La question que je pose : y a-t-il vraiment une volonté de permettre une libre concurrence en Polynésie française ? »

Portabilité ou pas, réponse des juges le 12 septembre prochain.

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