ÉCONOMIEINTERNATIONAL Suisse : ils passent aux 45h de travail, et sans broncher Europe1 2015-03-18 18 Mar 2015 Europe1 © JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP UNE AUTRE CULTURE – De grandes entreprises helvètes ont décidé d’accroître le temps de travail – mais pas les salaires – sans susciter de contestation massive. Travaillez beaucoup plus, sans gagner plus. C’est, en substance, ce que certains dirigeants ont récemment demandé à leurs salariés en Suisse. Une quinzaine d’entreprises importantes, toutes dans le secteur de l’industrie, ont demandé ces dernières semaines à leurs effectifs de passer de 40 heures hebdomadaires à 43, voire 45 heures. Et les salariés ont accepté. À l’origine, un « tsunami financier ». Le phénomène fait suite à une décision historique prise par la Banque nationale suisse (BNS) le 15 janvier dernier : supprimer le « taux plancher » du franc suisse. Ce dernier empêchait la valeur de la monnaie helvète de tomber en dessous de 1,20 franc suisse pour un euro. La décision a entraîné une envolée de la devise de 12% en deux mois, et un franc suisse équivaut quasiment aujourd’hui à un euro. Un « tsunami financier », dixit Nick Hayek, le patron de Swatch, qui a fragilisé les entreprises exportatrices, les poussant à demander des efforts à leurs salariés sur le temps de travail. Les 45 heures s’étendent… En Suisse, la durée légale de travail est de 45 ou 50 heures par semaine selon les secteurs. Mais dans les faits, les entreprises ne vont presque jamais jusque là : en moyenne, les Suisses travaillent de 40 à 42 heures selon les entreprises. Pourtant, de plus en plus de sociétés décident de profiter de leurs droits. « Le mouvement est parti de Suisse orientale, puis il s’est étendu à l’ensemble du pays », décrivait le journal Le Temps lundi. Le cas le plus marquant est celui de la société Bühler. Cette entreprise d’industrie mécanique de 10.000 salariés, qui réalisent 98% de son chiffre d’affaire à l’export, a demandé à ses salariés de travailler 45h par semaine pour regagner en compétitivité face à la hausse du franc fort. Et le tout sans augmentation de salaire. L’entreprise s’engage, en revanche, à ne pas licencier pendant les sept mois de ce « plan de bataille ». © AFP Le même schéma s’applique pour les 500 salariés d’Eternet Suisse et les 3.000 collaborateurs de Stadier rail, qui se sont converties aux 45 h. Une quinzaine d’autres moyennes ou grandes entreprises ont également augmenté le temps de travail à 43 ou 44 heures par semaines. Et la ville d’Uzwil, où est basé Bühler, va même imposer durant trois mois deux heures de travail en plus par semaine à ses effectifs, pour atteindre 44 heures, afin de faire preuve de « solidarité » envers les salariés du privé. … Et les salariés laissent faire. Selon Le Temps, aucun mouvement social n’est venu perturber les décisions de ces entreprises. Des grèves ont certes enrayé l’activité de quelques sites des groupes Melcalp ou Exten. Mais dans ces cas là, l’augmentation du temps de travail s’était aussi accompagnée d’une baisse de salaire. Quelle est donc la clé de la paix sociale, lorsqu’on veut faire travailler plus les salariés ? Avec la hausse du franc et les craintes pour l’emploi, « il y avait un sentiment d’urgence qui a conduit les salariés à adopter ces mesures », avance Yves Hulmann, journaliste au Temps, interrogé mercredi sur Europe1, reconnaissant toutefois qu’une telle mesure aurait plus de mal à être acceptée en France : Outre ce « sentiment d’urgence », si les syndicats suisses n’ont pas non plus appelé à soulever le pays, c’est aussi grâce à la promesse des dirigeants que cette situation serait temporaire. Ainsi, toutes les entreprises qui ont augmenté leur temps de travail se sont engagées à le réduire de nouveau avant fin 2015. Certains dirigeants ont même annoncé qu’ils baissaient leur salaire en parallèle. « Il est important que les entreprises informent ouvertement, de sorte qu’il apparaisse clairement où se situent les difficultés, quels sont leurs liens avec le franc fort et comment elles peuvent être résolues à long terme », conclut pour Le Temps Norbert Semmer, professeur en psychologie du travail. Source : Europe1 Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)