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Bons résultats mais peu mieux faire pour la Sofidep

La chambre territoriale des comptes de Polynésie française a publié son rapport d’observation définitive sur la gestion de la Société de financement du développement de la Polynésie française (SEM Sofidep). Les juges louent les très bons bilans financiers de la société, mais estiment que « le niveau d’activité de la Sofidep est inférieur aux possibilités offertes ». Retrouvez ci-dessous, in extenso, la synthèse des observations du rapport.

Issue de l’article 8 de la convention Etat-Polynésie française du 8 août 1996 pour le renforcement de l’autonomie de la Polynésie française, la SOFiDEP est une société de financement chargée de faciliter le développement des entreprises locales et de permettre la réalisation de projets présentant des risques trop élevés pour les banques.

Une société de financement dédiée aux entreprises locales

L’actionnaire majoritaire de la SEM SOFIDEP est la collectivité de la Polynésie française qui détient 84,5% des parts ; les autres parts de capital sont détenues par la CCISM, 0,5%, la SOCREDO, 8,3%, EDT, 3,33%, la Banque de Polynésie et la Banque de Tahiti, 1,66% chacune, et 0,05% divers. A la différence d’un établissement bancaire, les fonds utilisés ne proviennent pas des dépôts de particuliers ou d’appel au public, mais procèdent des conventions de financement passées avec l’Etat, et dans une moindre mesure, avec la Polynésie française. La SOFIDEP est restée, plus de 15 ans après sa création, une structure de taille réduite composée d’un directeur général, de trois chargés d’affaires et d’une secrétaire comptable. Pour assurer son fonctionnement courant, elle fait appel à des collaborations externes complémentaires (expertise-comptable, conseils bancaires…). Depuis la création de la société, la SOFIDEP a, ainsi, fait tenir ses comptes par un cabinet d’expertise comptable (cabinets agréés KPMG puis BDO). Les comptes de la société ne présentent aucune anomalie formelle notable. Tous les comptes sociaux ont d’ailleurs été certifiés sans réserve par les commissaires aux comptes assurant l’audit légal des comptes.

Une activité structurée autour du prêt participatif

Les interventions de la SOFIDEP sont limitées par ses statuts à 100 MF CFP par entreprise. Au cours de ses quinze premières années, l’activité de la SOFIDEP a été structurée autour de l’octroi de prêts participatifs laissant en retrait les interventions en capital-investissement, notamment la prise de participation minoritaire, alors qu’il s’agissait initialement d’une de ses missions premières. Pour autant, la SOFIDEP n’est pas une banque, mais une société de financement qui intervient sur la base d’exonérations légales figurant dans le code monétaire et financier (article 511.6). Les interventions de ia société ont été historiquement réalisées en accompagnement d’un financement bancaire. Ce schéma originel a toutefois été nettement modifié pour les prêts participatifs aux entreprises en difficulté (PRE) depuis 2009 et pour les prêts d’aide et à la création d’entreprises (PACE) depuis 2015. Ainsi ces dispositifs ont, contrairement au schéma initial, été exclusivement financés par les fonds de la SOFIDEP. De fait, en dépit de la mauvaise conjoncture économique qui marque la Polynésie française depuis 2007, la sinistralité, en ne dépassant jamais 5%, est restée maîtrisée. La situation financière de la société est solide ; les bénéfices sont récurrents ; l’endettement est maîtrisé ; le capital social a été multiplié par cinq, passant de 300 000 F CFP à 1,5 milliard de F CFP en 15 ans grâce aux bénéfices mis en réserve.

Un niveau d’activité inférieur aux possibilités offertes

Malgré ses résultats financiers, la performance de la SOFIDEP reste ambivalente. L’activité de la société, même au maximum atteint en 2014, laisse inemployés des fonds importants. Depuis sa création, cette activité a connu une sensible progression, marquée par un creux entre 2005 et 2007, compensé depuis 2013 par une forte reprise. Elle est néanmoins restée relativement modérée par rapport aux 3,2 milliards de F CFP mis à disposition. L’encours brut en 2014 était de 2,1 milliards de F CFP avec un courant d’affaires annuel s’élevant à 590 MF CFP, et laissant théoriquement une trésorerie sans emploi de 600 MF CFP.

Les effets sur le développement des entreprises sont contrastés

Le levier financier, mesuré par le cofinancement bancaire, a été très modéré. A fortiori avec le développement des produits sans cofinancement, il n’a pas dépassé 1,1, en retrait par rapport à sa moyenne de la période, 1,75. Les retombées en termes d’emplois ont en revanche été plus appréciables, en dehors de toute considération de coût par emploi. Ainsi, de 2010 à 2015, il y aurait eu d’après les statistiques de la société faute d’autres sources disponibles, 2389 emplois qui auraient été créés ou sauvegardés grâce à l’action de la SOFIDEP. Le positionnement stratégique de la société explique en partie cette évolution contrastée. A l’aune des résultats constatés, il est apparu qu’un positionnement plus élaboré vis-à-vis des banques locales, des entreprises et des porteurs de projet, aurait pu mieux contribuer à fa performance de la société. Notamment, la SOFIDEP a manifestement éprouvé des difficultés à être en synergie avec les autres intervenants bancaires. C’est ainsi que l’intervention préalable des banques dans l’étude des dossiers de prêts a de fait limité son champ d’intervention aux seuls dossiers transmis par les banques, alors que ses critères de prêt étaient plus larges.

Toutefois, cette croissance modérée de l’activité n’est pas uniquement imputable à la SOFIDEP, et doivent aussi être prises en compte la faiblesse du tissu des entreprises locales et la faible dynamique des projets d’entreprise proposé au financement. Considérée, depuis les premiers plans de relance, comme le fer de lance du développement économique, la SOFIDEP a assurément peiné à trouver parmi les institutions financières locales, la stratégie la plus efficace pour soutenir le développement des entreprises et de l’économie. Depuis 2007, les financements publics se sont raréfiés. La SOFIDEP a dû, en utilisant ses réserves, financer de manière croissante son activité dans le rapport d’un engagement sur dotation publique pour 6 sur fonds propres. Au surplus, elle a dû le faire pour des produits comportant une probabilité d’impayés beaucoup plus élevée que pour d’autres générations de produits. Entre autres conséquences, cette tendance, si elle se confirme dans les prochains exercices, hypothéquerait l’activation sans précaution de la trésorerie sans emploi.

De larges marges de progrès sont disponibles

Elles supposent a minima une reconsidération de la stratégie de l’entreprise pour accroître son efficacité. D’abord, pour mieux répondre à sa vocation première – le développement des fonds propres des entreprises locales-, des progrès organisationnels et techniques sont envisageables, notamment en rendant la SOFIDEP encore plus « professionnelle ». D’autres progrès en efficacité sont attendus d’un autre positionnement de la SOFIDEP traduit par une intervention rendue plus autonome par rapport aux banques ; en particulier, l’instruction en première main des dossiers de demande de prêts aurait intérêt à être effectuée à la SOFIDEP au lieu de l’être systématiquement dans une banque, cela afin de faire mieux prévaloir des critères d’intérêt général sur des analyses nécessairement commerciales. La valeur ajoutée de la SOFIDEP requiert désormais des décisions fortes qui, pour certaines d’entre elles, s’inscrivent dans les orientations déjà données en termes de professionnalisation de la structure et d’organisation. Pour les autres, ils dépendent pour partie des décisions stratégiques de la collectivité de la Polynésie française, actionnaire majoritaire de la SOFIDEP.

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