Le procès pour « trafic d’Ice » et « blanchiment » impliquant la femme d’affaires, Mercedes Dubaquier, son mari, Patrice Dubaquier, ainsi que dix autres personnes s’est ouvert mardi matin devant le tribunal correctionnel de Papeete. Face à ses co-prévenus -qui l’accusent d’être à la tête du réseau- Mercedes Dubaquier s’est présentée comme une simple intermédiaire obéissant aux instructions d’un mystérieux « Monsieur M », dont elle n’a pas voulu dévoiler l’identité… Une version à laquelle le tribunal n’a pas accordé beaucoup de crédit.

C’est le procès d’une vaste affaire de trafic d’Ice et de blanchiment d’argent qui s’est ouvert pour trois jours, mardi matin, devant le tribunal correctionnel de Papeete. A la barre, douze prévenus, dont la femme d’affaires Mercedes Dubaquier, son mari Patrice Dubaquier, leur fille, deux de leurs employés et sept grossistes ou dealers impliqués dans le trafic. L’affaire avait éclaté en mars 2017 sur l’interpellation en flagrant délit de Mercedes Dubaquier avec 47 grammes d’Ice en sa possession. L’enquête avait débuté quelques mois auparavant, lors de l’interception d’une discussion téléphonique entre la femme d’affaire et un grossiste très connu dans le milieu, Murphy Tchen, alors incarcéré à Nuutania dans le cadre d’une autre affaire de trafic de stupéfiants. Au cours de l’enquête préliminaire, les gendarmes avaient découvert de nombreux voyages entre Papeete et Los Angeles. Au moins un par mois. L’étude des comptes des différentes sociétés avait également mis à jour un montant suspect de 235 millions de Fcfp de dépôt en espèces.

Mercedes Dubaquier, tête désignée

Mardi matin à l’audience, le procès a démarré par le rappel des déclarations de chacun des prévenus. Les grossistes et dealers ont tous désigné Mercedes Dubaquier comme étant la tête du réseau. Au total, les dealers ont affirmé avoir acheté pour plus d’1 kg d’Ice au couple. Mais face à leurs co-prévenus, les époux Dubaquier ont mené une défense plutôt originale. Patrice Dubaquier, d’abord, a affirmé avoir pris connaissance du trafic fin 2016, et n’avoir effectué que quelques livraisons sans se poser de questions. « Vous dites que vous aviez des doutes, il y a des millions en espèces qui sont déposés sur les comptes de vos sociétés et vous ne posez pas de question ? », l’a interrogé le président du tribunal. « J’ai posé quelques questions mais elle m’a répondu que ça ne me regardait pas », s’est contenté de répondre Patrice Dubaquier. Quand le président l’a interrogé sur les raisons de sa participation au trafic, la réponse a été encore plus surprenante : « par amour pour ma femme ».

Le mystérieux et opportun « monsieur M »

C’est ensuite Mercedes Dubaquier qui a donné sa version des faits. Elle a débuté le trafic pour renflouer les comptes « dans le rouge » de ses sociétés. C’est son ancien directeur commercial, incarcéré pour trafic d’Ice, qui l’aurait contacté depuis Nuutania pour lui « venir en aide ». Mais la femme d’affaires assure n’être qu’un intermédiaire et ne pas avoir fait venir d’Ice lors de ses nombreux voyages « professionnels » à Los Angeles. Un mystérieux « Monsieur M » serait à la tête du trafic. « Est-ce que vous pouvez nous dire qui est ce Monsieur M ? », a fini par s’impatienter le président du tribunal. « A l’heure actuelle, je ne peux pas », a lâché Mercedes Dubaquier, « Pourquoi ? Il y a plusieurs solutions, soit vous avez peur, soit c’est un proche soit il n’existe pas ? », a tranché le président. Mercedes Dubaquier a tout de même reconnu la vente de 2 kg d’Ice pour 200 millions de Fcfp. Comment le mystérieux Monsieur M comptait récupérer son argent ? La femme d’affaire s’est perdue à de nombreuses reprises dans ses explications.

Agacé, le juge a demandé une dernière fois à obtenir des informations sur l’identité de ce « généreux mécène pas pressé de récupérer son argent ». Réponse de Mercedes Dubaquier : « Garantissez-moi la sécurité et je vous dirais ».

La première journée de procès s’est terminée sur ces mots. Le procès reprendra mercredi cette fois sur le volet blanchiment d’argent de l’affaire.