ACTUS LOCALESPOLITIQUESANTÉSOCIALSOCIÉTÉ Grève générale le 24 novembre : que demandent les syndicats ? Charlie Réné 2021-11-16 16 Nov 2021 Charlie Réné Les représentants syndicaux le 1er mai dernier ©CP/Archives Radio1 Plusieurs préavis ont été déposés ce mardi par cinq organisations syndicales et la « grève générale illimitée » doit prendre effet le mercredi 24 novembre. Parmi les revendications, la revalorisation du SMIG, la mise en place d’une caisse de chômage, mais aussi l’opposition à la réforme de la CPS et à l’obligation vaccinale. Après avoir été évoqués pendant plusieurs semaines par les responsables syndicaux, discutés pendant plusieurs jours entre les centrales, des préavis organisant une grève générale illimitée ont été déposé, ce matin auprès du Pays, de l’État et dans une dizaine de branches du secteur privé. Parmi les signataires, la CSTP-FO, O Oe To Oe Rima, CSIP et Otahi, soit quatre des cinq grandes centrales du pays, auxquelles s’ajoute, dans certains secteurs, des organisations autonomes comme le syndicat des pêcheurs professionnels. Parmi les syndicats de premier plan, seul A Tia i Mua, ne participe pas (lire encadré), et dit même ne pas avoir été invité aux discussions. Hausse des salaires La grogne syndicale couvait depuis de longs mois, et depuis la levée du préavis de grève générale de septembre 2020, la question d’un retour dans la rue s’était posée plusieurs fois. Parmi les sujets de mécontentement, « le manque d’écoute » parfois qualifié de « mépris », du gouvernement à l’égard des représentants des salariés dans la gestion de l’épidémie, et de ses conséquences économiques et sociales. Mais c’est bien sûr le pouvoir d’achat qui arrive en tête des cahiers de revendication, avec une demande de hausse du SMIG et de l’ensemble des grilles salariales. Le principe d’une revalorisation du salaire minimum a pourtant déjà été validé par Édouard Fritch mi-octobre devant l’assemblée. Mais l’annonce, non chiffrée, n’a pas suffit à apaiser. D’abord parce que tout, du cours des matières premières, au prix du transport maritime, en passant par le carburant et le logement, laisse penser que le pouvoir d’achat va s’effriter dans les mois à venir. Ensuite parce que le salaire minimum garanti, qui s’élève à 152 914 francs par mois, n’a pas bougé depuis 2014, et reste près de 25% inférieur au SMIC métropolitain. Pour les syndicats, pas question, donc, d’attendre des négociations, dans lesquelles le patronat a déjà annoncé des marges de manœuvre très limitées. Les cahiers de revendications parlent d’une nécessité de revaloriser de 4% à 5% le pouvoir d’achat. Obligation vaccinale Les syndicats ne s’étaient pas fait entendre directement après le vote de la loi sur l’obligation vaccinale, fin août, mais demandent aujourd’hui son retrait pur et simple. Il faut dire que la mesure, prise en pleine catastrophe sanitaire, avait plus divisé que mobilisé dans leurs rangs. Plusieurs responsables syndicaux s’étaient en outre exprimés pour une campagne de vaccination plus rapide, ou pour des contraintes de vaccination à l’entrée du fenua, les éloignant donc du discours des collectifs sceptiques sur les injections. Le succès des manifestations de la fin septembre, et les discours divergents au sein du Tapura, ont visiblement poussé les centrales à s’accorder sur une remise en cause la loi. Les syndicats dénoncent le périmètre de la mesure, mais aussi son mode d’application, qui passe nécessairement par les entreprises et « donne un pouvoir supplémentaire aux patrons » : le préavis parle « d’effets pervers et discriminatoires sur les travailleurs non-vaccinés ». Édouard Fritch, dans son discours de lundi, n’est pas revenu sur la date d’application des sanctions, toujours prévue au 23 décembre, mais a une fois plus insisté sur la stratégie de protection du pays par la vaccination : « C’est réellement le seul moyen dont nous disposons, et qui a fait ses preuves, pour contenir une nouvelle vague », a pointé le président. Tensions autour de la protection sociale C’est pourtant un autre texte qui a précipité le préavis : la réforme de la gouvernance de la protection sociale, première pierre du chantier de la PSG lancée par Yvonnick Raffin. Le texte propose de simplifier la gestion de la CPS, d’en baisser drastiquement le nombre d’administrateurs, et donnerait au passage au gouvernement un contrôle plus important de la caisse, notamment en lui offrant la présidence du conseil d’administration. Une « mainmise » vertement dénoncée par le Cesec la semaine dernière, et considérée par les syndicats comme un « coup de force » du gouvernement contre le paritarisme. « Le problème de la CPS, ce sont les finances, pas la gouvernance, avait ainsi tancé Patrick Galenon, estimant qu’on ne peut pas confier au gouvernement à la fois « les manettes » et « le contrôle » de la CPS. Que le Pays paye ce qu’il doit au titre de la solidarité et il n’y aura plus de problème pour financer la maladie avec les cotisations ». Des cotisations, les syndicats en demandent d’autres, cette fois pour créer une caisse locale de chômage. L’idée est évoquée depuis longtemps, avait fait l’objet de plusieurs accords avec les gouvernements successifs depuis 2010, et avait été de nouveau débattue en début de crise sanitaire. Le 1er mai 2020, à la présidence, le gouvernement aurait même assuré aux syndicats qu’il allait « étudier » de nouveau la mise en place d’une telle assurance, plus tard renvoyée au dialogue social : sans accord des patrons, pas de caisse. L’intersyndicale demande aussi, au passage, l’application « immédiate » de la loi sur l’emploi local, votée mais toujours en phase de mise en place, et « la restitution des 1% FSH pour les logements sociaux salariés » dans le privé. Ainsi qu’une revalorisation des carrières, le paiement des heures supplémentaires et des titularisations plus systématiques dans le public. S’ajoutent des revendications sectorielles, nombreuses d’après le patronat, et des points plus généraux mais moins développés comme la « protection du patrimoine foncier de la Polynésie » ou la mise en place par l’État d’un « fonds d’aide aux salariés » ayant perdu leur emploi. A tia i mua : « on ne va pas à la grève pour négocier après » Dans un communiqué diffusé ce matin, A tia i mua, seule grande centrale non signataire de ces préavis, a expliqué les raisons de son retrait. La confédération explique n’avoir pas été conviée aux discussions syndicales en dépit du fait qu’elle avait été citée parmi les participants par d’autres représentants. Mais elle critique surtout l’idée d’une grève illimitée dans le contexte économique « fragile » des entreprises comme des foyers polynésiens. Elle juge plusieurs dossiers parmi ceux qui sont mis en avant par les grévistes « urgents », mais estime que le dialogue social n’est aujourd’hui « pas rompu ». De la hausse du Smig à la réforme de la PSG en passant par les retraites, la caisse chômage « à financer » ou l’obligation vaccinale, le syndicat appelle donc tous les partis à un dialogue « transparent ». « La grève c’est le dernier recours quand il y a plus de dialogue, or on a pas constaté qu’il n’y avait pas de dialogue possible avec les employeurs ou avec le Pays, précise Dimitri Pitoeff. On discute, et si on ne trouve pas d’accord, il faudra en tirer les conséquences. Mais il ne faut pas aller à la grève pour négocier après ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2021/11/A-TIA-I-MUA.wav Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)