ACTUS LOCALESJUSTICE Affaire Ravel-Le Gayic : le syndicaliste menacé d’un an de prison ferme Caroline Perdrix 2022-06-15 15 Juin 2022 Caroline Perdrix Le procès de l’affaire de corruption dite « Ravel-Le Gayic » portant sur 11 millions de Fcfp s’est finalement tenu ce mardi, près de 10 ans après la révélation des faits et de nombreux renvois. Prévu sur trois jours, le procès aura finalement été bouclé en une seule journée. Le Procureur de la République a requis contre Bill Ravel 2 ans de prison avec sursis et une amende de 11 millions, contre Cyril Le Gayic 3 ans de prison dont deux avec sursis, une amende de 11 millions également et une interdiction définitive d’exercer ainsi que la privation de ses droits civiques pour 5 ans, le tout avec exécution provisoire, et contre Gaston Tetuanui qui a servi d’intermédiaire, un an avec sursis et une amende de 3 millions de Fcfp. Le délibéré sera rendu le 21 juin. En mars 2008, alors que le port est affecté par un mouvement de grève, le pétrolier Maohi affreté par Petrocéan fait des ronds dans l’eau devant la rade de Papeete. C’est une première pour Bill Ravel, dirigeant de Petrocéan, qui n’a jamais connu de grève depuis 1987. Le pétrolier dispose d’une assurance contre le risque de ne pas pouvoir débarquer sa cargaison, mais elle ne court que sur 13 jours et l’échéance approche. Gaston Tetuanui, à qui Bill Ravel demande alors de prendre contact avec Cyril Le Gayic, revient en disant que le syndicaliste demande un million de Francs pour user de son influence et permettre l’accostage et le déchargement du navire. La somme est importante, mais moins que les 3 millions de Francs que coûtera chaque jour de retard au-delà de la limite des 13 jours. Le soir du 25 mars, Gaston Tetuanui porte le million au syndicaliste. Le lendemain matin, le Maohi entre au port et décharge. Le protocole de sortie de grève sera finalement signé le 27 mars. En 2009, une dénonciation anonyme sur le fonctionnement de la CSIP – qui vaut également à Cyril Le Gayic une accusation d’abus de biens sociaux au préjudice de la centrale – amène les enquêteurs à dévider une pelote qui les conduira, entre autres, à l’affaire du pétrolier. Ils découvrent des versements en espèces à des associations très proches de Cyril Le Gayic, des encaissements de chèques émis par différentes entreprises (du « sponsoring »), une confusion fréquente entre compte en banque syndical et compte en banque personnel, comme pour ces « dons » d’adhérents reconnaissants, et une comptabilité syndicale approximative « voire inexistante », tenue non pas par le trésorier général de la CSIP mais par la propre fille de Cyril Le Gayic. Les explications du syndicaliste n’ont pas semblé convaincre la cour, et lui ont valu le qualificatif d’« affairiste qui s’est servi de ses fonctions de secrétaire général et n’a absolument pas servi ses fonctions » de la part du procureur Leroy. Car ce premier million n’était que le début : sur trois ans, 11 millions de Francs seront transmis au secrétaire général de la CSIP, toujours via Gaston Tetuanui. Le prix de la « paix sociale ». C’est ce qu’affirme Bill Ravel, qui estime avoir été victime de « racket », alors que Cyril Le Gayic ne reconnait avoir touché que 2,75 millions, accusant Gaston Tetuanui de s’être largement servi au passage, ce que ce dernier reconnaît en partie seulement. À la barre, l’ex secrétaire général de la CSIP ne reconnait pas les faits de corruption : « À aucun moment je n’ai sollicité de l’argent. » Pour le procureur de la République, « en Polynésie tout le monde se connaît, et tout le monde se tient. L’omerta dure un certain temps, le temps qu’il faut. » Il estime que Bill Ravel « a raison de dire qu’il a été racketté », et s’étonne du revirement de Cyril Le Gayic qu’il considère comme « le principal artisan de cette affaire » et qui avait « reconnu les faits devant les juges d’instruction ». Il a requis 3 ans de prison dont deux avec sursis (le maximum encouru étant de 5 ans) à l’encontre du syndicaliste, une amende de 11 millions de Francs et l’interdiction définitive d’exercer, ainsi que la privation de ses droits civiques durant 5 ans, le tout avec exécution provisoire. À l’encontre de Bill Ravel, il a requis 2 ans de prison aves sursis, et 11 millions d’amende également. Contre Gaston Tetuanui, le procureur a requis 1 an de prison avec sursis et une amende de 3 millions de Francs dont 2,5 millions assortis d’un sursis simple. Enfin, contre l’ancienne comptable de Bill Ravel accusée de complicité, 4 à 6 mois de prison avec sursis. Les avocats des 4 prévenus ont tous plaidé la relaxe. Le délibéré sera rendu le 21 juin prochain. Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)