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Diffamation : l’arroseuse arrosée

Heidi Yieng Kow de Polynésie La 1ère, que le tribunal a reconnue victime de diffamation, et son conseil Me Robin Quinquis. ©CP/Radio1

Mme D. avait pris ombrage d’un reportage de Polynésie La 1ère dans lequel elle n’était même pas citée nommément, et avait envoyé à une quarantaine de journalistes locaux et nationaux des e-mails que le tribunal a reconnus comme diffamatoires à l’égard de l’auteure du reportage. Elle a été condamnée ce mardi à une amende de 150 000 Fcfp avec sursis de 5 ans, ainsi qu’au paiement de dommages-intérêts à sa victime et à France Télévisions.

Le 18 juillet 2019 Polynésie La 1ère diffusait un reportage de Heidi Yieng Kow (cf la version écrite ici) sur des suspicions de vente pyramidale de vanille organisée par une certaine « Taina », avec plusieurs témoignages, dont celui de la fille de la prévenue disant que sa mère était sans doute l’une des victimes de cette arnaque. Un témoignage dûment anonymisé et flouté pour ne pas nuire à l’enquête.

Mais cette mère, une retraitée de l’Éducation nationale, reconnaît à l’écran sa fille avec qui elle est en froid, et pense que celle-ci l’accuse : « J’ai fait des investissements, des actions dans le pétrole, dans l’alimentaire, qu’elle a décidé que c’était de l’arnaque » disait-elle ce matin à la barre. La prévenue n’a donné qu’une explication peu crédible : elle aurait visionné le reportage en compagnie des enfants de Taina, l’arnaqueuse présumée, qui auraient été traumatisés.

Mme D. rumine quelques mois, non sans s’exprimer sur les réseaux sociaux, et plutôt que de demander un droit de réponse comme il est d’usage en matière de presse, le 27 novembre 2019 elle expédie à 49 destinataires de rédactions locales et nationales un long e-mail, se plaignant d’un « reportage diffamatoire » et d’un « préjudice moral intolérable » alors, rappelons-le, qu’elle n’y apparaît pas et que son nom n’est jamais cité. Elle accuse la journaliste, son supérieur et la chaîne de télévision de « faire du sensationnalisme », mais fait elle-même des « révélations » sur la vie privée de Mme Yieng Kow. Elle récidive deux jours plus tard, avec un autre e-mail du même tonneau. « Au bout du 2e courrier, ma cliente qui est journaliste depuis 20 ans et qui s’était entourée de toutes les précautions, ne pouvait plus se laisser agresser de la sorte, et a décidé de porter plainte », relate Me Robin Quinquis.

 

La procureure confirmera que cette affaire de vente pyramidale existe bel et bien, et qu’elle est encore à l’instruction. La mère indignée est par ailleurs prévenue dans un dossier que la magistrate qualifie de « grosse arnaque à la CPS ». Elle a été condamnée à une amende de 150 000 Fcfp avec sursis de 5 ans, ainsi qu’à verser une amende de 100 000 Fcfp à la journaliste, 100 000 Fcfp à France Télévisions, et à payer les frais d’avocat.

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