ACTUS LOCALESJUSTICE Rentrée solennelle au palais de justice Caroline Perdrix 2023-01-27 27 Jan 2023 Caroline Perdrix La cour d’appel et le tribunal de première instance ont fait leur rentrée 2023 ce vendredi matin. Avec un bilan 2022 en amélioration, tant sur le plan du nombre d’affaires traitées et terminées que sur celui des délais. Mais la juridiction de Papeete ne fait pas exception parmi les tribunaux français : les moyens humains, financiers et immobiliers restent inadéquats. Audience solennelle de rentrée ce vendredi matin au palais de justice, en présence du président du Pays et d’une partie de son gouvernement, du haut-commissaire, du président de l’assemblée et des hauts gradés de l’armée et de la gendarmerie. L’occasion d’installer deux nouveaux magistrats : une nouvelle présidente de chambre de cour d’appel, Christine Guengard, et Pierre-Emmanuel Gargam, vice-procureur, qui passe de la cour d’appel au tribunal de première instance. Du côté de la cour d’appel, son premier président Thierry Polle dresse un bilan plutôt positif de l’année 2022. La création l’an dernier d’une deuxième chambre civile a permis de réduire de 13% le nombre de dossiers en cours – il en reste 1 043. Les délais s’amenuisent : la durée prévisible des dossiers est passée de 19 à 16 mois, un chiffre comparable à celui de la métropole. Sauf pour les affaires de terres, dont le nombre a baissé (120 dossiers terminés en 2022, et un stock de 250) mais qui affichent des délais de 25 mois, un progrès « exceptionnel » face au chiffre de 42 mois en 2019. Au pénal, la chambre des appels correctionnels passe de 175 dossiers terminés en 2021 à 213 dossiers en 2022, avec également une « forte diminution du stock » et des délais inférieurs à 6 mois. La chambre de l’instruction et de l’application des peines montre des délais de l’ordre de 2 à 3 mois. Papeete et Nouméa veulent conserver leurs cours d’assises La cour d’assises fait face depuis 4 ans à une hausse importante d’activité : on est passé de 9 dossiers annuels en 2019 à 21 dossiers en 2022, avec un délai de 12 mois. À ce sujet, Thierry Polle a fait le point sur la réforme de décembre 2021 qui remplace, pour les crimes punis de 15 ou 20 ans de réclusion (principalement les viols et les vols avec arme), les cours d’assises par des cours criminelles sans jury populaire. La cour d’appel de Papeete et celle de Nouméa ont demandé que cette réforme ne s’applique pas dans leurs territoires, non seulement pour des problèmes d’effectifs mais aussi parce que les citoyens sont « très attachés à leur participation à l’œuvre de justice » qui donnent aux décisions « un surplus de légitimité ». Si le ministère de la Justice en a accepté le principe, il faut passer par le parlement, via un cavalier législatif « délicat à trouver dans le contexte parlementaire actuel » : Thierry Polle a invité les parlementaires présents, Teva Rohfritsch, Moetai Brotherson et Steeve Chailloux, à échanger sur le sujet. Une section détachée aux Tuamotu-Gambier avant la fin de l’année Le premier président de la cour d’appel s’est aussi réjoui de la création en septembre prochain d’une section détachée du tribunal aux Tuamotu Gambier, dotée d’un magistrat permanent. Comme tous les magistrats, du siège ou du parquet, qui se sont exprimés lors de la séance, Thierry Polle a rappelé que la juridiction manque de moyens humains – tous ont abondamment remercié les greffiers pour leur conscience professionnelle, particulièrement ceux du RCS. 2022 a finalement vu l’organisation d’un concours de greffiers CEAPF (560 candidats) ; mais les lauréats devront partir deux ans en formation à Dijon, ce qui signifie qu’il faudra encore patienter pour voir une réelle amélioration sur ce point. Toutefois le premier président annonce l’arrivée de deux contractuels cette année, et une autre demande de renforts. Enfin la juridiction de Papeete manque d’experts auprès des tribunaux en matière de construction, de médecine et de psychiatrie. Il a aussi rappelé l’exiguïté des locaux ; cette année une aile de l’ancien hôpital Vaiami en cours de rénovation accueillera le tribunal mixte de commerce et le juge forain. En revanche il faudra attendre 2027 ou 2028 pour que la cour d’appel s’installe dans son futur bâtiment de 2 600 m2. Tribunal de première instance : en 2023, focus sur les atteintes à l’environnement C’est ensuite le procureur de la République, Hervé Leroy, qui a fait le bilan du tribunal de première instance. 2022 a vu arriver au TPI 7 453 affaires poursuivables, un chiffre en baisse de 8% par rapport à 2021. Depuis 2017, les priorités en Polynésie restent les mêmes : lutte contre les violences intrafamiliales, la délinquance routière liée à l’alcool et/ou la drogue, la délinquance juvénile, les atteintes à la probité, et bien sur la lutte contre les trafics de stupéfiants (près de 30% de la population pénale sont des condamnés pour ce motif). Hervé Leroy a souligné l’importance prise par les procédures de comparution immédiate – 411 en 2022 – qui est une réponse pénale d’autant plus efficace et porteuse de sens pour les auteurs et les victimes qu’elle intervient rapidement après les faits, a -t-il expliqué. Mais en 2023, le procureur de la République promet en outre un « focus sur les atteintes à l’environnement », base du marketing touristique polynésien. « Il ne peut plus être invoqué la prétendue coutume pour justifier le massacre de tortues », a-t-il martelé, rappelant que déjà en 2022, des braconniers ont été condamnés à des peines de prison ferme et à la confiscation de leurs bateaux. Il annonce également « 3 dossiers d’importance » de pollution marine et terrestre et d’infractions « mettant en cause des acteurs qui concourent à la protection de l’environnement ». Enfin Hervé Leroy a conclu son propos en citant un confrère célèbre, François Molins, procureur général près la Cour de cassation, pour rappeler les principes de l’indépendance des magistrats du parquet, dont l’action ne saurait être limitée ni par leur hiérarchie, ni par leur juridiction, ni par le Garde des sceaux. Ce sera la seule allusion aux tourments qui agitaient récemment et agitent encore le palais de justice de Papeete. Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)