Ancien pilier de Tefana, capitaine de l’AS Pirae, avec qui il a remporté la Ligue 1 la saison passée, et grand habitué des Toa Aito, Alvin Tehau quitte le fenua. Lauréat du concours de surveillant pénitentiaire, le joueur de 35 ans doit prendre un poste en métropole et ne jouera pas la prochaine saison en Ligue 1. Un virage, mais pas forcément une fin, dans une carrière déjà riche, passée par l’international, et qui laissera quoiqu’il arrive sa marque dans le ballon rond local.

Nana le fenua. À 35 ans, l’emblématique joueur de Tefana, qui a rejoint Pirae en 2021, s’apprête à tourner une nouvelle page de sa carrière de footballeur. Après avoir brillé plus de 20 ans sur les terrains tahitiens, le milieu de terrain a passé et obtenu le concours de surveillant pénitentiaire, carrière qui doit l’amener, d’ici la fin de l’année, à une affectation dans l’Hexagone. À quelques semaines de son départ, ceux qui l’ont côtoyé parlent de lui comme d’une « grande figure du football ». Ses premiers buts, il les a marqués très tôt sur la pelouse du stade Ganivet à Faa’a. Repéré avec ses frères en milieu scolaire lors des sessions d’initiation organisées par le club Tefana, il se forme et reste attaché, pendant l’essentiel de sa carrière, au club de Faa’a. « Il a gravi toutes les étapes, se souvient Laurent Henis, son tout premier éducateur, du plus jeune âge, jusqu’aux seniors ».

Il ne brille pas seulement chez les jaune et vert : « Il a fait pratiquement toutes les sélections de Tahiti » reprend son ancien coach. Alvin a notamment marqué les esprits dans la sélection tahitienne des moins de 20 ans, avec qui il a par exemple participé aux phases finales de la Coupe du Monde en Égypte. Quant aux Toa Aito ils l’ont ainsi appelé dans ses rangs dès 2012, puis de façon régulière jusqu’à 2022.

Un joueur international qui a tenté sa chance en Indonésie

Au total, Alvin Tehau a joué une vingtaine de matchs internationaux sous les couleurs de Tahiti, dont la Coupe d’Océanie remportée en 2012 et la Coupe des confédérations l’année suivante. Il avait alors été l’auteur du seul but de la compétition pour les Toa Aito, qui en avait encaissé 24 en trois matchs. S’ajoutent, côté club, une trentaine de matchs en O’League, dont deux finales, en 2012 et 2024, deux passages en Coupe de France, et même une, en 2022, en Coupe du monde des clubs de la FIFA avec Pirae. Sans compter ses apparitions en Coupe du monde avec les Tiki toa en beach soccer.

L’international, il s’y était intéressé de prêt. À 21 ans, Alvin Tehau avait fait le pari, pour lancer une carrière professionnelle, de partir jouer en Indonésie, dans un club alors entrainé par un ancien coach des Aito Taurea, qu’il suivra même, l’espace de quelques mois en Belgique… Il reviendra toutefois au bercail, pour jouer dans son club de cœur, avec lequel il a remporté le championnat de Tahiti à deux reprises et gagné plusieurs Coupes de Tahiti. Son engagement, et bientôt son expérience, en font un leader sur le terrain, fréquemment décrit par ses coéquipiers comme « exemplaire ». Parmi ses nombreuses qualités, c’est « sa technique, son physique, et sa vision de jeu » que retient l’ancien entraîneur de Tefana, aujourd’hui responsable des gardiens de but de la sélection tahitienne, qui a eu l’occasion de le côtoyer une dernière fois lors du déplacement des Toa Aito à Fidji.

Avec ses frères, « Pour les gérer, c’était sport »

Durant sa carrière, Alvin a aussi côtoyé Sébastien Labayen dès l’âge de 14 ans. Labayen, qui a été son éducateur, entraîneur, et même adversaire lorsque Alvin a signé à Pirae, parle de lui comme d’un joueur « exigeant avec lui-même » et qui imposait cette même exigence à ses partenaires. Il évoque également le parcours de vie d’Alvin, qui fait partie d’une « sacrée fratrie » avec qui il a parfois partagé le terrain (Lorenzo Tehau est son frère jumeau, Jonathan Tehau son aîné, Teaonui Tehau son cousin). « Pour les gérer, c’était sport, » se rappelle amusé le coach. « Les titres qu’il a engrangés, son comportement, son exemplarité sur le terrain, quoi qu’il en soit, il a marqué l’histoire du football polynésien, » assure encore l’entraîneur de Faa’a, qui espère le voir plus tard encadrer des équipes et apporter son expertise aux futurs footballeurs locaux.

« Un capitaine de qualité »

Depuis l’annonce de son départ en avril, le club de Pirae, champion en 2023 – 2024, se prépare à perdre un « capitaine de qualité ». « C’était important pour lui de gagner le championnat de Ligue 1. Il tenait également à cœur de remporter la Ligue des champions d’Océanie, même si nous avons malheureusement perdu en finale, » regertte Vatea Terai, qui a travaillé à ses côtés pendant six mois. « Cela a été un énorme plaisir de l’avoir comme joueur, » dit le coach des oranges. « C’était un super leader, écouté par tous, qui a beaucoup apporté d’humilité au groupe. Des joueurs de cette qualité, c’est toujours une perte pour un club, mais le groupe a toujours su faire face aux défis. Alvin va nous manquer, mais l’équipe est solide et je compte sur les copains pour atteindre les objectifs fixés cette année. »

Alvin Tehau, qui préfère « partir discrètement », s’apprête à laisser derrière lui une grande partie de sa vie. Il ne précise pas où il est affecté par la pénitentiaire, et s’il se trouvera un club de football à proximité. Difficile de croire en tout cas, après 20 ans de compétitions, qu’il raccrochera les crampons si facilement.