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Six ans après son grave accident sur le tour Tahiti Nui, il devient champion paralympique à Paris

Le cycliste français Thomas Peyroton-Dartet avait violemment heurté un scooter lors du Tour Tahiti Nui de 2017. Perte de connaissance, multiples fractures et opérations, deux semaines d’hospitalisation au Taaone et des troubles neurologiques qui sont restés… Ce grave accident, doublé d’un autre en 2022 et d’un parcours de vie semé d’embûches ne l’a pas éloigné de sa passion et l’a orienté vers le paracyclisme, où il enchaîne les succès. Ce mercredi, il a décroché, à 39 ans, la médaille d’or au contre-la-montre des Jeux paralympiques Paris 2024. Et il en vise une autre samedi.

C’était le 22 septembre 2017, le 23e Tour Tahiti Nui bat son plein. Les champions locaux et invités internationaux s’élancent, pour la quatrième étape, sur les routes de Moorea. En jaune après avoir brillé, l’avant-veille, sur les 119 kilomètres entre Punaauia et la Presqu’île, Thomas Peyroton-Dartet compte bien assumer son statut de favori. Au 15e kilomètre de course, juste avant l’entrée de Paopao, et alors que le peloton est déjà très étiré, le Français tente de se détacher de son groupe pour rattraper une petite échappée. Il se décale sur la voie de gauche, au milieu de laquelle, quelques centaines de mètres plus loin, un deux-roues circule dans l’autre sens. « Il était sur une attaque, c’était juste à la sortie du virage, il est arrivé à plus de 50 km/h et n’a pas pu éviter le scooter », racontait alors Benoit Rivals, alors président du Vélo club de Tahiti.

Le choc est violent, la chute est lourde, la tête cogne le bitume, le maillot jaune perd connaissance. Emmené à l’hôpital de Moorea, on lui diagnostique un traumatisme crânien lourd : il est évacué vers le Taaone quelques heures plus tard, tandis que l’étape du jour est annulée. Dans la soirée de ce 22 septembre, les organisateurs du tour cycliste confirmeront que Thomas Peyroton-Dartet souffrent de multiples fractures « au cou, à la face ou à l’oreille interne », dont certaines impliquent des interventions chirurgicales, ainsi que des hématomes au cerveau qui « nécessitent une surveillance constante ». Il restera deux semaines à l’hôpital voyant ses coéquipiers se relayer à son chevet, de même que la conductrice du scooter, une personne âgée très légèrement blessée, qui viendra s’excuser et échanger avec le grand blessé. À sa sortie du Taaone, début octobre, l’athlète de 32 ans reprendra l’avion souriant, certes, mais en fauteuil roulant.

Retour au fenua en « ambassadeur » huit mois plus tard

Cet accident, Thomas Peyroton-Dartet le décrit comme un virage dans sa carrière. Mais ça n’est ni le premier, ni le dernier pour ce « monstre de résilience », comme le qualifie le journal l’Équipe. À 19 ans, alors qu’il fait partie des espoirs du cyclisme français, on lui diagnostique une endofibrose de l’artère iliaque, qui l’éloigne de ses rêves de carrière professionnelle. Entré dans les forces de l’ordre, le fils de CRS roule pourtant toujours, pour l’Équipe de France de la Police nationale. Il finit par quitter l’uniforme en 2015, après avoir échappé de peu aux attentats de Charlie Hebdo : il était de garde dans les locaux du journal quelques heures avant la fusillade. Il prend plus que jamais conscience que sa vie, c’est le vélo, et qu’il veut la rouler à fond. L’accident tahitien ne fait d’ailleurs pas fléchir son ambition : après quelques trop longues semaines de convalescence et de rééducation, le coureur remonte en selle dans la Team Peltrax, une petite équipe métropolitaine. Qui ne tarde pas à le remettre à la compétition.

Il est même invité à la Ronde tahitienne de mai 2018 en tant qu’ambassadeur. Une « fierté », explique-t-il au micro de Radio1 à son retour et un « plaisir » de retrouver le fenua, et même Moorea. Sur l’île soeur, il passe un long moment avec la conductrice du scooter, ce qui l’aide à « remonter la pente » sur le plan mental. Mais du côté physique, les conséquences de l’accident se font encore sentir : Thomas Peyroton-Dartet est encore victime « de crises d’épilepsie avec des pertes d’équilibre et des soucis d’audition ». Un autre accident grave, avec une voiture cette fois, et survenu en 2021 lors d’un entrainement, n’arrange pas les choses.

Courses en « valide » et en paracyclisme

Ces symptômes ont donc perduré, et le méridional – il est originaire de Muret, près de Toulouse – finit peu à peu par les accepter. Toujours aligné dans des courses « valide » dans une équipe de troisième division (ou figure le Tahitien Kahiri Endeler), il finit par s’investir dans le handisport. Son handicap ? Une « ataxie cérébelleuse » : « un terme regroupant plusieurs symptômes neurologiques qui se manifestent par un manque de coordination fine des mouvements volontaires », comme il l’a répété, ces derniers jours, aux médias nationaux. Thomas Peyroton-Dartet, redevenu entre temps policier, devient champion d’Europe de paracyclisme en 2022, décroche une médaille d’argent aux championnats du monde sur route l’année suivante. Son objectif est clair depuis longtemps : Paris 2024,  où le miraculé a brillé, cette nuit, malgré un ultime obstacle – une fracture à la clavicule début juillet. Il en faudra beaucoup plus pour le terrasser.

Lors de son départ du fenua, deux semaines après l’accident, en octobre 2017

Ce mercredi 4 septembre, presque six ans après son accident tahitien, Thomas Peyroton-Dartet a donc parcouru les 28 kilomètres du contre-la-montre paralympique de Clichy-sous-Bois en 38 minutes, 28 secondes et 80 centième. Près de 44 seconde d’avance sur la médaille d’argent espagnole et le bronze allemand, la victoire est écrasante. Et cet or, inattendu dans cette épreuve, et pour ses premiers Jeux à 39 ans, sonne comme une belle revanche sur le sort.

Toujours très concentré – ses troubles neurologiques l’obligent à se mettre dans une « bulle complète » qui l’a amené, parfois, à ne pas voir la ligne d’arrivée et à continuer à pédaler – le cycliste refuse de pleinement savourer. Samedi, il sera au départ de la course en ligne aux côtés d’Alexandre Léauté, qui a déjà remporté non pas une mais deux médailles d’or dans ces JO de Paris en cyclisme sur route. Des médailles qui, avec celles de Thomas Peyroton-Dartet ont fait revenir la France à la cinquième position du classement des nations, avec 50 podiums dont 15 titres.

©FFcyclisme

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