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Au tribunal administratif, avis de gros temps pour les voileux de Taina

L’Association des voiliers en Polynésie continue sa lutte contre l’augmentation des tarifs de la Marina Taina. L’affaire est repassée au tribunal administratif pour la deuxième fois en deux mois. Le rapporteur public a gardé le même cap que lors de la première audience, en concluant au rejet de la requête. Le délibéré est attendu pour le 10 décembre et si les juges suivent ces conclusions, les nouveaux tarifs entreront en vigueur. 

Nouvelle étape judiciaire pour l’Association des voiliers en Polynésie (AVP). Après avoir obtenu, début juin, la suspension de l’augmentation des tarifs de la marina Taina par le juge des référés, les propriétaires de voiliers et leur avocat Me Millet ont fait face aux juges administratifs ce matin. Il y a tout juste deux mois, cette même juridiction avait déjà examiné au fond la demande de l’association d’annuler cette hausse tarifaire, décidée fin janvier 2024 par Marina Services, entreprise titulaire de la DSP du port autonome. Une augmentation qui vise notamment les propriétaires qui vivent sur leur bateau, pour qui le tarif sera majoré, jusqu’à 460 % selon les catégories de navires. Un voilier de 46 pieds occupé par son propriétaire pourrait ainsi devoir débourser 135 000 francs par mois pour s’amarrer à une bouée.

Fin septembre, le rapporteur public avait conclut au rejet de la requête, et le délibéré était attendu le 1er octobre. Les débats ont finalement été rouverts, « ce qui est assez rare », note l’avocat, car « le rapporteur public avait requalifié la nature de la redevance », une question « un peu technique, mais qui a complètement modifié le débat » et donc entraîné cette nouvelle audience ce mardi. L’occasion pour l’association de répéter ses arguments, elle qui juge cette hausse « inacceptable ». « On imagine dans ce cas-là qu’il y a des services exceptionnels qui sont rendus pour justifier cette augmentation. Et finalement, on a démontré qu’il n’y avait eu aucune augmentation et même une réduction des services rendus », poursuit Me Millet.

Les voileux prêts à payer plus, mais pas à ce point

De son côté, le port autonome maintient que, jusqu’à cette hausse, « les tarifs étaient dérisoires par rapport aux services rendus ». Leur représentation rappelle que plus de 500 millions ont été investis, avançant aussi 380 millions de dépenses de fonctionnement depuis 2006. « Il faut prendre en compte la rareté, l’inflation et ces investissements », explique ainsi la représentation du port, pour qui « la redevance ne correspond pas uniquement au fait de rattacher son bateau à un corps mort, mais à un ensemble de services ».

Les voileux concèdent bien volontiers qu’une augmentation était nécessaire, après 18 ans sans hausse tarifaire. « Qu’il y ait une augmentation de 20-21%, comme l’inflation sur la période, ça parait logique. Je pense que tous les occupants et usagers sont prêts à l’accepter. Mais il faut être raisonnable. Augmenter de de 465% pour certains usagers, ça pose une difficulté même d’un ordre intellectuel. »

L’impression que ça donne, c’est qu’on n’est pas dans une logique financière ou de service, parce qu’en réalité tous les usagers qui ont un bateau de moins de 24 pieds ne subissent pas 1% d’augmentation. On est sur une logique finalement dirigée contre les voiliers et les voiliers occupés, habités », martèle l’avocat.

« Aucune logique, donc c’est certainement une volonté politique »

Comme lors de l’audience de septembre, le rapporteur public est allé dans le sens du Port autonome. Il y a deux mois, il avait expliqué que l’entrepris Marina Services était libre de fixer ses tarifs, en s’appuyant sur la forte demande. Cette fois, il conclut notamment que cette hausse, ciblée sur les propriétaires habitant à bord de leur voilier, pouvait se justifier par l’avantage procuré par l’économie de loyer réalisée. Une déception pour les représentants de l’association. « On voit bien que ça ne tient pas si on compare avec d’autres marinas, comme celle de Uturoa, où il y a 12 000 francs de redevance mensuelle, contre 135 000 à Tahiti. Il n’y a aucune logique, que ce soit rationnelle, intellectuelle, comptable, financière ou de service sur ces redevances. Il n’y a aucune logique, donc c’est certainement une volonté politique », estime Me Millet.

Les juges rendront leur délibéré le 10 décembre. En cas d’échec, l’AVP aura encore la possibilité de porter l’affaire devant la Cour administrative d’appel de Paris. Et si les nouveaux tarifs finissent par entrer en vigueur, « je pense qu’il y a un certain nombre de personnes, et la plupart des usagers, qui ne pourront pas payer à ce niveau_là. Et ça va poser une vraie question sur ce service public, qui rapporte beaucoup à la Polynésie », rappelle l’avocat.

Celui-ci craint aussi que le Port autonome « pourrait être tenté d’appliquer la même politique » dans les autres marinas dont il a la gestion.

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