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À la Biosécurité, les beagles « ont réussi leur mission » et vont accueillir trois nouveaux compagnons


La Biosécurité tirait le bilan, ce jeudi, d’un peu plus d’un an d’actions de sa brigade cynophile à l’aéroport de Tahiti-Faa’a. Les trois beagles et leurs maitres-chiens formés en Nouvelle-Zélande ont réalisé pas moins de 1 700 interceptions de matières animales ou végétales qui faisaient courir un risque sanitaire ou agricole au fenua. Des résultats qui encouragent le Pays à développer ce type de surveillance ailleurs, de la poste au port, en passant par les vols interîles. Trois autres chiens pourraient arriver dès l’année prochaine.

Opération démonstration, ce matin à l’aéroport de Tahiti-Faa’a. Dans le flux de passagers d’un vol French Bee, qui, après un long vol, se pressent vers la sortie, un maitre-chien fait slalomer son beagle entre les valises et les chariots, reniflant chaque sac – et quelques pantalons – et s’arrêtant, à quelques reprises, pour lancer un regard vers son maître en uniforme. « Là, il a signalé », commentent les agents de la biosécurité, désormais habitués à travailler avec ces « chiens de détection » à la truffe affûtée.

Odin, Oreo et Owen, c’est le nom des trois beagles néo-zélandais, tous de la même portée, qui avaient débarqué, fin avril 2023, avec leurs maîtres fraîchement formés pour renforcer le contrôle de biosécurité aux arrivées internationales. Un peu plus d’un an plus tard, et après « une adaptation sans accrocs », le bilan est « très positif » pour le responsable de cette brigade cynophile. Lui-même maître-chien, Hugo Oudart qui compte, sur un peu moins de 15 mois, 1 700 détections effectuées par le trio de chiens, qui se relaient dans le terminal, avec au final 900 marchandises « à risque » qui ont pu être interceptées.

Charcuterie, fruits, miel et préparations maison

Des marchandises très diverses dont on ne peut voir un petit échantillon dans le congélateur de la biosécurité, à quelques pas du bureau de contrôle. On y croise beaucoup de charcuterie, qui ne sont autorisées à l’importation que si elles sont dans leur emballage et avec leur étiquetage d’origine, et originaire de pays non touchés par la grippe porcine (comme la France ou l’Espagne, mais pas l’Italie ou l’Allemagne par exemple). De la viande, fumée, cru ou cuite, aussi et parfois en grande quantité : un passagers arrivant de France « en avait ramené un peu plus de 13 kilos » récemment, raconte un agent. Ou des fruits, par dizaines, des graines en tout genre, des préparations artisanales diverses emballées ou mises en pot à la main. Du miel, aussi, un produit particulièrement à risque puisque la Polynésie est un des rares territoires au monde à être exempts du virus varroa qui décime les ruches, et que les conditions d’importation sont tellement strictes qu’il est, pour un particulier, quasi-impossible d’en débarquer.

Sur tous ces produits – et beaucoup d’autres, les chiens étant dressés pour repérer environ 70 odeurs – la direction de la Biosécurité joue un rôle « vital », rappelle le ministre de l’Agriculture Taivini Teai. Le risque « c’est par exemple que des plantes non déclarées, qui arrivent avec leur système racinaire, abritent des œufs, des larves d’insectes qui viendrait ravager nos cultures, explique le ministre de tutuelle. C’est également pour la viande, des virus qui seraient à l’intérieur de la chair. Cette viande va finir dans la poubelle, va être manger par un autre mammifère et de là contaminer toute une chaîne alimentaire et toute une filière d’élevage ».

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Tous les produits interceptés par la biosécurité sont – si le passager n’entend pas les convoyer dans l’autre sens – détruits à l’incinérateur de Papara. Les propriétaires des saucissons, pots de miels et boite de cerises sont par principe invités à la destruction, pour vérifier que leurs mets interdits n’ont pas terminé dans une autre assiette.

Moins de la moitié des passagers internationaux reniflés

Les chiens détecteurs ont donc largement renforcé le filet de contrôle de la biosécurité, qui demande habituellement aux passagers « s’ils ont quelque chose à déclarer », mais ne passe pas les bagages aux rayons X, comme peut le faire la douane, par exemple. Pourtant, Odin, Oreo et Owen et leurs maîtres ne peuvent couvrir que 60 à 70% des vols internationaux arrivant et 40 à 50% des passagers. Le bon bilan de cette première année a encouragé le gouvernement à renforcer les équipes. Trois autres chiens doivent arriver de Nouvelle-Zélande, toujours avec les formations d’agents nécessaires, en fin d’année prochaine, ou début 2026. « On pourrait déjà contrôler quasiment 100% des passagers arrivants en Polynésie française. On a le transport interinsulaire, aussi, qui est intéressant, on a les croisières, l’interîles, on a le centre de tri postal, qu’on souhaite développer, reprend Hugo Oudart, qui rappelle que la Biosécurité regroupe au total plus de 70 agents. L’idée c’est que l’ensemble des points d’entrée de potentiels organismes nuisibles soient contrôlés efficacement en termes de sécurité. Il y a déjà des contrôles qui sont existants et les chiens seraient un moyen de contrôle supplémentaire pour augmenter notre efficacité ».

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Chenil inauguré à Faa’a, un projet à Fare Ute

Ces nouveaux canins spécialisés, probablement d’autres beagles, auront quoiqu’il arrive de la place pour loger. Ce jeudi matin a aussi été officiellement inauguré le chenil de biosécurité, juste à côté de l’aéroport. Six « box », une salle de soins, une salle d’isolement et une courette de jeu en extérieur qui attendaient depuis de longs mois d’être terminés et d’obtenir leur conformité. Le bâtiment a été financé pour moitié, comme les véhicules et la formation des agents, par le Programme européen Protège. Coût total de l’opération : environ 80 millions de francs. « Ça peut paraître beaucoup, reconnait Hugo Oudart, mais c’est à comparer avec les centaines de millions, si ce n’est pas le milliard de francs aujourd’hui, qu’a coûté la mouche des fruits, par exemple, dans la production agricole ». Le gouvernement semble lui aussi certain que la dépense est fructueuse : à plus long terme, un deuxième chenil de la biosécurité devrait être créé à Fare Ute pour travailler plus facilement au port sur les arrivées de croisiéristes ou les envois de fret dans les îles.