Marc Outin, l’avocat qui avait publié sur les réseaux sociaux une vidéo dans laquelle il tenait des propos antisémites, comparaissait devant le tribunal ce mardi. Assurant lui-même sa défense, il s’est enferré dans un raisonnement tenant davantage du délire paranoïaque que de la plaidoirie. Le procureur a requis 2 mois de prison avec sursis et une amende de 2 millions de Francs, et le délibéré sera rendu le 7 mars.
Le 2 septembre dernier, Me Marc Outin postait sur les réseaux sociaux une vidéo de lui-même devant un fumoir grand modèle en disant « Je suis sûr qu’à Dachau ça aurait pu les intéresser ». Il est poursuivi par l’ancien consul d’Israël en Polynésie, l’Association culturelle et israëlite et sympathisants de Polynésie, le Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme pour « injure publique envers un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée », il l’est aussi par notre consœur de TNTV Laure Philiber, contre laquelle il avait proféré des menaces, pour avoir divulgué son numéro de portable et appelé son auditoire à la harceler « jour et nuit » parce qu’elle aurait « organisé son lynchage médiatique » en publiant des échanges de SMS, et refusé de diffuser certaines de ses allégations.
Une « plainte commandée par l’ambassade d’Israël à Paris »
Ce matin au tribunal de première instance de Papeete, Marc Outin qui semblait déjà instable, n’a pas déçu. Il réfute toute accusation d’antisémitisme, expliquant que la vidéo faisait suite à une dispute avec son fils, qu’il accuse d’être un « nazi », et qu’il aurait ce jour-là fui le domicile familial, d’où la référence à « l’hôtel du Parc » (qui fut le siège du gouvernement de Vichy). La vidéo était donc destinée à son fils – un argument jamais évoqué en garde à vue – mais il l’aurait postée sur Facebook par inadvertance : « Je comprends que certains membres de la confession l’aient mal pris, ce n’est pas une faute volontaire de ma part. (…) C’est un malentendu, voilà. » Dans son esprit, puisqu’il n’est pas antisémite, il ne peut s’agir que d’un complot, culminant par cette « plainte commandée par l’ambassade d’Israël à Paris ». C’est donc lui la victime : « si je vais visiter les lieux saints à Jérusalem, je ne suis pas sûr d’en sortir vivant. » Et il a l’explication : c’est parce qu’il est « lanceur d’alerte », car depuis plusieurs années il « dénonce des malversations à la Carpa », la Caisse des réglements pécunaires des avocats, qui seraient couvertes par le Barreau de Papeete. D’ailleurs il est persuadé que ses échanges téléphoniques « ont forcément été enregistrés par le Chiffre ». Il réclame la relaxe, ou à tout le moins « une vraie enquête » avec « un juge d’instruction impartial ».
Marc Outin a refusé de se soumettre à une expertise psychiatrique. Leur brève rencontre a conduit le médecin psychiatre, qui constatait un « mauvais état général » physique, à douter de l’origine neuro-dégénérative de ses propos – Marc Outin dit souffrir d’une maladie congénitale qui affecte sa moëlle épinière – et à recommander des examens approfondis. Pour le procureur, c’est surtout « un professionnel du droit qui ne peut ignorer la loi », « un habitué des tribunes numériques et des dérapages verbaux nauséabonds » qui ne saurait se cacher derrière une erreur de manipulation ou de destinataire.
Le ministère public a requis 2 mois de prison avec sursis et 2 millions de Francs d’amende, ainsi que la publication du jugement dans la presse. Le délibéré sera rendu le 7 mars.