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Air France: les pilotes ont dit « oui » à une filiale, et maintenant?

Paris (AFP) – Le « oui » des pilotes à la création d’une filiale d’Air France, contre l’avis du syndicat majoritaire SNPL, ouvre la voie à la création d’une compagnie à coûts réduits. Mais plusieurs inconnues demeurent, notamment sur sa mise en oeuvre.

Question: Que change le vote?

Réponse: Les pilotes d’Air France ont accepté à 58% « l’externalisation d’une partie de l’activité et de la flotte long et moyen-courrier d’Air France » dans une filiale détenue par le groupe (projet « Boost »). Le résultat du vote, largement suivi (74% de participation), prend à contre-pied les deux syndicats représentatifs, SNPL et Spaf. Le premier craint une vente future de la filiale, le second « un siphonnage à terme de toute l’activité Air France ».

Le SNPL, majoritaire dans les cockpits (65% des voix), veut retenir de la consultation la légitimité qu’elle lui confère pour négocier: il n’avait pas jusqu’à présent de « mandat » pour négocier « Boost », donc les discussions se faisaient « à tâtons ». « Ce flou-là a été levé », avance Véronique Damon, sa secrétaire générale. Désormais « il n’y aura plus d’opposition à +Boost+ », il reste simplement à négocier « la manière de le mettre en œuvre », assure-t-elle à l’AFP.

Q: La direction en position de force?

R: Le SNPL peut paraître affaibli par le résultat du vote, mais le sort de la nouvelle compagnie reste entre ses mains: celle-ci ne verra le jour que si le syndicat accepte l’intégralité de l’accord d’entreprise adressé début février, dont « Boost » n’est qu’une composante.

Le texte, ouvert à la signature jusqu’à vendredi, porte également sur les conditions d’emploi à Air France et Transavia, la filiale low-cost du groupe. Il impose de nouveaux efforts de productivité à l’ensemble des pilotes de la compagnie. Or, répètent à l’unisson les deux syndicats, l’accord n’est « pas signable en l’état ». Ils vont donc mettre la pression pour obtenir des concessions de la direction.

Q: Que va faire le SNPL?

R: Le syndicat réunit mercredi son Conseil (parlement interne) pour étudier l’intégralité du projet d’accord et affiner sa stratégie. A cette occasion, il pourrait demander formellement à la direction la reprise des discussions. Le SNPL estime notamment que l’épineuse question de l’équilibre entre Air France et KLM a été « à peine évoquée » jusqu’à présent, d’après Mme Damon.

L’autre hypothèse, moins probable, serait de considérer les négociations comme définitivement closes. Dans ce cas, deux options : soit le Conseil décide seul de signer ou non l’accord, soit il consulte ses adhérents pour arrêter sa position.

Q: Le lancement de « Boost » retardé?

R: La direction veut lancer la compagnie à l’automne sur moyen-courrier. Une reprise des négociations bouleverserait-elle le calendrier? Les syndicats et la direction, qui se refuse à tout commentaire, n’envisagent pas ce scénario.

La nouvelle compagnie utiliserait au départ des avions appartenant déjà à la flotte d’Air France, ce qui facilite un lancement rapide. Il suffira à la direction de définir sa politique commerciale, de trouver un nom à la nouvelle compagnie et de recruter le millier de stewards et hôtesses (PNC) annoncés.

Q: Les PNC peuvent-ils bloquer le projet?

R: Le personnel navigant commercial (PNC) est vent debout contre « Boost », qui prévoit l’embauche en externe d’hôtesses et stewards payés 40% moins cher qu’à Air France. Les syndicats Unsa-PNC et SNPNC-FO y voient « un cheval de Troie pour détruire (leurs) conditions de travail et de rémunération dans les années à venir », voire leurs emplois. Mais les syndicats de PNC ne participent pas aux négociations. A défaut de pouvoir bloquer le projet, ces derniers brandissent régulièrement la menace d’un « conflit majeur ».

© AFP/Archives STEPHANE DE SAKUTIN
Avions Air France sur le tarmac de l’aéroport Charles de Gaulle, lors d’une grève des pilotes, le 24 septembre 2014