PLAN LARGE – Réputé intello et sérieux, le cinéaste avait aussi des facettes totalement inattendues.
L’INFO. A force de sidérer tout le monde par son incroyable jeunesse d’esprit, on avait oublié qu’il pouvait mourir. La disparition d’Alain Resnais samedi à l’âge de 91 ans laisse le cinéma orphelin.
Les hommages qui lui ont été rendus dimanche dressent le portrait d’un cinéaste en perpétuelle recherche et qui, de film en film, ne cessait de se renouveler. Alain Resnais laisse une œuvre subtile, éclectique mais aussi énigmatique, à son image. Voici quelques traits de cette personnalité aux multiples facettes.
Un « intello » aux goûts populaires. Dès ses premiers films, Alain Resnais se taille une réputation d’ »intello ». Il faut dire que le cinéaste multiplie les collaborations avec de grands écrivains : Marguerite Duras pour Hiroshima mon amour (1959), Alain Robbe-Grillet pour L’année dernière à Marienbad (1961) ou encore Jorge Semprun pour La Guerre est finie (1966).
Cette image de « cinéaste intello » le faisait rire, il ne se voyait pas ainsi. Depuis sa jeunesse, il avait une passion pour la BD. « Ce que je sais en cinéma, je l’ai autant appris par les comics que par le cinéma. Les règles du découpage, du montage y sont les mêmes« , disait-il.
Dans une interview accordée en 2012 à L’Express, il disait aimer leBatman de Tim Burton et faisait mine de regretter de ne pas avoir réalisé Spider-Man. Dans sa filmographie parfois pointue, On connaît la chanson et Smoking/No smoking restent ses plus grands succès populaires.
Un cinéaste fou… de théâtre. En lui rendant hommage dimanche, nombreux sont ceux qui ont souligné sa passion pour le théâtre. L’un de ses derniers films – Vous n’avez encore rien vu sorti en 2012 – s’inspirait d’ailleurs d’Eurydice, une pièce de Jean Anouilh sur le mythe d’Orphée.
Lui qui préférait tourner en studio plutôt qu’en extérieur « pour maîtriser les sources de lumières » n’aura pourtant jamais mis en scène une pièce de théâtre lui-même. Dans une récente interview à Paris Match, il mettait en cause sa santé fragile et soulignait : « mettre en scène une pièce de théâtre, c’est beaucoup plus épuisant que de réaliser un film ».
Internationalement reconnu mais incroyablement modeste. De Cannes à Venise, de Berlin à Hollywood, les films d’Alain Resnais ont régulièrement été auréolés de distinctions internationales.
Très tôt, en 1950, pour son court-métrageVan Gogh, il a rejoint le club très fermé des Français ayant décroché un Oscar. La France ne l’a jamais boudé : trois fois lauréat du Prix Louis-Delluc, Alain Resnais aura été nommé huit fois au César du meilleur réalisateur !
Tous ceux qui l’on côtoyé le disent : ce palmarès impressionnant n’a jamais entamé la modestie d’Alain Resnais. Interrogé par Paris Matchsur le regard qu’il portait sur ses films, il avait répondu sans indulgence : « tous me font mal. (…) Je n’en accepte que des passages, des moments ».
Un « sérieux » à l’âme de « gamin farceur » . Si son œuvre a gagné en légèreté vers la fin de sa vie, le début de la filmographie d’Alain Resnais est marqué par des films austères comme le documentaire Nuit et brouillard sur la déportation ou Hiroshima mon amour sur fond de Seconde Guerre mondiale.
Cette réputation de sérieux, Alain Resnais s’en défendait : « pendant mes tournages, ce n’est pas la messe, on s’amuse beaucoup », assurait celui que Fanny Ardant traitait de “gamin farceur”. Le titre de son tout dernier film Aimer, boire et chanter qui sortira le 26 mars prochain s’annonce comme un beau pied de nez.
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