Des peines de 18 mois et 3 ans, avec sursis, ont été prononcées à l’encontre de deux propriétaires de chiens, reconnus coupables d’homicide involontaire dans l’affaire de l’attaque mortelle d’une octogénaire à Pirae. Les molosses, connus dans le quartier pour leur agressivité, n’étaient pas attachés et leur jardin n’était pas clôturé correctement. Trois de leurs complices, tous de la même famille ont été condamné a des peines allant de 1 an avec sursis à 4 mois avec sursis pour avoir tenté de dissimuler des preuves. Un autre a été relaxé.
Indica, Fox, Auhei, et Lili : quatre chiens, de type croisé pitbull, tous aujourd’hui euthanasiés, auxquels il faut ajouter un « bâtard blanc » non identifié. La meute avait provoqué l’émoi debut juin 2020, en s’acharnant sur une octogénaire qui effectuait sa marche quotidienne sur le stade de l’AS JT, à Pirae. Il avait fallu l’intervention de riverains en voiture pour disperser les animaux, certains pesant plus de 35 kilos.
Plus de quatre ans après cette attaque sanglante, six membres d’une même famille font face aux juges du tribunal correctionnel. De l’autre côté de la salle, les proches de la victime font bloc. Ils veulent obtenir justice pour leur mère ou leur grand-mère, victime « de la pire façon de mourir peut-être, après l’écartèlement et le bûcher », dixit leur avocat Me Hellec. Dépecée, scalpée, certains organes exsangues… la victime de cette attaque insoutenable n’avait même pas pu être identifiée par sa propre fille. « Elle a été dévorée », martèle le conseil.
Certains des chiens étaient connus pour leur agressivité
Parmi les six prévenus, arrivés en retard à l’audience, trois comparaissent en qualité de propriétaires des chiens. Le patriarche d’abord et sa belle-fille, détenteurs de deux chiens chacun. Le fils aîné ensuite, maître du cinquième. Les trois autres, la mère de famille, son frère, et le fils cadet, sont, eux, suspectés d’avoir tenté de dissimuler l’implication d’un des molosses, en l’évacuant discrètement du domicile familial, proche du stade, peu après les faits, et en le lavant à la javel. Tous demandent pardon aux parties civiles. Ils évoquent des chiens « gentils », pourtant connus dans tout le quartier pour errer en meute et terroriser les passants et sportifs. Des animaux qu’ils ne prenaient pas la peine d’attacher, les laissant divaguer dans leur cour, malgré des failles évidentes dans leur clôture. « On savait qu’ils sortaient, mais pas aussi loin », plaide le père de famille. Son fils concède être au courant de morsures antérieures de l’un d’eux.
« Une famille de menteurs »
Si le père et sa belle-fille reconnaissent les faits, leurs animaux ayant été confondu par l’ADN de la victime, le fils aîné conteste l’implication du sien, appelé Biggy, dont le nom est revenu à de multiples reprises au cour des débats. La famille livre une version commune, expliquant que l’animal en question a été confondu avec un autre, qu’il n’a d’ailleurs pas été mis en cause par les mutoi arrivés en premier sur les lieux. Quant à son exfiltration en vitesse vers la presqu’île et son nettoyage approfondi, ils le justifient par la crainte de se voir retirer le chien. « Nous sommes face à une famille de menteurs », vitupère la procureur. « Nous avons l’impression que les décisions de justice ne servent à rien », poursuit-elle, évoquant la condamnation de deux propriétaires de chiens, deux mois avant les faits, dans une autre affaire à Raiatea. Et si les faits sont qualifiés d’homicide involontaire, « ne pas clôturer son jardin l’est, tout comme ne pas attacher les chiens, qu’ils ont laissé divagué en meute, après avoir été prévenus à de multiples reprises ». Elle requiert des peines de 4 ans dont deux avec sursis pour le père de famille et son fils aîné et d’un an ferme pour l’oncle ayant aidé au transport de Biggy, tous trois étant en récidive légale, car déjà condamnés dans des affaires de stupéfiants. Et demande du sursis pour les trois autres prévenus.
Déception pour les parties civiles
Des arguments et des réquisitions qui n’ont pas fait mouche auprès des juges. Seul le père et sa belle-fille, propriétaires des quatre chiens identifiés par ADN, sont reconnus coupables d’homicide involontaire. Ils écopent de 3 ans avec sursis probatoire pour le premier, et de 18 mois avec sursis simple pour la seconde. En revanche, le fils, propriétaire de Biggy est relaxé, le tribunal n’ayant pu déterminer l’implication du chien dans l’attaque. Il est condamné à un an de prison avec sursis probatoire pour sa participation au nettoyage de l’animal. Dans ce volet de l’affaire, le jeune frère et la mère prennent respectivement 1 an et 4 mois de sursis simple. De son côté, l’oncle est relaxé. « Le quantum des peines nous déçoit un peu, il ne faut pas oublier qu’une grand-mère a été dévorée », reconnaît Me Hellec à la sortie de l’audience. « C’est ridicule », souffle une membre de la famille.
Le dossier va désormais être renvoyé au civil, pour examiner les demandes indemnitaires de la famille de la victime. Une procédure qui devra attendre mars 2025. Rien qui ne puisse toutefois apaiser la peine de la famille. « Ils nous ont volé notre maman », s’était émue la fille de la victime lors de la suspension de la mi journée.