Ce mercredi, le Polynesian Kingdom of Atooi était convoqué au tribunal administratif suite à une requête en référé, déposée par le Pays, qui demande leur expulsion du site du marae Arahurahu, que les sujets du PKOA occupent depuis plus d’un mois. De son côté le PKOA, par la voix du chef Miko, estime avoir apporté les preuves que les terres sur lesquelles se situe le marae sont leur propriété. La décision du juge des référés sera rendue vendredi.
Baptême du feu, ce mercredi matin, pour le président du tribunal administratif, Pascal Devillers, fraîchement arrivé de Nancy. Et une première épreuve réussie, car tout au long des débats entre le Pays et le chef Miko, il est resté imperturbable. Si sur le fond, l’enjeu et les échanges étaient de teneur sérieuse, la forme prenait parfois de drôle de tournure. Comme par exemple quand le chef Miko bondissait de sa chaise pour réfuter un argument et entamait une sorte de orero en tournant sur lui-même afin que le public puisse en profiter, ou lorsque pour dévoiler ses tatouages reflétant sa généalogie, il déboutonne sa chemise et soulève son t-shirt. Bref de quoi perturber n’importe quel nouveau venu sur le territoire, mais pas Pascal Devillers.
Concernant les arguments âprement défendus par les deux parties, le PKOA et le Pays, l’un pour justifier sa légitimité à occuper le marae Arahurahu, et l’autre pour justifier la demande d’expulsion, c’était un peu un dialogue de sourds. Le Pays s’en remettant à la justice française et le PKOA à la justice divine, « nous sommes là pour la justice divine, celle du Seigneur, et non celle du Pays. »
« Nous sommes le peuple ma’ohi avec l’État français, nous ne sommes pas contre la France. »
D’un côté le Pays se réfère à des textes de loi, et au code de l’urbanisme, précisant que le marae « se trouve sur le domaine public et que cette parcelle a été acquise en 1976 par l’Opati (ancienne appellation de Tahiti-Tourisme, ndlr) », et de l’autre le PKOA affirme que « en tant que représentant de notre souverain royal, gravement discriminé, nous sommes dans nos droits » en remettant au juge un document retraçant sa généalogie et les titres de propriété. « Vous souhaitez une suspension d’audience pour étudier ces documents ? » demande le juge à la représentante du Pays. « Ce ne sera pas nécessaire » assure-t-elle, camouflant difficilement un petit sourire derrière son masque.
« On est là pour remettre en place le droit », affirme le chef Miko, qui poursuit : « on a rétabli notre droit à l’auto-détermination. Nous sommes le peuple ma’ohi avec l’État français, nous ne sommes pas contre la France » et pour prouver ce qu’il avance, il produit une esquisse du drapeau du PKOA dans lequel est inclus le drapeau français. Symbole de relations apaisées et de rapprochement entre deux peuples que tout éloigne, sauf leur amour immodéré pour la contestation.
Pour montrer que ce n’est pas qu’un symbole, mais aussi une profession de foi, le chef Miko précise, à l’intention de ceux qui en doutaient encore, « nous sommes un peuple accueillant, bienvenue chez nous M. le président du tribunal. » Quant à la restitution « de nos terres, de nos espaces maritimes, de notre espace céleste », le chef Miko, invoquant un traité d’amitié et de commerce passé en 1857 entre Napoléon III et le Roi Kamehameha IV de Hawaii, assure que « notre roi (NDLR : Ali’i Nui Aleka Aipoalani) est prêt à rencontrer votre président Emmanuel Macron (…). On ne va pas discuter avec le Pays, c’est un pays sous tutelle. »
Si les représentants du Pays ont eu du mal à cacher tantôt leur consternation, tantôt leur amusement, ils ont tenu à réitérer leur demande, « le site du marae Arahurahu se trouve sur un domaine public, ils n’ont aucun titre. Ce débat n’a pas sa place ici, mais devant le tribunal foncier. Il est nécessaire que vous prononciez cette mesure d’expulsion pour rendre le site aux usagers. »
L’ordonnance sera rendue vendredi. Mais à en croire le Chef Miko, peu importe la décision, expulsion ou pas, ils ne quitteront pas les lieux.