Des habitants de Mangareva ont lancé une pétition pour dénoncer l’accès internet médiocre dont souffre l’archipel. Connexion ralentie et coupures récurrentes… De l’éducation au tourisme en passant par l’administration, c’est le développement des Gambier qui serait en jeu. Onati « se met en ordre de bataille » pour mener des travaux de mise à jour du réseau. Mais explique ne pas pouvoir faire de miracles pour cette île qui n’est pas sur le trajet d’un câble… Pour l’instant.
« Inadmissible », « lamentable ». C’est le sentiment largement partagé, à Mangareva, sur le connexion internet de l’île. Le problème n’est pas neuf mais le ras-le-bol s’est accentué, ces dernières années, à mesure que le haut-débit a progressé partout ailleurs. Après Honotua aux Raromatai, le câble Natitua s’est étendu, à partir de 2018, jusqu’aux Marquises et tout au long des Tuamotu, de Rangiroa à Hao. Les Gambier, situés plus de 800 kilomètres plus loin, n’ont jamais été sur le tracé, alors que la partie Sud du même câble promet de s’étendre, au premier semestre 2023, jusqu’à Rurutu et Tubuai. « On ne demande qu’à avoir la même connexion que les autres », résume Danny Paheo, conseiller municipal, qui a lancé la semaine dernière, « en tant que Mangarévien et au nom de tous » une pétition qui rassemble déjà plusieurs centaines de signatures.
Même tarif, mais sans le service
Elle est adressée avant tout à Onati, accusée de ne pas prendre conscience de la « gravité » du problème. « On a 150 Ko/s pour 1 Mo/s payés par mois », reprend le pétitionnaire. Et encore quand il y a du débit : les coupures de plusieurs heures – voire de plus d’une journée – sont fréquentes, et « dans les districts, à Kirimiro ou Taku, ils n’ont pas du tout de connexion ou pas plus d’une heure par jour ». « Et le pire c’est qu’on ne nous explique même pas pourquoi » reprend Danny Paheo. Comme le tavana Vai Gooding, il estime que c’est le développement de l’archipel qui est en jeu : « je suis enseignant au collège, l’internet, on en a besoin pour les visioconférences ou les supports pédagogiques, pour les élèves pour les concours… On a pas vraiment cette opportunité, explique-t-il. Je parle aussi pour les associations, les magasins, même pour la commune… On a pas un débit assez puissant pour pouvoir accéder au monde virtuel ».
La pétition pointe que la filiale de l’OPT pourrait commencer par proposer des offres commerciales aux habitants « lésés » de Rikitea. Mais elle insiste surtout sur la nécessité de changement sur le réseau. « Ça n’est pas la première fois qu’on le demande », rappelle Danny Paeho. Une première pétition, portée vers Tahiti entre 2016 et 2017 n’avait fait l’objet « d’aucun retour ».
Onati « fait le maximum » mais…
Du côté d’Onati, on ne nie pas le problème qu’on connait même « très bien ». Mangareva fait partie de ces îles qui dépendent uniquement de l’onéreuse transmission satellitaire pour se connecter au reste du monde. Les capacités de ce réseau « Polysat » avaient bien été revues à la hausse, en 2021, pour faire face à la grogne des atolls non reliés par Natitua. « Mais ça ne suffit pas », note Winiki Sage, en charge du déploiement de réseau chez Onati. Car le problème se trouve aussi sur l’île : un réseau cuivre vieillissant, des équipement à moderniser… Bref c’est « toute l’architecture du réseau » qu’il faut repenser. Pas question de promettre des miracles : « Dans ces îles là, qui sont en satellite, on ne pourra pas donner du 10 ou du 20 Méga à tout le monde, ça n’est pas possible explique le responsable. Techniquement, si tout le monde se connecte on doit tomber à 1 ou 2 Mo/s. Mais c’est pas normal qu’ils soient en dessous de 1 Mo, mes équipes sont déjà en train de regarder ». Mais les équipes – comme les « ressources » – sont justement limitées : beaucoup d’efforts sont actuellement déployés aux Australes pour préparer l’arrivée du câble, et les chantiers aussi éloignés qu’Hao, très chronophages, sont difficiles à organiser. « Il y a des équipements à remplacer, et on va essayer de le faire l’année prochaine », concède le porte-parole d’Onati, qui assure que la filiale de l’OPT « fait le maximum ».
Le câble Chili – Tahiti, espoir lointain
Une mission déjà planifiée avec la mairie, doit permettre d’améliorer le réseau GSM, lui aussi problématique. Et au passage de « revoir l’architecture » du réseau internet. Pour les grands travaux, il faudra prendre son mal en patience. Le tavana des Gambier, Vai Gooding, se dit optimiste sur l’action de l’opérateur avec qui il échange « fréquemment » sur le sujet. Bien sûr, pour lui comme pour d’autres, être relié par un câble serait la panacée. Mais « câbler toutes les îles, c’est au delà de nos capacités, donner la même chose pour tout le monde, ça reviendra beaucoup trop cher » résume Winiki Sage. Reste tout de même un espoir : le câble Chili – Tahiti qui devrait, s’il voit le jour, atterrir à Mangareva. Le projet a connu des hauts et des bas, et le changement de président à Santiago il y a quelques mois fait craindre au maire un nouveau virage sur le sujet :
Le câble Chili – Tahiti n’est toutefois pas abandonné, le groupe Bw Digital étant toujours en charge des études prospectives sur le sujet. « On attend mais ça sera pas tout de suite » résume Danny Paheo. D’ici là les Gambier ne demandent qu’une chose : ne pas resté « abandonnés ».