ACTUS LOCALESÉCONOMIE Be-Bunk, des comptes 100% numériques made in Pacifique Charlie Réné 2023-07-17 17 Juil 2023 Charlie Réné Lancée il y a tout juste un an depuis la Nouvelle-Calédonie, la société Be-Bunk compterait déjà, sur ses 17 000 titulaires de comptes en ligne, 1 200 Polynésiens. Et l’agent de paiement, avec son appli et désormais un bureau à Tahiti, semble décidé à en convaincre davantage, malgré la concurrence locale. Pour ça, ses dirigeants mettent en avant la simplicité du service – une inscription rapide, un RIB gratuit, un forfait pour une carte Visa et une appli pour tout gérer – et ciblent en particulier les « exclus » du système bancaire. Les bureaux ont ouvert début juillet, dans une relative discrétion, à l’angle de la rue Cardella et de la rue Leboucher, près du marché de Papeete. La Banque de Tahiti a une agence de l’autre côté de l’immeuble, les bureaux de la BP sont juste au coin de la rue. Mais pour Be-Bunk, pas besoin de portes sécurisées ou de guichets sous verre : cet « agent de paiement » n’est pas, contrairement à ses voisins, un organisme bancaire, n’accorde pas de crédit, pas de découvert, ne fournit pas de chéquiers et n’encaisse même pas les billets. Son crédo : l’ouverture de compte et les transferts en ligne, les « virements instantanés », les cartes Visa envoyées par la poste… Bref le « 100% digital ». Une appli, un Rib, une carte Alors pourquoi ce petit bureau à Papeete et ces deux conseillères recrutées localement ? Pour répondre aux questions, aider ceux qui ont « un peu de mal avec la transition numérique », peut-être aussi pour rassurer tous les autres, quel que soit leur profil. « Nous, on ne te demande pas si tu as un CDI, des revenus, des économies, quelle est ta situation, tout ça… Si tu as 18 ans et une carte d’identité valide, c’est parti », explique Aurélie Abitbol, responsable du support clientèle. L’établissement, qui s’appuie sur la plateforme de services bancaires numérique du groupe BPCE, XPollens, est tout de même tenu de vérifier l’identité de ses clients. Mais là encore pas besoin de contact physique : un selfie et un « face scan » suffisent. Le leitmotiv, c’est la simplicité : « Be-Bunk, c’est une application mobile, un RIB français sur lequel tu peux être payé ou recevoir des transferts, des remboursements CPS ou des allocations, et des forfaits pour une carte de paiement Visa, reprend la responsable. On est les premiers dans le Pacifique à proposer ça ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2023/07/BE-BUNK-1.wav Car Be-Bunk, créé par la Calédonienne Leila Somita, a dès ses premiers pas ouvert ses services à la Polynésie et Wallis-et-Futuna. C’était en juillet 2022. Un an plus tard, le « premier compte en ligne du Pacifique » a trouvé pas moins de 17 000 clients, principalement sur le Caillou, où la société a fait en sorte de se faire connaître, et à Wallis, où face à l’offre bancaire très limitée, le service a été « très bien accueilli ». Quelques Océaniens habitants en Métropole auraient aussi souscrit, l’appli permettant de jongler entre le franc Pacifique et l’euro. Quant au fenua, la société n’y recensait fin juin « que » 1 200 clients. Mais elle ne compte pas en rester là. Malgré la concurrence (voir plus bas), « on sait qu’ici aussi il y a un besoin », appuie Leila Somita. La fondatrice et présidente de Be-Bunk, Leila Somita (au centre), la responsable du service clientèle Aurélie Abitbol (à droite) et une partie de l’équipe de l’entreprise. Pour les « laissés-pour-compte » du système bancaire Ce besoin, l’entrepreneuse l’avait identifié dans le secteur du nickel, où elle a longtemps travaillé en Nouvelle-Calédonie : beaucoup de travailleurs n’avaient pas de compte en banque, et recevaient leur rémunération au travers de magasins locaux, qui prenaient au passage une commission. Et d’après Aurélie Abitbol, la « problématique est la même », au fenua : « Il y a beaucoup trop de gens qui n’ont pas accès au compte en banque, même s’ils travaillent. La cible, c’est avant tout les intérimaires, les petits pêcheurs, petits agriculteurs… Des gens qui n’ont pas de RIB, de compte pour poser leur salaire et l’utiliser facilement… C’est d’abord pour eux qu’on a créé Be-Bunk ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2023/07/BE-BUNK-2-Pourquoi.wav Pour eux, mais pas seulement : beaucoup des clients de la jeune société ont déjà un compte en banque, mais se servent de Be-Bunk pour gérer leurs dépenses courantes. « Tu suis en temps réel tes paiements, ton solde, tu ne peux utiliser que l’argent que tu as, et quand tu fais des opérations, tu sais exactement ce que ça va te coûter », continue la responsable clientèle. La création du compte est, en soi, gratuite, et Be-Bunk se rémunère sur ses deux forfaits de cartes Visa, basique ou « Première ». Une offre qui pourrait s’étoffer à l’avenir : la société travaille actuellement sur des « comptes pro », qui pourraient être offerts aux petites entreprises ou aux associations d’ici le début 2024. NiuPay, Marara Paiements… La concurrence locale déjà en place Be-Bunk n’est pas le seul sur le marché des « comptes sans banque ». Il y a bien sûr les acteurs nationaux et internationaux – dont notamment Revolut, qui a convaincu certains Polynésiens, surtout parmi les voyageurs -, mais leur service est souvent limité voir impossible dans la zone XPF. Il y a aussi Marara Paiements, filiale de l’OPT qui repris ses quelques 60 000 comptes CCP, et « établissement de paiement » agréé, qui, comme Be-Bunk peut gérer des comptes mais ne peut pas proposer de crédits ou de chéquiers. Marara dispose d’un site web, d’un service de paiement dématérialisé développé avec OCS (FenuaPay) mais pas d’application pour gérer ses comptes, et semble porter ses efforts sur le développement de services en agences Fare Rata (assurance, gestion de patrimoine…). Mais le concurrent local le plus évident de Be-Bunk, c’est bien sûr NiuPay, société « 100% polynésienne » et plusieurs fois primée, dont les services de comptes en ligne ont été lancés en septembre dernier. Avec ses 8 700 clients, à grande majorité locaux, la start-up est en plein développement et propose elle aussi des créations de comptes rapides, en moins de 48 heures. À la différence de Be-Bunk, cet « établissement de paiement à part entière » – et pas seulement agent d’une plateforme internationale – ne génère pas, pour l’instant, de RIB personnalisé. Les dépôts et paiements sont faits sur le compte de la société qui gère elle-même la division entre les portefeuilles virtuels des clients. Une solution qui permet – en indiquant un identifiant lors du virement – de recevoir un salaire et de payer un employé, mais qui ne permet pas, par exemple, d’encaisser les remboursements CPS ou de mettre en place un prélèvement automatique. Niu Pay met en revanche en avant ses équipes locales et ses services de proximité, nécessaires selon ses dirigeants pour avancer vers l’inclusion financière : les clients peuvent, dans son agence de Papeete, et bientôt de Taravao, déposer des espèces, ce qui est impossible chez Be-Bunk. Quand la société calédonienne a un partenariat exclusif avec Visa, l’établissement polynésien travaille avec Mastercard et a développé au fenua un réseau de commerçants acceptant son système de paiement sans carte. Côté tarif, chacun met en avant ses offres et atouts : à vous de juger sur les sites de Be-Bunk et de NiuPay. 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