Chargée de travailler sur une unité de production électrique au gaz, EDT-Engie avait proposé plusieurs localisations. Papeete et Faratea ayant été écartées par le Pays, c’est vers Papenoo que les études vont être dirigées. « Rien n’est fait », mais les autorités semblent plus que jamais convaincues de l’intérêt de cette nouvelle centrale.
Le projet est sur la table depuis longtemps, et il avait été confirmé à l’occasion du plan de relance « Cap 2025 » en septembre dernier. En plein effort de développement des énergies renouvelables, le Pays cherche aussi à diversifier le parc thermique de Tahiti. Aux côtés du gazole de la centrale de la Punaruu, qui a fini sa conversion en début d’année, et à celui de la centrale de Vairaatoa, qui a commencé un long processus de démantèlement, les autorités voudraient ajouter une production au gaz. Vu les difficultés pour créer un réseau de gaz naturel, c’est la piste du propane qui est évoquée. Un autre combustible d’origine fossile, donc, mais qui suit des cours différents de ceux du gazole ou du fioul, et dont les promoteurs insistent sur les émissions « limitées » de gaz polluants. Surtout, la production d’une centrale à gaz présente l’avantage d’être ajustable très rapidement. Un gain de réactivité qui permettrait de compenser un soudain pic – ou une chute – de production solaire ou hydroélectrique. Du côté du gouvernement, aucun doute : le gaz est « nécessaire » pour le développement des énergies renouvelables.
Études de faisabilité en cours
Reste à développer le projet. Tout n’est pas à faire puisque EDT-Engie avait déjà mené des études sur l’intérêt économique ou environnemental d’une telle production ainsi que sur les possibilités d’approvisionnement. Le Pays a lui-même lancé deux études sur le potentiel d’une centrale électrique au gaz. La première montrerait que l’approvisionnement d’une centrale est possible, pour un coût qui ne remet pas en cause les équilibres actuels du réseau électrique tahitien. La seconde, toujours en cours, est une étude plus poussée sur la « faisabilité technico-économique » du projet, un temps estimé à « 1,5 à 2,5 milliards de francs ». Elle devra permettre de choisir des orientations technologiques et de dimensionnement. Pas question de lancer « une nouvelle Punaruu », qui produit 60% de l’électricité de Tahiti. Mais l’unité de production doit tout de même permettre « de soulager certains groupes » de la centrale Émile Martin. Certains parlaient l’année dernière de 50 à 100 GWh de production annuelle, pour une consommation totale d’un peu plus de 500 GWh à Tahiti en 2019.
Un terrain repéré à Papenoo
En attendant les rapports d’experts, c’est sur un site potentiel que planche EDT. La filiale d’Engie – un groupe né de la fusion de Suez et de Gaz de France – avait posé trois options sur la table, la première était celle d’une centrale à Papeete. Une installation à Motu Uta était un temps vue d’un bon œil par les autorités en ce qu’elle présentait l’avantage d’être tout près du lieu de déchargement et de stockage actuel du gaz à Tahiti. La solution a finalement été écartée par le Pays, qui préfère voir ce nouvel instrument de production électrique s’éloigner des centres urbains. L’option d’une installation à Faratea, où les autorités veulent développer une technopole aquacole, n’a pas non plus été jugée opportune. Le Pays a donc demandé à EDT d’orienter ses prospections sur la troisième option sur la table, celle de Papenoo. Pas si loin des grands centres de consommation d’électricité, pas si proche, en revanche, des centres de stockage actuels… Rien n’est définitivement arrêté, ni sur le lieu, ni sur l’approvisionnement en gaz, qui devrait représenter un défi logistique et un intérêt concurrentiel. Le Pays garde quoiqu’il arrive la main sur le dossier et pourrait d’ailleurs procéder, à l’avenir, par « appel à projets ». D’après nos informations, les techniciens d’EDT ont tout de même visité un terrain situé entre l’embouchure de la Papenoo et Nivee. À la mairie de Hitiaa O te ra on dit avoir entendu parler du projet, mais ne pas avoir encore été officiellement consulté. « Ca nous intéresse, mais on attend d’en savoir plus », explique le tavana Henri Flohr, qui parle « d’opportunités de développement », en terme d’emplois et de fiscalité. Cette nouvelle centrale, si elle était validée techniquement et politiquement, prendrait encore 2 à 3 ans pour sortir de terre.
Un appel à projet pour 30 MWc de fermes solaires
Rachat des parts d’EDT dans la Tep, médiations de la CRE sur la concession de Tahiti-Nord… Lors de sa conférence de presse de mercredi, Yvonnick Raffin a évoqué plusieurs projets en rapport avec son portefeuille de l’énergie. Et a notamment annoncé que des appels à projets sur des fermes photovoltaïques avec batterie allaient être lancés « d’ici la semaine prochaine ». Les projets sélectionnés devraient atteindre une puissance cumulée de 30MWc (mégawatt-crète). Soit, dans des conditions d’ensoleillement parfaites, « l’équivalent de deux groupes électrogènes de la Punaruu », explique le ministre, qui attend « le premier kilowattheure sur le réseau pour début 2023 ». Alors que le solaire ne représente que 5,8% de la production électrique en Polynésie, principalement grâce à des installations sur les toits, plusieurs groupes et promoteurs ont fait connaitre leur volonté d’investir dans des fermes de plus grande ampleur. Des projet qui ont été mis en suspens par le Pays le temps de créer un cadre règlementaire et de s’assurer que le réseau pouvait techniquement supporter ces moyens de productions très variables. Les nouvelles fermes, financés par le privé, et amortis sur la revente de l’électricité produite, devraient permettre d’enfin avancer vers les objectifs du plan de transition énergétique, qui vise 75% de renouvelable dans la production électrique en 2030, contre 28,8% aujourd’hui (35,9% à Tahiti). 30MWc de fermes solaires avec batterie pourraient représenter jusqu’à 7 points de renouvelable supplémentaires à Tahiti. |