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Cinq questions sur la campagne de vaccination au fenua


La campagne de vaccination contre le Covid-19 doit commencer dans les jours à venir en Polynésie. Si aucun calendrier précis n’a pour l’instant été avancé, les autorités ont précisé les contours de leur stratégie. Une chose est sûre : la campagne, gratuite et non-obligatoire, va s’étaler sur de longs mois.

  • Vacciner, pour quoi faire ?

Depuis le début de la pandémie de Covid-19, le vaccin est présenté comme une porte de sortie de la crise. Les personnes vaccinées sont protégées – au moins pour quelques mois – d’un développement de la maladie, particulièrement dans ses formes graves. Comme le précise le Dr Pierrick Adam, médecin responsable des programmes de pathologie infectieuse à la direction de la Santé, il ne s’agit pas, dans un premier temps de retrouver une « vie normale » ou de se passer des masques, de la distanciation et des gestes barrières dans l’espace public. L’objectif est avant tout de faire baisser la mortalité due à l’épidémie, qui a déjà tué 121 Polynésiens. Il s’agit aussi de « protéger le système de soins » en ralentissant le rythme des hospitalisations et des réanimations qui mobilisent une bonne partie des équipes et moyens du CHPF depuis plusieurs mois. Au plus long terme, c’est le « fonctionnement du pays » qui sera préservé, avec l’éloignement de la menace d’un reconfinement. Ce n’est qu’après la réussite de ces premiers objectifs que pourra être envisagée une extinction de l’épidémie et donc une réelle sortie de crise.

  • Quel(s) vaccin(s) ?

La Polynésie a été intégrée à la commande de vaccin française, elle-même issue des commandes européennes. À l’heure actuelle, seul le vaccin développé conjointement par le groupe américain Pfizer et les laboratoires BioNtech a reçu une autorisation de mise sur le marché en UE et en France. Vu l’importance des commandes mondiales, les livraisons se font au fil de l’eau. « Chaque territoire reçoit des dotations au prorata de sa population », explique Pierrick Adam. La Polynésie doit donc recevoir « régulièrement » des lots. Le premier – 14 600 doses, soit un peu plus de 7000 personnes vaccinées – doit arriver dès ce jeudi soir d’après le Haut-commissariat. Mais une fois les médicaments sur le territoire, « plusieurs jours » de logistique sont à prévoir avant les premières injections, d’après le spécialiste, qui ne précise donc pas de date de lancement de la campagne. D’après la direction de la Santé, d’autres dotations devraient arriver au fenua « avant l’écoulement du premier lot », permettant une campagne de vaccination « en continu » dans les mois à venir. Mais là encore, pas de calendrier précis. À noter que d’autres candidats vaccins sont en phase de tests ou d’analyses par les autorités sanitaires nationales et européennes (notamment ceux développés par les laboratoires Moderna et par le consortium Université d’Oxford / AstraZeneca) et ont été précommandés à l’échelle nationale. Ils pourraient donc compléter les prochaines livraisons au fenua.

  • Qui pourra se faire vacciner ?

Comme tous les pays du monde, la Polynésie n’a pas les moyens de vacciner toute sa population d’un seul coup. L’idée est donc de proposer le vaccin en priorité aux personnes les plus à risques, et celles qui sont les plus exposées. Quatre phases de vaccination gratuite et sur la base du volontariat ont ainsi été déterminées par la direction de la Santé. À Tahiti et Moorea, îles visées en priorité pour des raisons épidémiologiques et logistique, la « première phase » doit concerner, d’ici la mi-janvier, les personnes âgées de 75 ans et plus (environ 5000 personnes), le personnels des établissements de santé et les soignants libéraux. La première dotation de vaccins devrait suffire pour terminer cette première phase. La « phase 2 », qui sera lancée lorsque la demande faiblira, concernera les personnes de 60 à 74 ans, le personnel des établissements médico-sociaux et certaines « professions essentielles au fonctionnement du Pays » (pompiers, forces de l’ordre, secteurs stratégiques de l’administration…). Suivront, en phase 3, les 18-59 ans titulaires d’un carnet rouge et donc considérées comme fragile dans cette épidémie. Ce n’est qu’à la quatrième phase, qui ne devrait pas être lancée avant « plusieurs mois » que tous la vaccination sera ouverte à tous les adultes.

La vaccination dans les îles se heurte à la nécessité pour le vaccin Pfizer/BioNtech d’être conservé à des températures très basses. Le matériel de congélation ne manque pas à Tahiti et Moorea, le transport est un défi important. La direction de la Santé a donc prévu un « effort logistique conséquent » en phase 1 pour vacciner les personnels de l’hôpital de Nuku Hiva et de Raiatea. Mais le reste du public des archipels, y compris les personnes âgées et fragiles, devront attendre les autorisations de mise sur le marché et la livraison au fenua d’autres vaccins, notamment ceux de Moderna et AstraZeneca.

  • Où et comment se passe la vaccination ?

Personne ne recevra de convocation individuelle pour la vaccination. La direction de la Santé annoncera publiquement l’ouverture de chaque phase de la campagne, en invitant les personnes concernées à se présenter dans un centre dédié. Ces centres, qui devraient ouvrir « progressivement » aux îles du Vent (quatre à Tahiti, et un à Moorea) mais leur localisation, de même que leur date d’ouverture, n’ont pour le moment pas été précisées. On sait seulement que ces centres seront ouverts de 13 heures à 17 heures, 5 jours sur 7. Sur place, chaque patient passera par une « consultation pré-vaccinale » avec un médecin, qui doit permettre d’identifier les principales contre-indications à la vaccination, et vérifier l’éligibilité du patient. Le patient sera aussi informé sur la nature de la vaccination, sur les potentiels effets indésirables, temporaires et propres à toutes les vaccinations. « On s’assurera donc qu’il y a un consentement éclairé à cette vaccination », explique le Dr Pierrick Adam. Cette consultation et la prescription du vaccin à laquelle elle aboutit peut aussi se faire lors d’une consultation d’un médecin traitant. L’injection elle-même ne prend que quelques secondes et est suivi d’une prise de rendez-vous pour la seconde injection, qui doit se passer 21 jours plus tard. Si la première dose offre déjà une protection, ce n’est que 7 jours après cette seconde injection que l’efficacité maximale du vaccin (95% pour le Pfizer/BioNTech) est réputée être atteinte.

  • C’est pour quand ? 

La direction de la Santé reste pour l’instant très floue sur le calendrier de cette campagne. D’après les spécialistes, s’engager sur des dates ou sur un rythme de vaccination serait « prématuré ». D’autant que personne, en l’absence d’étude d’opinion en Polynésie, ne peut prédire avec certitude la proportion de Polynésiens qui souhaiteront se faire vacciner. Au vu des taux de vaccination pour les autres maladies, et de la « conscience communautaire des Polynésiens » la direction de la Santé se veut optimiste, même si la France fait aujourd’hui partie des pays les plus frileux en la matière.

Pas non plus de réponse de la direction de la Santé sur le rythme de vaccination envisagé, très dépendant des livraisons et de la demande.  Seule certitude, la campagne durera longtemps : « On part sur une campagne de vaccination d’un an », explique Pierrick Adam.

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