Paris (AFP) – L’avenir du groupe propriétaire des marques William Saurin, Garbit et Madrange, est menacé après la découverte de comptes truqués, mais les pouvoirs publics promettent mercredi de tout faire pour sauver ses 3.200 emplois.
Le décès le 30 novembre de Monique Piffaut, propriétaire et actionnaire unique de Financière Turenne Lafayette, a été le déclencheur de la révélation du maquillage des comptes depuis plusieurs années de ce groupe inconnu du grand public qui détient aussi les jambons Madrange et Le Foué de Paul Prédault.
Nommé début décembre président du groupe en remplacement de Mme Piffaut, Eric le Gouvello, spécialiste de conseil en stratégie, avait diligenté un audit sur sa situation économique et financière.
« Les premières constatations laissent apparaître une présentation trompeuse des comptes depuis plusieurs années, dans un contexte très dégradé pour la filière agroalimentaire en général et pour certaines filiales du groupe en particulier », a indiqué la société dans un communiqué.
« Il semblerait que ces tromperies n’avaient pour but que de maintenir le financement du groupe », assure une porte-parole, en précisant que l’audit n’est pas encore terminé.
– La justice saisie –
Ces révélations sont un coup de tonnerre pour les salariés des 21 sites industriels français du groupe, qui visait un chiffre d’affaires de 900 millions d’euros en 2016. L’Etat a rapidement annoncé qu’il allait tout faire pour éviter son démantèlement.
La justice a été « saisie du dossier pour mener les investigations nécessaires et déterminer les responsabilités et les causes de ces pratiques », a annoncé Bercy.
L’Etat prendra « ses responsabilités pour accompagner la nouvelle direction et les salariés » face à cette situation, « qui représente un risque pour la pérennité du groupe et afin de s’assurer de pouvoir préserver les 3.000 emplois directs et les 1.500 emplois intérimaires et prestataires ».
« Des réunions avec les clients, les fournisseurs et les banques seront organisées à brève échéance. Une rencontre avec les organisations syndicales sera également organisée dans les prochains jours », dit encore le ministère de l’Economie.
La direction de l’entreprise affirme aussi qu’elle se mobilise « pour rechercher les voies et moyens d’assurer la poursuite des activités et conserver les emplois des entreprises du groupe », selon son communiqué.
« Plusieurs pistes sont envisagées, parmi lesquelles la recherche de nouveaux moyens de financement, y compris au travers de l’ouverture du capital », assurent les dirigeants.
Après le décès de Mme Piffaut fin novembre, un porte-parole du groupe avait déclaré à l’AFP: « il n’y a pas de risque de démantèlement car la propriétaire, très attachée aux entreprises, avait exprimé sa volonté ».
Malgré ces assurances, le syndicat Fnaf-CGT avait dit craindre un démantèlement. « L’intégrité du groupe doit être sauvegardée », avait-il réclamé en avertissant que « le dépeçage par les vautours de la profession serait inacceptable et signifierait de nouvelles purges » pour les salariés.
De son côté, la défunte propriétaire a légué sa fortune à une fondation pour l’enfance « en cours de constitution », selon une source proche du dossier. En 2013, sa fortune personnelle avait été estimée à 380 millions d’euros, selon le magazine Challenges, ce qui la plaçait au 135e rang en France.
Le groupe agroalimentaire s’est constitué à partir de 1991 avec le rachat de l’entreprise « Les délices du palais » dans le Périgord, puis par croissance externe dans le secteur des salaisons, foie gras et plats cuisinés en régions, devenant un acteur important de ce secteur de l’agro-alimentaire.
Se sont ensuite jointes les charcuteries, dont beaucoup sont vendues sous marque de distributeurs dans la grande distribution.
William Saurin a été racheté en 2001 et Madrange en 2011. Un des derniers rachats, en 2015, portait sur deux sites bretons de charcuterie cuite de Jean Caby.
© AFP ERIC PIERMONT
Les produits de la Financière Turenne Lafayette présentés à son siège parisien le 14 décembre 2016