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Concession de Tahiti-Faa’a : « Nous ne voulons pas risquer une nouvelle annulation »


Le calendrier d’attribution de la concession de l’aéroport devrait encore s’étirer de quelques mois, à cause d’un débat juridique entre le Haut-commissariat et le Pays. C’est ce qu’a expliqué ce mardi sur Radio1 Éric Spitz qui, pour éviter de rééditer le fiasco du dernier appel d’offres, veut s’en remettre au Conseil d’État. Un délai supplémentaire qui n’empêchera pas ADT de mener des travaux importants sur la plateforme avant la réattribution de la concession. Le haut-commissaire explique au passage « comprendre » l’indignation des compagnies face à la hausse de tarifs de l’actuel gestionnaire.

À quand un gestionnaire stable – et un grand chantier de modernisation – pour l’aéroport de Tahiti-Faa’a ? La question est sur la table depuis plus d’une décennie. Après l’annulation de l’attribution de 2010 à Egis, et le long fiasco de l’appel à candidature de 2019, les espoirs des usagers et des professionnels de la plateforme reposent sur la relance d’une procédure de sélection par l’État. Et les nouvelles étaient plutôt encourageantes du côté de Paris, où on a annoncé, en fin d’année dernière, que le nouveau cahier des charges, retravaillé en y intégrant les demandes du Pays notamment en matière environnementale et climatique, était désormais prêt. C’est ce qu’a confirmé Éric Spitz sur le plateau de Radio1 ce mardi. Mais le haut-commissaire a douché les espoirs de ceux qui espéraient un lancement de l’appel d’offres dans les semaines à venir.

« Nous ne voulons pas risquer une nouvelle annulation »

Car avant de lancer la procédure, le Pays doit réaffirmer, par un texte officiel, sa volonté d’être présent dans le capital de la future société gestionnaire. Comme c’est aujourd’hui le cas avec Egis, la Polynésie devrait détenir 49% des parts de cette structure, qui remplacera ADT au pilotage de l’aéroport. Or, il existerait aujourd’hui une « différence d’interprétation entre les juristes de l’État et du Pays » sur la question du moyen juridique de cette réaffirmation. Éric Spitz a demandé à Moetai Brotherson de s’en remettre au Conseil d’État sur cette question. « Les juristes du Pays considèrent qu’il suffisait d’un arrêté en conseil des ministres et nos juristes considèrent qu’il fallait une délibération à l’assemblée territoriale, détaille le haut-commissaire. Nous ne voulons pas risquer dans un an, dans deux ans, d’avoir une nouvelle annulation, parce qu’il y a un vice de forme dès le départ. Donc on va demander au Conseil d’État de nous dire le droit, parce que maintenant on veut sécuriser toutes les étapes de l’appel d’offres. »

Être « minutieux », attentif au détail après tant d’échecs juridiques de l’État dans ce dossier. Voilà l’idée, « quitte à repousser le calendrier », qui n’est donc pas précisé à ce stade. On sait seulement qu’entre le lancement de l’appel d’offres, qui pourrait donc attendre encore plusieurs mois, et l’arrivée effective d’un gestionnaire pérenne aux commandes de Tahiti – Faa’a, il pourrait s’écouler jusqu’à deux ans.

Rhabillement de façade, rénovation de terminal et bretelle d’accès pour les militaires

D’ici là, assure le haut-commissaire la plateforme évoluera, malgré la fragilité de la position d’ADT. « Nous avons obtenu d’Egis, d’investir sur l’aéroport tout en sachant que s’il ne remportait pas l’appel d’offres, il serait remboursé des amortissements qu’il leur resterait à faire sur ces investissements », précise-t-il.

Ces investissements, déjà évoqués par ADT sont de trois ordres : le « rhabillement de la façade côté passagers » pour soigner l’image de l’aérogare « avant les JO », la rénovation du terminal et de l’accueil des vols domestiques… Et surtout la création d’une bretelle d’accès de la base aérienne militaire vers la piste pour « libérer de l’espace » et des places de stationnement pour les ATR locaux, de plus en plus à l’étroit avec le développement de la concurrence. Cette bretelle, discutée avec la DGAC et l’armée depuis deux ans, ouvrira d’ailleurs la porte à un rénovation plus large de la partie militaire de la plateforme de Faa’a. Le contre-amiral Geoffroy d’Andigné annonçait récemment que d’importants travaux seraient lancés au GAM « dès la fin 2024 » dans l’optique d’accueillir les remplaçants de la flotte de Gardian : des Falcon 50M à partir de la fin de l’année, puis des Falcon 2000 Albatros, nouveaux modèles spécialement créés pour les besoins de l’aéronavale, à l’horizon 2030.

Hausses de tarifs d’ADT : Éric Spitz « comprend » la colère des compagnies

Le fait qu’ADT et son actionnaire majoritaire, Egis, aient obtenu une assurance de l’État d’être remboursés de leurs investissements en cas de changement de gestionnaire a de quoi soulever des questions. Car ce sont bien ces investissements, chiffrés à 1,9 milliard de francs, qui ont justifié l’annonce, fin janvier, d’une hausse sensible des redevances aéroportuaires, qui n’avaient pas évolué depuis 2016. Cette augmentation, qui atteint 9% sur certains tarifs, arrive pourtant dans un contexte de résultats déjà confortables d’ADT du fait de l’activité aérienne soutenue, et devrait peser sur les comptes déjà fragiles des compagnies, voire sur le prix des billets. Aussi, plusieurs acteurs de la plateforme ont dénoncé cette nouvelle politique tarifaire avalisée par le Pays, lui aussi actionnaire d’ADT à hauteur de 49%. « Les directeurs généraux de compagnies aériennes, suite à cette augmentation ont manifesté leur mécontentement, rappelle Éric Spitz. Tout ce que je peux dire c’est que je les comprends. » L’État, actionnaire minoritaire d’Egis au travers de la Caisse des dépôts, ne semble pourtant pas en capacité à faire fléchir la position du gestionnaire. « On mettra sans doute des clauses de sauvegarde dans la prochaine concession, on pourra toujours tirer des leçons de cette gestion d’Egis depuis 2009 », précise tout de même le haut-commissaire.

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