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Disparition de Jeanine Sylvain, le charme de Tahiti incarné

Jeanine Sylvain, figure emblématique du fenua au parcours exceptionnel, s’est éteinte paisiblement chez elle, ce mardi 2 janvier, à l’âge de 100 ans. Elle emporte avec elle une partie de l’histoire de Tahiti, dont elle a contribué à façonner la légende en incarnant, dans l’objectif de son mari, la vahine éternelle. C’était aussi une courageuse femme d’affaires, et la matriarche d’une nombreuse famille, grâce à qui nous retraçons son exceptionnel parcours. La veillée est prévue demain soir à partir de 18 heures à son domicile de Punaauia.

Qui à Tahiti pourrait aujourd’hui raconter : « J’ai rencontré Johnny Halliday, Jean-Paul Belmondo, Brigitte Bardot, Tino Rossi, Ursula Andress, Martine Carol, Henri Salvador, Jacques Martin, Joe Dassin, Jean Sablon, Danielle Evenou, Curd Jürgens, Marie-Christine Barrault, Roger Vadim, Marlon Brando, Jacques Chirac… et Charles De Gaulle » ?

Jeanine Sylvain avec le général de Gaulle, 1958. ©Sylvain

La belle Jeanine Tehani Sylvain, premier modèle tahitien du photographe et cinéaste Sylvain Adolphe, devenue son épouse et sa conseillère artistique, a ainsi fréquenté de nombreuses personnalités internationales, non seulement du « showbiz », mais aussi des affaires ou du monde politique. C’est elle qui passa au cou du général de Gaulle, lors de sa visite à Tahiti en 1958, une couronne de fleurs  sous l’œil et l’objectif de son mari. Sylvain, en tant que correspondant de grands magazines internationaux tels que Paris-Match et Life, immortalisait le passage à Tahiti de tout personnage célèbre, ou autre événement d’importance, tels que l’arrivée du Kon Tiki qui s’était échoué sur l’atoll de Raroia, aux Tuamotu, ou l’atterrissage à Tahiti-Faa’a du premier avion de ligne, un DC7C de la compagnie TAI.

Jeanine Sylvain a connu plusieurs vies professionnelles. Sylvain, arrivé à Tahiti en 1946 après avoir participé à la libération de Paris dans un char de la fameuse Division Leclerc, succombe à son charme. « Tchoun », comme la surnommaient ses collègues de l’école d’infirmières, a d’abord été infirmière puis sage-femme. Sylvain tombe amoureux fou, pose son sac de reporter des armées, et épouse Jeanine Vidal qui lui donnera cinq enfants : Moea, Vaea, Hina, Teva et Maïma. Elle fait de leur maison une sorte de paradis, épicentre de l’exceptionnel réseau de relations qu’ils tissent au fil des ans.

La famille Sylvain à Pirae, 1954.

Elle est l’indispensable modèle et styliste de Sylvain pour les fameuses photographies immortalisant les plus belles femmes de Tahiti. Mais le couple a des activités variées : repérages photographiques pour les grands projets de l’époque, comme l’aéroport de Tahiti-Faa’a, portraits-souvenirs des élèves officiers de la Marine – qui, devenus amiraux, se pressent chez eux – et tournage de nombreux documentaires, reportages et films promotionnels pour la Polynésie, ainsi que d’un feuilleton multi-diffusé par la télévision française, Teva dans l’opération Gauguin.

Alors que Sylvain cesse son activité, en 1984, elle prend en main, à l’âge de 60 ans, les revenus de la famille en créant une agence immobilière. Le succès est immédiat, et l’Agence Jeanine Sylvain, aujourd’hui dirigée par sa fille Maïma, est toujours l’une des plus renommées de Polynésie..

Sylvain et Jeanine, 1990.

Lorsque Sylvain disparaît en 1991, Jeanine avait créé dans un bâtiment de leur propriété à Punaauia un petit musée qui retrace l’œuvre de son mari, où les plus belles de ses œuvres sont exposées, avec des tableaux retraçant la vie du photographe et de son épouse, ainsi que des billets de banque et autres timbres illustrés par des reproductions de ses photos. C’est sous sa supervision attentive que le célèbre éditeur d’art Taschen publie, en 2001, le livre Tahiti Sylvain.

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