Déjà sinistrée en 2017, la vallée de Hamuta a été une des plus touchées par les violentes averses de ce lundi matin. Inondations, torrents de boue, bois éparpillé, canalisation coupée et « pont fragilisé »… Le tavana Édouard Fritch dénonce « l’incivilité » de ceux qui coupent des arbres sans les évacuer. Et suggère qu’après le passage de la dépression Nat, pendant laquelle les pluies ont été moins fortes que prévues par Météo France, la sécurité n’a pas été suffisamment remobilisée.
Le long de la Hamuta, à Pirae, « on a cru revivre 2017 ». Fin janvier, cette année, là, plus de 400 habitations avaient été inondés pendant la nuit par des pluies violentes et une crue soudaine de la rivière dont les berges sont très habitées. Cette fois, c’était au réveil, aux alentours de 7 heures que la Hamuta est sortie de son lit. « Ça a été très rapide, en une fraction de seconde, l’eau est arrivée, les bois ont bouché les évacuations, et on ne voyait plus du tout la route », décrit Mira, riveraine du magasin Hamuta, pourtant situé à plus de 150 mètres du lit. Heureusement, la crue a été plus brève qu’il y a sept ans : une heure après avoir envahi les rues et certaines maisons, l’eau retrouvait son lit, laissant un triste spectacle le long de la vallée, aux abords de la mairie et jusqu’à l’avenue Pomare.
Plusieurs dizaines d’habitations ont dû sortir les balais et raclettes, après avoir mis leurs meubles en sécurité. De grandes quantités de boue ont dû être évacuées devant certains magasins et entrepôts, mais surtout des tonnes de déchets verts se sont entassés sur la route, les trottoirs et près des ponts. Du bois qui a bouché la rivière par endroit et les évacuations un peu partout provoquant ces inondations. « Ce sont toujours les mêmes causes, peste Édouard Fritch, qui était monté ce matin jusqu’en haut de la vallée pour constater les dégâts. Il y a des arbres abattus qui restent là et on les retrouve dans la rivière, ils déstabilisent les ponts, et les canalisations d’eau. »
Troncs et bois pas nettoyés : des « incivilités des familles »
Au pont de Niuaroa, un tronc de 8 mètres a ainsi transpercé une « canalisation-mère », qui une fois la pluie passée, projetait un jet d’eau à plusieurs mètres de haut au-dessus des habitations du quartier. Pas de doute pour le tavana : « il y a encore un peu d’incivilités de nos familles », qui coupent des arbres sans les évacuer. « Je vous rappelle que nos rivières ont été nettoyées en novembre dernier par la direction de l’Équipement, et nous pensions que les choses allaient bien se passer, mais en fait tout vient de la vallée et c’est énorme, reprend l’élu. Quand on remonte la rue Bambridge, il y a du bois partout, c’est comme s’il y avait eu un cyclone ».
Heureusement, moins de dégâts du côté de la Nahoata, autre vallée à risque de la commune déjà touchée en 2017 et en 2015. Depuis, le bétonnage d’une partie des berges a « changé les choses » selon les habitants qui pointent tout de même des chutes d’arbre dans la rivière qui ont, au plus gros de la crue de ce lundi matin, causé quelques inondations près du cimetière de Pirae. Les équipes de la mairie étaient toujours en intervention dans les deux vallées en début d’après-midi. Et le travail était loin d’être terminé, en attendant de nouvelles précipitations de fin de journée.
« On était un peu démobilisés »
Pourquoi les services communaux ont-ils été pris de court ce lundi ? Ont-ils eu les bonnes informations de la part de Météo France, de la protection civile et du Haut-commissariat ? Le fait est que Tahiti et les îles de la Société étaient restées, ces derniers jours, en « vigilance orange » pour fortes pluies. Mais après le passage de la dépression Nat – et ses prévisions de pluies violentes qui ne se sont pas entièrement concrétisées – Édouard Fritch suggère que beaucoup d’acteurs de la sécurité se sont relâchés. « Je ne veux pas jeter la pierre, mais c’est vrai qu’on était un peu démobilisés puisqu’on avait vécu mercredi, jeudi, vendredi en période soit disant de crise forte, puisque c’était le mot d’ordre qui était donné. Tout le monde est rentré chez soi vendredi, samedi ça s’est bien passé, et c’est au moment où on s’y attend le moins, qu’on a cette grosse intensité… décrit l’ancien président du Pays. Est-ce que c’était prévisible par la météo, est-ce qu’on a pris les moyens pour informer rapidement ? Moi je vous dis que même au niveau de la mairie, nous n’étions pas en mobilisation extrême à cause des fortes pluies ».
À noter qu’un recensement est en cours dans les vallées de Amuta et Nahoata à Pirae pour identifier des familles dont le logement est à risque dans la nuit prochaine. « On va les encourager à se mettre à l’abri au Fare Amuira’a le temps que la situation s’améliore ».