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Embarquement pour un naufrage familial : un grand-père condamné pour agression sexuelle

Un homme comparaissait mardi pour agression sexuelle sur mineur de moins de 15 ans. En l’occurrence, sa petite fille âgée de 13 ans au moment des faits. Il a été condamné à 18 mois de prison avec sursis.

On est en avril 2018, Michel, 68 ans, homme d’affaires retraité, est en vacances en Polynésie avec son épouse où ils sont venus retrouver leur fils, installé à Tahaa depuis un an, leur belle-fille et leurs petites-filles. Pour fêter ces retrouvailles et ces vacances en famille, Michel loue un catamaran et toute la famille prend place à bord à Bora Bora pour voguer dans le lagon.

Une nuit alors que la chaleur devient étouffante dans les cabines Annie*, la petite dernière âgée de 13 ans, décide de rejoindre ses grands-parents qui dorment sur le pont du bateau. Elle se glisse à coté d’eux et s’endort. Au milieu de la nuit, il se met à pleuvoir, et les grands-parents se réveillent. Michel voyant sa petite fille endormie, la prend dans ses bras et la descend dans la cabine. Il la place dans la couchette près du hublot, s’allonge près d’elle et son épouse prend place à son coté.

« Il m’est arrivé un truc dégoûtant et horrible, grand-père m’a touchée », confie le lendemain Annie à sa grande sœur qui s’empresse d’avertir ses parents. Ceux-ci, abasourdis et effondrés, inventent un prétexte pour quitter le catamaran et regagner Bora Bora et s’en vont déposer plainte à la gendarmerie.

Michel est arrêté et entendu en garde à vue. « En dormant, ma main a glissé entre ses jambes et je ne sais pas ce qui s’est passé, je me suis retrouvé à la caresser et elle s’est blottie contre moi et j’ai cru qu’elle était d’accord, alors j’ai continué. » Michel dans un premier temps est placé en détention provisoire puis sous contrôle judiciaire en métropole. À son casier judiciaire, aucune condamnation.

Un examen gynécologique effectué sur la jeune fille fera état d’aucune trace de pénétration digitale. À l’inverse, les attouchements auront laissé de profondes traces psychologiques. « Elle est traumatisée et elle se sent coupable de l’éclatement de sa famille » indique le rapport du psychologue. Et cela prend des proportions plus inquiétantes puisqu’elle va jusqu’à avoir des crises où elle va taper sur son père « lui reprochant sa ressemblance physique avec son grand-père ».

« Sur le sexe, monsieur, sur le sexe, sinon vous ne seriez pas là »

À la barre, Michel se tient droit, limite rigide. Si dans son attitude il donne l’impression d’être le genre de personne qui va droit au but, il y a des mots qu’il a du mal à prononcer. Sexe fait partie de ceux-là. « J’ai mis ma main où il ne fallait pas.» « Où cela ? » lui demande la juge. « À l’entrejambe » « Où ? » « Sur le bas-ventre » « Sur le sexe, monsieur, sur le sexe, sinon vous ne seriez pas là », s’énerve la juge. « Lors de votre déposition, vous avez déclaré que la petite avait gémi, qu’elle se frottait, et que cela vous avait encouragé à poursuivre. Comment pouvez-vous penser qu’une petite fille de 13 ans prenne du plaisir à se faire toucher par son grand-père ? »

« Maintenant je suis convaincu de ma culpabilité »

Michel déglutit et son regard se voile, « je me cherchais des excuses, je ne comprenais pas comment j’en était arrivé là et j’ai dit n’importe quoi. Je voulais me protéger, mais c’était une erreur. J’étais sur une autre planète. Maintenant je suis convaincu de ma culpabilité, je n’ai jamais eu d’attirance pour les enfants, je suis déstabilisé… » Suivi depuis par un psychologue, celui-ci indique que Michel « n’accepte pas sa part d’ombre » et qu’il aurait agi « sous l’influence d’une pulsion sexuelle. »

Alors que la juge l’interroge pour qu’enfin il donne une explication à ses actes, Michel n’arrive pas à les expliquer, et c’est son avocate venue de métropole avec lui, qui le bouscule. « Cela fait plus d’un an que vous êtes suivi par un psy, et vous n’arrivez toujours pas à fournir une explication ? Y’a encore du boulot visiblement » s’exclame-t-elle, provoquant des regards d’étonnement de la part de la juge et de ses assesseurs. « Je n’ai pas d’explication, rien, aucune, je n’étais même pas excité », balbutie le sexagénaire, « c’est une catastrophe, je suis prêt à faire le maximum pour qu’elle comprenne qu’elle n’est pas responsable des faits. C’est moi l’unique responsable. »

« C’est un embarquement pour un naufrage familial »

S’il n’a pas d’explications, l’avocat des parties civiles, Me Antz, en a pour lui. « Il est attiré par la jeunesse, il a un gros problème et il faut qu’il travaille dessus. C’est un papi quelque peu tactile. »  Et d’évoquer les tapes sur les fesses qu’il prodiguait à ses petites-filles, gestes qui à l’époque semblaient anodins, mais qui à la lecture des derniers évènements prennent une autre tournure. « On ne sait pas ce qui anime cet homme, mais ce qu’il a fait a désagrégé sa famille. (…) La petite souffre énormément aujourd’hui, elle a fait de nombreuses tentatives de suicide et ses parents ne peuvent plus la laisser seule, on l’emmène au collège, on la récupère… La famille a dû quitter la Polynésie faute d’établissement et de structure où elle peut être suivie. »

 « C’est un embarquement pour un naufrage familial », résume le procureur en une phrase, « les actes de l’accusé ne sont pas le fruit du hasard, ce sont des actes intentionnels (…) nous sommes sur des agressions sexuelles à caractère incestueux. » Il réclame à l’encontre de l’accusé une peine de 18 mois de prison avec sursis avec obligation de soins et son inscription au fichier national des délinquants sexuels. Des réquisitions que le tribunal validera.

*Prénom d’emprunt

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