Le Conseil économique, social, environnemental et culturel (Cesec) a étudié ce matin un projet de loi du Pays qui vient donner un peu plus de corps au code de l’énergie. Le texte fixe notamment un cadre au développement du photovoltaïque avec stockage. Mais comme le relèvent les conseillers, beaucoup d’éléments manquent encore pour atteindre les objectifs de transition énergétique du Pays, d’ores et déjà jugés « irréalistes ».
Un an après l’adoption des « principes généraux de la politique énergétique » et des règles d’organisation du secteur, les titres I et II du code de l’énergie, c’est au tour des titres III et IV d’avancer vers l’assemblée. Ils concernent les règles de production, de transport et de distribution de l’électricité. Un texte très technique pour des enjeux déjà affirmés : clarifier et moderniser le fonctionnement du secteur pour avancer vers un « changement de modèle énergétique », prévu par le plan de transition 2015-2030. Le projet de loi de Pays compile, pour l’essentiel des dispositions déjà existantes mais éparpillées, et vient repréciser le champ des délégations de service public que le Pays peut mettre en place. Un sujet qui fait visiblement toujours débat et sur lequel le Cesec a interpellé le législateur.
Solaire : les porteurs de projet dans l’attente
Mais les conseillers se sont surtout attardés sur les dispositions relatives au développement des énergies renouvelables. L’hydroélectricité est certes une valeur sûre à Tahiti, mais c’est surtout du côté du photovoltaïque que la Polynésie peut espérer gagner du terrain sur les combustibles fossiles. À condition de mettre en place des fermes solaires avec batteries pour stocker l’énergie. Et ainsi surmonter en partie le principal défaut du solaire : le caractère fatal et intermittent de son énergie. Le projet de loi ouvre justement la voie à des appels d’offres spécifiques à ce genre d’équipements. Comme le rappelle Vincent Fabre, rapporteur de l’avis du Cesec, de nombreux porteurs de projets – y compris EDT-Engie – sont dans l’attente de ce cadre. Et des décrets d’application qui viendront préciser les tarifs d’achat de l’électricité solaire avec stockage.
Le développement du renouvelable n’est pas un sujet neuf en Polynésie, et, malgré une communication importante du Pays ces dernières années, les chiffres de la dépendance aux hydrocarbures n’ont que très peu bougé. Certes, la transition est plus complexe qu’il paraît : il ne s’agit pas seulement d’installer des panneaux solaires, ou même des Swac supplémentaires et des centrales marémotrices, comme l’évoquent avec insistance certains conseillers. Mais bien de réussir à intégrer ces sources de production au réseau électrique de chaque île, sans remettre en cause leur stabilité et leur fiabilité. S’ajoute la question – que l’on sait très sensible – du coût de l’électricité.
Des marches plus petites pour monter plus vite
Reste que le Cesec ne cache pas sa frustration : « dans la mise en œuvre effective du code de l’énergie, le paramètre temps est aujourd’hui fondamental », écrit le conseil, qui appelle à une « volonté politique forte, tant à l’endroit des futurs acteurs qu’à l’endroit de l’opérateur historique ». En clair : travaillez avec tout le monde, et vite. L’institution revient aussi sur le cap fixé par le schéma de transition énergétique. Alors que l’objectif de « 50% d’énergies renouvelables dans la production électrique à 2020 » n’a pas été atteint (29,2% aux dernières nouvelles), celui de 75% à l’horizon 2030 est désormais qualifié « d’irréaliste ». Les conseillers veulent presser le pas ? Pour Vincent Fabre, il s’agit surtout de demander au gouvernement de fixer des objectifs « plus progressifs, plus atteignables ». Pour avancer pas à pas.
Chantier important de la mandature d’Édouard Fritch, la modernisation du cadre réglementaire de l’énergie polynésienne est loin d’être finalisée. Deux titres du code, traitant notamment des questions tarifaires, manquent toujours à l’appel, les règles de péréquation se font toujours attendre, et certaines organisations prévues par les textes précédents paraissent encore difficile à mettre en place. Comme « l’attribution des prérogatives élargies à la TEP », théoriquement en vigueur le 1er janvier 2022. Les doutes s’accumulent sur cette prise de commande du réseau. Et le Cesec répète qu’elle ne doit se faire que « sous réserve de la capacité de cette dernière à assurer ses missions sans impact préjudiciable sur la qualité et sur les tarifs de l’électricité ».