VIGILANCE – Moins de 5 % des signalements de maltraitance infantile proviennent du secteur médical. La Haute autorité de santé (HAS) veut donc mieux sensibiliser les professionnels de santé.
Les signalements de maltraitance infantile émanant du corps médical sont « très faibles ». La Haute autorité de santé (HAS) entend y remédier en sensibilisant les médecins et en mettant à leur dispositions un mémo qui a été dévoilé lundi.
« La #maltraitance est malheureusement fréquente, le médecin doit y penser en consultation » C. Grouchka, membre du Collège de la @HAS_sante
— Haute Autorité Santé (@HAS_sante) 17 Novembre 2014
Un enfant sur 10 maltraité ? 10% des enfants vivant dans les pays « à haut niveau de revenus », comme la France, sont probablement victimes de maltraitance, selon une étude publiée par la revue britannique The Lancet. Par ailleurs, selon laHaute autorité de santé (HAS) française, environ 200 nourrissons seraient victimes du syndrome de bébé secoué chaque année en France.
Très peu de signalements de la part du corps médical. La maltraitance commence souvent aux premiers âges de la vie, à un moment où l’enfant rencontre régulièrement des professionnels de santé pour son suivi de la croissance, ses vaccins… La part du signalement de maltraitance infantile en provenance du secteur médical est pourtant qualifiée de « très faible » par laHaute autorité de santé (HAS). D’après l’Ordre des médecins, en effet, seuls 2 à 5% des signalements émanent du corps médical.
Comment expliquer cette « sous-déclaration » de la part des médecins ? D’après laHaute autorité de santé (HAS), cela s’explique par plusieurs blocages : le manque de formation des médecins mais aussi les freins psychologiques, la crainte d’un signalement abusif, le manque de confiance dans les services sociaux ou encore l’absence de retour en cas de signalement.
« Les peurs de signaler un cas de #maltraitance sont réelles. Mais j’ai fait médecine pour prendre mes responsabilités » Dr Céline Raphaël
— Haute Autorité Santé (@HAS_sante) 17 Novembre 2014
Par ailleurs, si, en vertu du Code pénal, le médecin a l’obligation, comme n’importe quel citoyen, de porter assistance à une personne en danger, il pense souvent, à tort, que le secret médical prévaut. « Signaler n’est pas juger, c’est un acte médical », souligne la HAS.
Un mode d’emploi pour les professionnels. Pour sensibiliser les médecins, la HAS a mis au point une fiche mémo qui va être relayée auprès des professionnels de santé. Plusieurs points y sont mis en avant : lors d’une consultation, par exemple, la possibilité d’une maltraitance doit toujours être à l’esprit du médecin. « La maltraitance est fréquente dans toutes les classes sociales, il faut y penser », rappelle ainsi la fiche. Le mémo de la HAS insiste aussi sur la question du doute : « le médecin n’a pas à être certain de la maltraitance, ni à en apporter la preuve, pour alerter ».
La question de l’urgence décisive pour la conduite à tenir. En dehors des situations d’urgence, le médecin peut prendre conseil auprès du Conseil national de l’ordre des médecins ou au 119 (Allo enfance maltraitée). Les situations non urgentes relèvent de la compétence du Conseil général et doivent faire l’objet d’une « information préoccupante » (IP) transmise à une cellule de recueil, d’évaluation et de traitement des informations préoccupantes (CRIP).
En cas d’urgence, en revanche, et même s’il y a seulement suspicion de maltraitance, c’est le procureur de la République, via le tribunal de grande instance (TGI), qui doit être alerté tandis que l’enfant doit être hospitalisé. Mais la HAS met en garde : « le médecin n’est pas enquêteur, son rôle se limite au repérage et au choix approprié des interlocuteurs suivants ».
Ce qui doit alerter. Plusieurs indicespeuvent mettre la puce à l’oreille du médecin : des bleus alors que l’enfant ne marche pas encore, une perte de poids brutale, un comportement craintif de l’enfant… L’attitude des parents doit aussi être évaluée comme d’éventuels changements de versions pour expliquer certaines lésions.
Chez les bébés, il faut savoir que la prématurité est un des principaux facteurs de risque de la maltraitance : « il est plus difficile de s’attacher à un enfant qui est dans une couveuse avec des tuyaux partout, un enfant dont on est ‘déçu’ parce qu’il ne correspond pas aux attentes que l’on avait. On espérait un beau bébé à terme à terme, grassouillet et jovial et on a un enfant tout maigre », précise Anne Tursz, pédiatre, pour expliquer les difficultés d’attachement et la bascule vers la maltraitance.