ACTUS LOCALESÉCONOMIEENVIRONNEMENT Épaves : 14 déjà sorties de l’eau, 5 en cours de retrait, 50 autres à gérer Charlie Réné 2024-05-29 29 Mai 2024 Charlie Réné Le ministre des Grands Travaux Jordy Chan a fait un point d’étape ce matin sur l’effort de retrait des épaves des lagons et ports du fenua. Si une petite vingtaine de bateaux ont pu être sorties de l’eau ou sont sur le point de l’être, il reste encore des procédures à mener, souvent longues, pour une cinquantaine d’autres. Dans le même temps, le Pays, le port autonome et la DPAM cherchent à mieux organiser les mouillages et mieux suivre les navires de passage pour limiter l’apparition de nouvelles épaves. 15 000 kilomètres carrés de lagon, et quelques dizaines d’épaves qui gisent au fond. En tout début de la mandature, le gouvernement avait annoncé un effort important de « nettoyage » et donc de retrait de ces vieux bateaux, pas tous coulés, mais au moins abandonnés et inutilisables. Le ministre des Grands Travaux Jordy Chan, notamment en charge des transports maritimes, en a fait un point d’étape chiffré ce matin. Ainsi, depuis un an, 14 épaves ont été sorties des eaux sous la responsabilité du Port autonome ou de la DPAM, dans la Société ou aux Tuamotu. Cinq autres ont fait l’objet de procédures désormais complètes, dont trois à Moorea, et doivent être « retirés après appels à concurrence ». Parmi les derniers chantiers, celui du Tamarii Tuamotu, qui était échoué sur le récif de Takaroa depuis 1998. Le cargo de 65 mètres a été démantelé pendant plusieurs semaines. Côté Tahiti, le port a fait retirer d’un des docks flottants qui font face aux dépôts de carburant l’Oiseau des îles tracté jusqu’à un chantier de l’autre côté de Motu Uta, et, lui aussi, démantelé. Du temps et de l’argent Des opérations qui interviennent généralement après de très longues procédures administratives ou judiciaires. Rechercher les propriétaires, tenter de les contacter, dresser les contraventions de grandes voiries, mettre en demeure, laisser passer les délais qui dépendent de l’urgence, lancer des procédures judiciaires, les marchés publics d’enlèvement et de démantèlement, obtenir des déchéance de propriété… « Cela demande de vrais efforts, beaucoup de temps », confirme-t-on tant à la DPAM qu’au Port autonome. Et des efforts, il en faudra pour finir le travail, puisqu’environ 50 épaves habitent encore les ports et lagons du fenua. C’est aussi le nombre de procédures contentieuses et précontentieuses engagées à l’heure actuelle. « L’idée est toujours d’obliger les propriétaires des navires à les retirer, ou à défaut pour leur faire supporter le coût de ces opérations, explique Jordy Chan. Certains sont de bonne foi et entrent en action pendant la procédure, pour d’autres il faut vraiment aller au contentieux. Il y a des épaves pour lesquelles on ne peut pas retrouver le propriétaire tout simplement parce qu’elles sont très anciennes. Le Tamarii Tuamotu, par exemple, est un bateau qui date des années 60 et le propriétaire était introuvable, il a donc fallu mettre la main à la poche. Mais ça reste une exception ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/05/EPAVE-1-Jordy-PLateforme-.wav Sur un an, les opérations d’enlèvement et de démantèlement ont coûté environ 120 millions de francs, répartis entre le Pays, l’État au travers du fonds d’intervention maritime sollicité par la DPAM, ou les propriétaires refacturés. Les épaves existantes – une cinquantaine, donc – continueront à coûter, même si une bonne partie de cet argent est réinjecté dans l’économie, auprès de prestataires locaux de plus en plus nombreux à proposer leurs services sur des missions de démantèlement. Organisation des mouillages et téléservice Escales L’idée reste tout de même de limiter, à l’avenir, l’apparition de ces épaves. « Une bonne partie du problème c’est le manque d’organisation et de gestion de nos lagons, reprend Jordy Chan. C’est pour cela que nous avons mieux cadré les zones de mouillages, par exemple à Taiarapu Ouest, et c’est un travail qui continue aux Marquises ou aux Tuamotu, avec l’idée d’obliger les plaisanciers à mouiller dans ces zones pendant leur séjour. Et parallèlement également nous déployons le téléservice Escales qui devrait être obligatoire pour les plaisanciers d’ici la fin de l’année. » Développé depuis 2022, Escales est un téléservice pour la régulation, l’organisation et la gestion des escales de tous navires en Polynésie française. Il est aujourd’hui testé auprès des bateaux de croisière et doit, si tout va bien, être généralisé à tous les navires de transport de personnes entrant et sortant des eaux du fenua d’ici la fin de l’année. « Si je dois résumer, c’est ‘dis-moi qui tu es, dis-moi où tu vas’, ça veut dire que les bateaux seront identifiés dans la plateforme avant d’arriver en Polynésie et suivis pendant tout leur passage, explique la directrice de la DPAM Catherine Rocheteau. Aujourd’hui on a pas mal de bateaux pour lesquels on a des difficultés d’identification parce que ce sont des bateaux étrangers qui sont arrivés il y a très longtemps. Dans certaines situations, on ne sait pas à qui s’adresser, il faut remonter vers le pays du pavillon pour avoir une identité, c’est vraiment complexe. L’idée, avec Escales, c’est d’avoir une interface où les gens vont être obligés de déposer les papiers du navire, d’avoir une adresse, d’avoir une pièce d’identité… » Bref, avoir une meilleure traçabilité de ces bateaux, pour s’assurer qu’ils ne sont pas abandonnés dans nos eaux. https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/05/EPAVE-2-Cathy-Rocheteau-escale.wav Quelques questions restent en suspens dans cette lutte contre les épaves et les abandons. Que faire des gros bateaux en fin de vie, comme le Taporo VII, coulé à quai en 2022, contre qui l’administration a déjà obtenu une injonction de libérer les lieux, mais dont l’armateur assure n’avoir pas les moyens financiers pour le faire démanteler ? Comment empêcher d’autres incidents comme celui du Corsaire, qui a lui aussi coulé en 2022 après avoir erré de quai en quai pendant une quinzaine d’années ? Les autorités renvoient à chaque fois à la « responsabilité » et à la « bonne gestion » des propriétaires… dont les sociétés sont souvent insolvables au moment de lancer des procédures. Nouvel appel d’offres pour le Corsaire Le port autonome précise tout de même faire un point bimensuel sur les bateaux à quai, et « rester en contact permanent des propriétaires », pour leur rappeler leurs obligations. Quant au Corsaire, après les appels d’offres de renflouement et de démantèlement jugés « infructueux » en début d’année – les offres étaient « trop chères » ou trop risquées environnementalement -, le Port a lancé un nouvel appel le 17 mai. Il s’agit cette fois de dépolluer l’épave de l’ancien bateau du groupe Degage sur site, afin qu’elle soit, par la suite, transportable. « On va faire extraire tous les polluants potentiels qui sont qui sont à l’intérieur, détaille Bran Quinquis, Responsable environnement de l’établissement public qui rappelle que des perquisitions ont été menées sur place par la gendarmerie dans le cadre d’une enquête pour pollution. On sait qu’il reste 14 fûts d’hydrocarbures, on sait qu’ils sont pas percés. Il y a quelques bidons aussi de carburant, semble-t-il, et puis des déchets inertes multiples ». Le prestataire devra aussi vérifier si les cuves sont bien vides, le tout au frais du port… Pour l’instant. « l’idée , c’est de refacturer au propriétaire, insiste le responsable. Et nous continuerons aussi à mener toutes les actions pour que le propriétaire sorte l’épave de la rade de Papeete. Elle gêne des futurs projets d’aménagement et on exige que le propriétaire prenne ses responsabilités. » https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/05/EPAVE-3-bran-Quinquis-Corsair.wav Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)