ACTUS LOCALES Exaspérés par la grève des pompiers, des touristes menacent d’actions coup de poing Charlie Réné 2024-12-10 10 Déc 2024 Charlie Réné Calendrier professionnel bousculé, finances de plus en plus tendues, inquiétudes de santé… Chez les voyageurs bloqués dans les îles depuis maintenant cinq jours, la détresse est de plus en plus audible. La goutte d’eau pourrait être de voir les vols réservés aux scolaires repartir à vide, du fait de l’accord négocié avec les pompiers grévistes. Hors de question, pour des touristes de Fakarava, qui ont menacé d’envahir le tarmac de l’aérodrome demain, et de bloquer l’arrivée des élèves s’ils ne pouvaient pas monter à bord au retour. Le chef des pompiers de la plateforme a en réponse menacé de les accueillir avec la lance à eau. Au cinquième jour de la grève de la fonction publique et des pompiers d’aérodrome, l’impatience et la frustration s’expriment de façon plus en plus vive chez les voyageurs bloqués dans les îles. Elles sont montées d’un cran ce mardi avec l’annonce de vols de rapatriement des élèves d’internat. Ces vols spéciaux, « acceptés » par les grévistes de la Fraap après une demande expresse du Haut-commissariat, vont se multiplier dans les jours à venir, mais à la condition ferme qu’ils n’emportent pas de touristes au retour. « Qu’on ne nous la fasse pas à l’envers » avaient prévenu les responsables du syndicat, conscients que le blocage des archipels était le principal moyen de pression du mouvement. Avant de se féliciter que « tout le monde pourra passer Noël en famille » grâce à ces vols scolaires. « Nous, vous regardez pas si on va voir nos enfants à Noël ! » Tout le monde sauf les voyageurs – étrangers ou résidents polynésiens – bloqués dans les îles et qui alertent depuis vendredi sur leur situation. Obligations professionnelles remises en cause, plans familiaux tombés à l’eau, finances qui se tendent ou s’épuisent avec les pensions à payer – « au plein tarif » – dans l’île et les vols internationaux à décaler ou à racheter… Dans ce contexte, les esprits s’échauffent vite, comme à Fakarava, ce mardi matin, où le ton est monté lors d’une rencontre entre un groupe de touristes bloqués, le tavana Étienne Maro et le chef des pompiers d’aérodrome locaux. « Un des touristes s’est énervé et a dit ‘on va se jeter sur la piste d’atterrissage et je peux vous dire que vos enfants ne vont pas atterrir, raconte Patricia, une participante à la discussion, elle-même bloquée avec cinq de ses proches dont un enfant. Parce que vous nous prenez en otage, vous ne voulez pas que les touristes puissent rentrer chez eux, mais pour pas que la population gueule vous laissez rentrer vos enfants chez vous. Nous, vous regardez pas si on va voir nos enfants à Noël. C’était vraiment tendu. Le pompier a dit que c’était des menaces et qu’il allait sortir le pistolet à eau et les arroser, c’était du grand n’importe quoi ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/12/TOURISTE-FAKARAVA-1.wav Tout le monde ne veut pas passer douze heures en mer Du « n’importe quoi » qui n’est pas complètement résolu puisqu’aux dernières nouvelles, une partie des personnes bloquées à Fakarava a bien l’intention de se rendre à l’aéroport pour se faire entendre demain à l’arrivée de l’ATR d’Air Tahiti, et de ne pas le laisser repartir à vide. D’autres ont trouvé une solution aventureuse : « On était 140 bloqués, mais il y en a qui sont partis à 4 heures du matin cette nuit avec des bébés de 11 mois pour rejoindre Rangiroa, reprend Patricia, qui aurait déjà dû, à cette heure, avoir quitté le fenua et repris son travail à Carcassonne. Ils ont fait douze heures de bateau avec une grosse houle. Ils essaient de reprogrammer d’autres bateaux, mais certains ne veulent pas : ils ont des états de santé qui ne vont pas ou ont très peur de la mer et ne veulent pas partir comme ça ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/12/TOURISTE-FAKA-2.wav Les letchis, oui, les passagers non Mêmes incompréhensions, certes avec un peu moins de tensions, du côté de Rurutu, où les vols cargo d’Air Tahiti – qui ne répondent pas aux mêmes contraintes de sécurité sur la piste – ont pu atterrir et décoller en ce début de semaine pour exporter les précieux letchis vers Tahiti. Les passagers, eux, sont restés à terre. Là aussi des discussions ont eu lieu entre ces touristes bloqués et le maire de la commune. Là aussi, les vols scolaires « qui brûlent du kérozène pour repartir sans personne à bord » interrogent et agacent. Agnès, professionnelle de santé venue de Nouméa pour des vacances au fenua, devait rentrer à Tahiti vendredi, quand a été lancée la grève de la Fraap. Elle a raté son vol retour, en a trouvé un autre, via la Nouvelle-Zélande, ce jeudi, qu’elle risque de rater aussi, et devra alors attendre une semaine de plus et payer d’autres frais de modification, pour monter dans le prochain avion. « En plus, double peine, on paye nos nuits ici et on avait réservé notre séjour depuis vendredi à Papeete dans un autre hôtel avec une location de voiture et tout ça n’est pas remboursé, décrit la visiteuse. Donc on a doubles charges, des frais qui s’ajoutent et on est dans l’attente parce qu’on se dit, s’ils ne nous ramènent pas, comment on part des Australes ? Il n’y a pas de bateau : le Tuhaa Pae fait le tour des îles, il arriverait le 20 à Papeete et il est déjà plein ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2024/12/TOURisTE-2-rurutu.wav Face à ces interrogations et ce mécontentement, les autorités locales sont souvent démunies. Comme les agents îliens d’Air tahiti, désarmés face à des revendications qui ne les concernent pas. 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