ACTUS LOCALESSANTÉ Explosion des cas de Covid, premier décès : la Calédonie risque-t-elle un scénario polynésien ? Charlie Réné 2021-09-09 09 Sep 2021 Charlie Réné ©CR/Radio1 Épargnée par la pandémie pendant 18 mois, la Nouvelle-Calédonie a officialisé son premier décès lié au Covid, cinq jours après la découverte de plusieurs cas locaux. Sur le Caillou, beaucoup craignent de subir une crise de la même ampleur que celle du fenua. La réaction plus rapide des autorités laisse espérer une vague moins violente. Lire aussi : Baisse très progressive des hospitalisations et de la mortalité en Polynésie Lors d’une déclaration à la presse retransmise en direct, le président du gouvernement calédonien Louis Mapou a confirmé le premier décès lié au Covid dans le pays. Il s’agirait d’une « personne âgée », vivant en maison de retraite et décédée au centre hospitalier territorial peu de temps après sa prise en charge. En 18 mois de crise sanitaire, et jusqu’à la semaine dernière, le Caillou, dont les frontières sont restées fermées, n’avait enregistré que 136 cas de Covid, pour la grande majorité détectés en quarantaine, obligatoire depuis mars 2020, ou isolés rapidement. Depuis lundi, ce chiffre a presque doublé. 117 nouveaux cas de Covid, probablement dû au variant Delta, ont été confirmés depuis le 6 septembre, dont 51 pour la seule journée de jeudi. Six personnes contaminées étaient ce matin prises en charge en service de réanimation. « L’heure est à la mobilisation, a déclaré Louis Mapou. Nous faisons face à une crise qui s’annonce dure, je crois sans précédent. Et la seule réponse efficace possible, qui est confirmée scientifiquement et éprouvée à travers le monde, est la vaccination.« Plus de vaccinés, moins de contaminés Un début de vague épidémique rapide qui rappelle tristement ce qu’a connu la Polynésie voilà presque deux mois. En quelques jours, entre le 14 et le 23 juillet, le nombre de cas actifs était passé de 20 à 200 au fenua, et le nombre d’hospitalisations de 0 à 9. Deux semaines plus tard l’hôpital du Taaone accueillait une centaine de patients Covid, puis plus de 400 lors du pic de la fin du mois d’août. En moins de deux mois d’épidémie de variant Delta, aujourd’hui descendante mais toujours d’actualité, 395 Polynésiens sont décédés. Le Caillou va-t-il suivre le même scénario catastrophe ? À Nouméa, où on a suivi de près la crise polynésienne, beaucoup le craignent, même si le contexte local n’est pas le même. D’abord parce que les deux territoires, de population comparables, ne se ressemblent pas en tout point. Sur la géographie – très éclatée au fenua, avec des populations regroupés dans des zones très denses – les infrastructures de santé ou le matériel déjà équipé, Nouméa et Papeete sont confrontés à des défis différents. La couverture vaccinale est en revanche un point de comparaison pertinent. Voire même capital au vu des derniers chiffres du CHPF : 94,3% de non-vaccinés ou de schéma vaccinal incomplet parmi les patients Covid de réanimation. De ce point de vue, la Calédonie entame cette vague avec un léger avantage sur la Polynésie du mois de juillet. Au 8 septembre, 74 056 Calédoniens étaient pleinement vaccinés, soit 27,3% de la population contre 24% en Polynésie en début de circulation du variant Delta. Le taux de vaccination du fenua a fait un bond depuis le début de la saturation de l’hôpital (43,9% au dernier relevé) et la Calédonie devrait suivre la même dynamique, avec un peu d’avance, les centres de vaccination locaux connaissant un afflux massif depuis l’annonce des premiers cas. Cet « avantage » pourrait toutefois être contrebalancé par l’absence quasi-totale de contamination passée sur le Caillou. A contrario, une étude séroprévalence présentée en mars dernier à Papeete estimait qu’un quart de la population des îles du Vent, et donc probablement près de 20% de celle de la Polynésie, avait déjà été infectée par le virus. Ce qui a pu conférer à cette partie de la population une immunité, toute relative en matière de Covid, et de variant en particulier. Confinement beaucoup plus rapide Mais c’est surtout la réaction des autorités publiques qui creuse la différence majeure entre les deux territoires. Début juillet, quand les premiers cas de variant Delta sont repérés au fenua, la Polynésie n’est pas « Covid-free« . Ces derniers sont mêlés à des cas résiduels de souche originelle, laissant penser que la situation pouvait rester sous contrôle. Des appels à la vaccination et des rappels des gestes barrières sont lancés, mais les autorités, en pleine relance touristique et en plein préparatifs de la visite du président Emmanuel Macron, mettent surtout en garde contre l’impact économique et social de restrictions trop brutales. Il faudra attendre le 30 juillet, au lendemain du départ du chef de l’État, pour qu’Édouard Fritch et Dominique Sorain prennent la parole dans une allocution commune, dont les annonces seront limitées à la remise en place les restrictions de rassemblements et d’événements festifs. Une quarantaine de patients Covid sont alors hospitalisés. Nouveau tour de vis « progressif » une semaine plus tard, le 6 août, alors que l’hôpital accueille une centaine de malades. Ils sont près de 200 quatre jours plus tard. Considérant que « l’heure est grave », le haut-commissaire annonce le rétablissement du couvre-feu, et, le lendemain confine Tahiti et Moorea… le dimanche. Après avoir étendu ce confinement au samedi et à d’autres îles une semaine plus tard, le représentant de l’État finira par décréter le confinement total le 20 août. Toujours en « accord avec le Pays » qui se résout dans le même temps à fermer les écoles. Le variant est alors présent au fenua depuis au moins 6 semaines, et les hôpitaux comptent 329 patients covidés. En Nouvelle-Calédonie, la stratégie « zéro Covid » a imposé une réaction beaucoup plus rapide. L’officialisation des premiers cas a immédiatement été suivie de celle d’une fermeture des établissements scolaires et d’un confinement généralisé de 15 jours reconductibles. Le troisième pour le Caillou, qui avait déjà pris des mesures drastiques lors d’introductions du virus en mars 2020 puis 2021. « Depuis que la pandémie de Covid-19 sévit à travers le monde, la Nouvelle-Calédonie est parvenue à endiguer des épidémies à deux reprises, et cela, en prenant des mesures fortes et rapides » appuie ainsi le président Mapou lundi. Face aux spécificités du variant Delta, à des cas très épars et dont l’origine est encore inexpliquée, ce nouveau confinement pourrait, cette fois, ne pas suffire à contenir le virus. Les autorités calédoniennes, qui avaient envoyé des renforts sanitaires à la Polynésie en août, se préparent au pire. Dans un courrier au Premier ministre cité par Les Nouvelles Calédoniennes, trois parlementaires demandent la mobilisation de la réserve sanitaire nationale. Ils y citent un risque d’aggravation de la situation « analogue à ce qu’ont pu connaître récemment la Guadeloupe et la Martinique, et plus près de nous la Polynésie Française ». Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)