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Foncier, nature, culture, étudiants : les multiples casquettes d’Éliane Tevahitua

©CP/Radio1

Eliane Tevahitua, vice-présidente du gouvernement, ministre de la Culture et de l’Environnement, du Foncier et de l’Artisanat, était l’invitée de la rédaction de Radio1 ce mardi. Elle envisage des baux emphytéotiques sur le domaine public du Pays pour permettre aux jeunes ménages de construire, ne ferme pas la porte à l’extension des routes, souhaite sanctionner davantage les pollueurs, créer un nouveau jour férié plus en phase avec la culture traditionnelle, et organiser des assises de l’enseignement supérieur. Le tout en diminuant ses budgets de 10%, comme promis durant la campagne électorale. 

Interrogée sur le foncier, et ce qu’elle souhaite faire dans ce domaine, Éliane Tevahitua – qui a écrit une thèse sur le sujet en 2008 – répond qu’elle veut avant tout « réconcilier les Polynésiens avec leur histoire foncière », et tordre le cou aux nombreuses « légendes urbaines à propos de tout ce qui s’est passé au XIXᵉ siècle et au début du XXᵉ siècle ». Le gouvernement va demander à l’État de lui donner copie de ses archives dans ce domaine, des archives qu’elle souhaite ensuite mettre à disposition du grand public sur Internet.

Indivision : plutôt le « trust » à la néo-zélandaise que la fiducie proposée par Tearii Alpha

La solution, c’est la gestion collective des terres en indivision, dit la ministre du Foncier. Mais au système de fiducie évoqué par l’ancien gouvernement, où la gestion est assurée par une personne extérieure à la famille, Éliane Tevahitua préfère le « trust » pratiqué en Nouvelle -Zélande, où la gestion reste familiale mais prend, au-delà des aspects purement immobiliers, une dimension sociale : « une partie des fonds est réservée par exemple aux personnes âgées, aux enfants pour l’éducation, donc il y a tout un volet social qui est très développé. »

Et pour résorber la crise du logement, Éliane Tevahitua évoque son souhait que le Pays passe des baux emphytéotiques pour permettre aux jeunes ménages de se loger.

Quant aux problèmes fonciers posés par l’extension du réseau routier sur Tahiti, la ministre ne laisse que peu d’espoir à tous ceux qui protestent le moindre nouveau tracé : « C’est une nécessité qui est liée à notre mode de vie. On ne peut pas se passer de route. Il ne faut pas se voiler la face. »

Également en charge de l’Environnement, Éliane Tevahitua souhaite développer un réseau communal de gardes-natures – ils existent dans les textes, au niveau territorial, depuis la fin des années 80 mais il n’en existe qu’un sur le territoire, dit-elle – et faire appliquer les sanctions prévues aux pollueurs, en attendant que la sensibilisation et l’éducation des plus jeunes fassent leur œuvre : « Il est grand temps maintenant de passer aux sanctions, parce qu’il n’y a qu’en touchant au portefeuille que ça fait réfléchir les gens. » Quant à l’impact que 600 000 touristes, l’objectif fixé par Moetai Brotherson, pourraient avoir sur l’environnement, Éliane Tevahitua pense que notre destination ne deviendra pas moins chère, et que les touristes plus aisés sauront se tenir sur ce plan. Enfin, elle se dit favorable à toute initiative visant à créer des zones marines protégées, et espère même qu’à terme, « tout l’espace de la Polynésie soit protégé ».

Côté culture, la ministre ne relancera pas le projet de centre de congrès, prévu au-dessus du futur Village Tahitien puis laissé dans les cartons par l’ancien gouvernement.  en tout cas, « pas dans ce format-là, » dit-elle.  Mais elle reconnaît le besoin de salles de concert, de théâtre, de danse, et veut privilégier des « petits formats ». Quant au Centre culturel de Paofai, qui a subi un important retard, il est à nouveau d’actualité : « Le petit problème foncier est en voie de résolution. Et donc, d’ici peu, ce projet qui a été monté par le précédent gouvernement va continuer. »

Le tiurai en novembre et un nouveau jour férié ?  

Éliane Tevahitua soutient l’idée de faire de matari’i i ni’a (le lever des Pléiades qui amrque le retour de la saison d’abondance, ndr) le cœur des festivités culturelles annuelles, à la place du Tiurai. Un retour à une segmentation de l’année antérieure à la colonisation, dit-elle, avec davantage de végétaux disponibles.

Comme en Nouvelle-Zélande, matari’i i ni’a pourrait devenir un jour férié, «mais ça ne sera pas un jour férié supplémentaire » par égard pour les employeurs. Le 29 juin semble être un bon candidat au remplacement, mais ce pourrait aussi être « une autre date », dit la ministre.

Sur les langues polynésiennes, la première édition du festival Parau Ti’ama le weekend dernier, conçu par Hitihiti Hiro, n’a pas encore trouvé une très large audience, « mais je ne doute pas que dans les années à venir cet événement va connaitre le succès qu’il mérite », dit Eliane Tevahitua. Elle souhaite également réunir toutes les académies linguistiques au sein d’un même bâtiment, et veut que l’Académie tahitienne remette en ligne les dictionnaires anciens qui ont disparu de l’Internet. Quant à la traduction en tahitien du statut de la Polynésie française, elle sera bientôt livrée par le Service de l’interprétariat et de la traduction : « Je souhaite remercier les éminents linguistes qui ont fait un travail de bénédictin, parce que vous avez beaucoup de termes juridiques et ce n’est pas évident. » Autre projet qui lui tient à cœur – elle parle de « quelques centaines d’enfants sourds et malentendants »– l’élaboration d’une langue tahitienne des signes, une mission confiée à Tamatoa Raapoto.

Eliane Tevahitua, qui est aussi en charge de l’enseignement supérieur, veut également serrer la vis aux bénéficiaires des bourses majorées, qui sont supposés compenser l’aide accordée par quelques années de travail au service du Pays. Mais, elle-même boursière durant ses propres études, elle reconnaît « qu’ils ont des difficultés supérieures à celles que nous avons connues », et voudrait organiser des Assises de l’enseignement supérieur.

Des budgets de fonctionnement en baisse volontaire de 10% en 2024

L’Environnement et la Culture sont toujours les parents pauvres des budgets du Pays, et 2024 ne fera pas exception, puisqu’en accord avec le programme du Tavini Éliane Tevahitua prévoit de diminuer leur budget de fonctionnement de 10% l’année prochaine.

 

 

 

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