Radio1 Tahiti

Grève d’ADT : quelques vols, peu d’avancées

Gwenvael Ronsin-Hardy, directeur d’ADT depuis fin 2023.

Au troisième jours de conflit chez ADT, les avions ont pu, après un « redéploiement » de certaines pompiers de Tahiti vers les îles, effectuer des rotations vers Bora, puis Raiatea et enfin Rangiroa dans la soirée. Mais la grève est loin d’être levée : les syndicats, en plus de dénoncer les manœuvres « d’entrave » de la direction, demandent plus que jamais le départ de sa DRH, condition à une reprise du travail. Le directeur de la société refuse de débattre des « personnes » plutôt que de l’organisation. Et les négociations n’avancent pas. 

Bora Bora dans la matinée, Raiatea dans l’après-midi, Rangiroa en soirée… Le ciel polynésien s’est peu à peu débloqué ce mercredi, au troisième jour de la grève du personnel d’ADT. Et pourtant, l’Intersyndicale à l’origine du préavis déposé le 16 juillet, et qui n’a fait l’objet de discussions qu’une semaine plus tard, n’a pas appelé à la reprise du travail. La direction de la société gestionnaire de Tahiti-Faa’a, et des trois plus gros aéroports des îles s’est en fait organisée pour doter ces plateformes en personnel de sécurité. Les fameux pompiers d’aéroport dont l’absence – pour cause de grève, ou, dans quelques cas, de maladie subite qui permette d’éviter les éventuelles réquisitions – empêche tout décollage et atterrissage d’avions de ligne. Du personnel non-gréviste a ainsi été « déployé » peu à peu dans ces aéroports. Par bateau vers les Raromatai ou par petit avion de tourisme vers Rangiroa. Pas besoin de gros porteurs : un pompier actif et un camion opérationnel par piste suffisent pour répondre aux règles de sécurité de « niveau 2 », un mode dégradé avalisé, vu les circonstances, par l’aviation civile.

« Redéploiement » tactique et « entrave au droit de grève »

Chez les syndicats, on dénonce bien entendu la manœuvre. Sur le fond – « ils pensent que ça leur permettra de ne plus discuter, mais le conflit est toujours là » – comme sur la forme. La CSIP, majoritaire chez ADT et notamment chez ses pompiers, a saisi l’Inspection du travail, estimant que toutes les règles – en matière de formation notamment – ne sont pas respectées et que l’action commune des autorités et de la direction d’ADT constituait une entrave au droit de grève. Réclamation « prise en compte », et réponse à venir.

En attendant, le directeur de la société d’exploitation assure que « toutes les règles sont respectées », que « la sécurité des passagers est assurée » et assume le fait de chercher « toutes les solutions » pour faire voler les avions. « Je respecte les pourparlers que nous avons avec les syndicats, mais en parallèle, j’ai des obligations de service public, de faire tourner les aérodromes, et en saison haute touristique, je me dois d’assurer le service à mes clients, compagnies aériennes comme passagers », explique Gwenvael Rosin-Hardy.

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Air Moana a donc pu effectuer une demi-douzaine de vols vers les destinations concernées, Air Tahiti une grosse dizaine, en plus de la desserte des autres îles. Mais le programme de vol de ce jeudi reste très incertain, et d’un côté comme de l’autre on s’inquiète de ne pas voir avancer le fond des revendication. Après une première et unique réunion avec l’intersyndicale mardi, la direction devait revenir avec des « propositions » sur l’évolution des rémunérations. Elle y travaille toujours. Le Pays, lui aussi impliqué dans le conflit, en tant qu’actionnaire à 49% d’ADT et en tant que nouveau propriétaire des aéroports de Bora, Rangiroa et Raiatea, devait aussi « formaliser » et « mettre sur papier » les garanties apportées mardi soir à la présidence sur les conditions de reprises de salariés des îles par le futur gestionnaire. Rien, là non plus, n’est arrivé sur la table des syndicats.

Si la DRH part, « dans l’heure qui suit on reprend le travail »

Mais personne ne l’ignore : le nœud du conflit, c’est ce que le cahier de revendication appelle pudiquement la « gestion RH ». « Défaillances », « manque de respect », « injustices » et « personnel qui souffre depuis plus de 10 ans »… Les mots sont chaque jour un peu plus fort sur la gouvernance des ressources humaines. Et si Cyril Le Gayic a la dent dure contre le nouveau directeur – « une erreur de casting » – c’est bien le départ de sa directrice RH Orlane Diallo qu’il demande. « Il y a eu cinq directeurs avant lui, et tous nous ont bassiné la même chose, ‘laissez-moi le temps’. Mais c’est toujours la même personne à la gouvernance. Et en 13 ans, on a bien vu que rien n’avançait avec elle, explique le secrétaire général adjoint de la CSIP. Ce point là est résolu, dans l’heure qui suit on reprend le travail, et après on discute ».

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Une défiance longuement évoquée mardi en négociations internes, mais aussi face à Moetai Brotherson, dont l’intersyndicale espérait une pression supplémentaire sur la direction. Gwenvael Rosin-Hardy, tient pourtant à recadrer le débat. « Je parle d’organisation, je parle de fonctions et je ne rentre pas dans des débats de personnes, tranche-t-il. Je n’apprécie pas qu’on puisse directement mettre en cause mes salariés et faire ce genre de revendications. Clairement il y a un droit qui s’applique, il s’applique pour tout le monde. Il est hors de question que je puisse entendre ce type de propos ».

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Malheureusement pour les passagers bloqués, difficile de croire que ce point d’affrontement puisse être réglé dans la journée de jeudi.