Mont-de-Marsan (AFP) – Plus un seul canard d’élevage dans les Landes: alors que l’épizootie de grippe aviaire n’est toujours pas stabilisée, le ministre de l’Agriculture a annoncé mardi matin l’abattage des centaines de milliers de palmipèdes que compte encore le département, premier producteur de foie gras en France.
« On a déjà abattu beaucoup de canards sur la partie est du département, on sait qu’il reste une zone sur laquelle on va agir pour abattre l’ensemble des canards pour essayer de stabiliser cette zone », a indiqué Stéphane Le Foll sur la radio France Bleu Gascogne, avant de répondre par l’affirmative lorsqu’on lui demandait s’il faudrait abattre les canards d’élevage encore restants dans le département.
« Il va falloir aller vite dans l’abattage des canards », a ajouté M. Le Foll, rappelant que les autorités sanitaires faisaient « face à un virus avec une propagation d’une virulence jamais vue et des délais d’incubation qui sont extrêmement courts ».
Le ministre espère ainsi faire « action de prophylaxie » (prévenir l’extension de l’épizootie) et « bâtir ensuite une reprise de la production » qui pourrait prendre « plusieurs semaines ».
Arrivé dans l’après-midi à Mont-de-Marsan, Stéphane Le Foll s’entretenait avec des éleveurs, producteurs de foie gras et agents des autorités sanitaires du département, ainsi que des élus. Environ 250 éleveurs, l’attendaient devant la Chambre de commerce et d’industrie pour exprimer leur désarroi.
« Depuis l’année dernière, on nous a supprimé 2.400 canards. On a dû faire 60.000 euros d’investissement en biosécurité. On est dans un nouvelle crise et les indemnisations de l’an passé ne sont pas encore soldées, ça va être terrible! » se désole Benoît Cabanne, 44 ans, éleveur à Mugron, dans le sud du département.
« Il faut limiter les densités de canards et dire stop aux canards qui circulent dans tous les départements », réclame l’éleveur qui travaille en autarcie (du caneton d’un jour jusqu’aux conserves ou produit frais en vente directe). Les industriels « Delpeyrat et Labeyrie, ils pourront toujours délocaliser la production, mais nous, les petits producteurs qui sommes la vitrine des Landes? » s’interroge-t-il.
La FDSEA des Landes, branche locale du principal syndicat agricole FNSEA, s’était dite jeudi favorable à un abattage total des canards avec vide sanitaire pour lutter contre le virus, estimant que les mesures prises jusque là étaient « dans l’impasse ».
Le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef), s’est aussi résigné à l’abattage, mais il s’oppose à un « confinement total » systématique, trop cher pour les petits exploitants qu’il défend.
Seule voix dissonante, celle de la Confédération paysanne, qui réclame une « gestion au plus près des foyers, visant en priorité les élevages dont la contamination est établie et épargnant les élevages autarciques », et surtout la fin de « l’industrialisation de la filière », qui favorise, selon elle, ce type de crise sanitaire.
– Virus « très agressif » –
Les Landes, premier producteur national de foie gras, étaient jusque-là le département le plus touché par l’abattement préventif (171 communes), devant le Gers (154 communes). Au total, 463 communes ont été concernées sur l’ensemble du Sud-Ouest, selon un décompte de l’AFP d’après le J.O.
Mardi, Stéphane Le Foll a indiqué sur BFM TV qu’il n’y avait pas pour l’instant d’autre abattage systématique prévu dans les départements voisins.
Repéré fin novembre sur des oiseaux sauvages, le virus H5N8 se propage depuis dans les élevages de palmipèdes du Sud-Ouest. Au 14 février, 246 foyers infectieux avaient été recensés dans des exploitations agricoles et 28 cas dans la faune sauvage.
Dès le 4 janvier, la France a lancé une politique d’abattage massif et préventif de palmipèdes dans la zone, pour tenter d’enrayer cette épizootie, amenée au départ par les oiseaux migrateurs.
Les professionnels de la filière foie gras avaient déjà évoqué la semaine dernière un virus « très agressif », entraînant une épizootie plus difficile à éradiquer que celle provoquée l’an dernier par une autre souche d’influenza aviaire, le H5N1.
Dans les deux cas, les professionnels du foie gras ont annoncé une facture très lourde: l’influenza aviaire devrait encore coûter cette année 270 millions d’euros à la filière, mais dans une zone géographique beaucoup plus restreinte et avec un impact d’autant plus grand pour les entreprises concernées.
© AFP/Archives REMY GABALDA
Un éleveur au milieu de ses canards le 5 décembre 2016 à Bars dans le sud-ouest de la France