RÉACTIONS – Les anciens internationaux français qui ont croisé la route de Jonah Lomu gardent le souvenir d’un homme altruiste.
Jonah Lomu et la France, cela fut une grande histoire. C’est face aux Bleus qu’il débuta avec les All Blacks, en 1994. C’est aussi contre le XV de France qu’il disputa son dernier match de Coupe du monde, en 1999. En tout, Lomu croisa la route des Bleus à 8 reprises, soit plus que n’importe quel pays en dehors des traditionnels rivaux australien et sud-africain. En cinq ans, Lomu avait fini par créer un lien avec le rugby français, qu’il honora de sa présence d’un dernier tour de piste, en 2009, à Marseille. L’émotion qui accompagne l’annonce de son décès, à 40 ans, n’en est que plus importante parmi la grande famille du rugby français.
« On aimait se croiser, s’affronter aussi. » C’est le cas par exemple d’Emile Ntamack, ailier comme lui. « L’amitié qu’on avait créée à travers notre passion commune qui était le rugby, le fait de se croiser, d’avoir démarré nos carrières ensemble, le fait d’avoir traversé des moments pas faciles non plus, notamment des blessures, nous a rapprochés », confie l’ancien joueur du Stade Toulousain. « Mais on était toujours extrêmement motivés pour se retrouver et en découdre sur le terrain. On aimait ses défis, on aimait se croiser, s’affronter aussi et c’est vrai que ça nous a aidés aussi. On avait ensuite entretenu une correspondance, créé une amitié sincère. »
« Tu avais rendez-vous avec ton courage. » Fabien Galthié était le demi de mêlée des Bleus lors de la fameuse demi-finale de 1999 remportée face aux Blacks (43-31). « C’est qui a débarqué sur la planète ovale avec des qualités hors normes de puissance, de vitesse, mais aussi de technique. Quand on le croisait sur le terrain, il dégageait une puissance, une vitesse qui étaient uniques et qui t’obligeaient à aller chercher au plus profond de toi des vertus pour essayer de l’arrêter. C’était très difficile d’appréhender le plaquage, le choc. Il avait une faculté à faire le vide autour de lui. Chaque fois que tu devais le croiser, tu avais rendez-vous avec ton courage et avec toi-même avant tout. »
Entendu sur Europe 1
« Un gars avec une mentalité exceptionnelle. » Lomu n’était pas seulement qu’un formidable compétiteur, c’était aussi, de l’aveu de tous ceux qui l’ont croisé un homme bien. Philippe Bernat-Salles était également sur la pelouse de Twickenham lors de la demi-finale de 1999. Malgré un match monumental et deux essais, Jonah Lomu avait fini par s’incliner, mais avec dignité. « Avec Christophe Dominici, on était parti dans le vestiaire des Blacks pour échanger nos tenues et c’est vrai que l’image de Jonah sur le terrain, c’était le démolisseur, le bulldozer sur le terrain, 2 mètres, 120 ou 125 kg. Mais après la défaite, il avait fait preuve d’humilité. Il m’avait pris les deux mains en nous félicitant, très déçu pour lui et son équipe, mais en étant très fier pour nous. C’était un gars avec un état d’esprit fabuleux et une mentalité assez exceptionnelle, donc on éprouve aujourd’hui beaucoup de chagrin, de tristesse et de dégoût par moments. »
Actuel sélectionneur de l’équipe de France, Guy Novès salue également « l’exemple » qu’était Jonah Lomu. « Lorsqu’il était sur le terrain, il donnait l’impression de représenter le futur », a confié Guy Novès au micro d’Europe 1. « C’est vrai qu’on avait l’impression que c’était un exemple à suivre, non pas en raison de ses dimensions physiques extraordinaires et de ses prestations fantastiques. Mais avec ses soucis de santé, ça a été aussi un exemple à suivre en matière de combat. » Placé sous dialyse en 2003, transplanté un an plus tard, Jonah Lomu, 63 sélections avec les Blacks, se battait depuis de nombreuses années contre une grave insuffisance rénale de naissance.