Son nom est désormais connu à travers le monde entier car, depuis trois mois, l’actualité de l’hydroxychloroquine est étroitement liée à celle du coronavirus. Dernier rebondissement en date : l’OMS a annoncé la nuit dernière que les essais cliniques utilisant cette molécule reprenaient, alors qu’une étude publiée dans la revue scientifique The Lancet est de plus en plus critiquée au sein de la communauté scientifique.
Pour comprendre la décision de l’OMS, il faut se rappeler que l’institution avait interrompu les essais cliniques sur l’hydroxychloroquine après la parution de l’étude de The Lancet, qui concluait que cette molécule n’était pas seulement sans effet mais également dangereuse pour les patients. Maintenant que le doute plane sur ces conclusions, l’OMS rétropédale. La France va-t-elle, elle aussi, changer de position sur l’hydroxychloroquine ? Pour l’instant, les autorités sanitaires ne font pas marche arrière sur la prescription de l’hydroxychloroquine à l’hôpital. En revanche, les essais cliniques, notamment le fameux Discovery, pourraient reprendre.
Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a écrit à The Lancet
Pour l’heure, le ministre de la Santé Olivier Véran a écrit à The Lancet pour demander à la revue « une relecture des données brutes telles qu’elles avaient été livrées » sur la molécule. C’est ce qu’a annoncé la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye, mercredi. Mais le gouvernement avance toujours que la décision de ne plus utiliser l’hydroxychloroquine, prise la semaine dernière, se fonde également sur d’autres études.
C’est pourtant l’article de The Lancet qui crée aujourd’hui la controverse, jusqu’en interne. La direction de la revue a émis mardi une « mise en garde » vis-à-vis de l’étude publiée dans ses colonnes le 22 mai, qui suggérait une surmortalité des patients traités avec cette molécule, associée ou non à un antibiotique, et une recrudescence d’accidents cardiaques.
Deux critiques principales
Cette « mise en garde » se double de l’appel pressant de nombreux scientifiques à retirer l’article de la revue. Deux critiques principales ont émergé. D’abord, la méthode de l’étude, qui n’est pas la plus solide : on ne part pas de patients tirés au sort à qui on donne un médicament pour vérifier son efficacité, mais une société américaine spécialisée dans le traitement de données, Surgisphere, dit avoir « aspiré » les dossiers médicaux de 96 000 patients dans environ 700 hôpitaux dans le monde. Il s’agit donc des données brutes, plus difficiles à interpréter.
La deuxième critique avancée par les détracteurs de cette étude porte sur des erreurs, notamment de codage d’hôpitaux. Par exemple, les 73 morts d’un pays ont été attribués à l’Australie, où il n’y a eu que 67 morts. L’auteur principal de l’étude, le Pr Mandeep Mehra, de l’école de médecine de Harvard, aux États-Unis, s’est retourné vers la société de traitement de données Surgisphere pour lui demander des explications de façon urgente.
À noter qu’aucun test sur l’hydroxychloroquine n’est officiellement mené en Polynésie Française. En revanche, le gouvernement avait été contraint de limiter les prescriptions de médicaments contenant la molécule (dont le plaquénil) en raison d’une inflation de la demande en pharmacie en début de crise. Malgré des recours déposés par des médecins libéraux, déboutés par le tribunal administratif de Papeete, cet arrêté du 8 avril est toujours en vigueur.