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Il se volatilisait après avoir encaissé l’acompte : un entrepreneur escroc en série condamné

Déjà interdit par la justice d’exercer une profession commerciale ou industrielle, après avoir été condamné une dizaine de fois pour escroquerie et abus de confiance, un entrepreneur de 47 ans était de retour au tribunal ce mardi, pour dix nouvelles arnaques. Usant de fausses identités, il se faisait remettre d’importants acomptes en liquides, parfois plusieurs millions, avant d’abandonner les chantiers. Un schéma d’arnaque classique, mais rarement traité au pénal. Il a été condamné à 30 mois de prison ferme.

Une douzaine de victimes, pour un montant total supérieur à 8,5 millions de francs : c’est un dossier bien fourni qui a occupé le tribunal ce mardi. À la barre, Teva N. reste stoïque et reconnaît les faits. Cet escroc multirécidiviste de 47 ans a l’habitude des lieux : avant cette comparution, il comptait douze mentions à son casier judiciaire depuis 2004, pour escroquerie et abus de confiance, entre autres. Commis pour la majeure partie sous sa casquette d’entrepreneur, ces faits lui avaient alors valu une interdiction judicaire d’exercer une profession commerciale ou industrielle, mais aussi des passages en prison.

À sa sortie de Tatutu en 2022, Teva N. s’est vu rattrapé par d’anciens créanciers, victimes de ses précédentes arnaques. Face aux juges, il explique avoir été la cible de menaces, qui ont aussi touché sa compagne. Sur le célèbre modèle pyramidal de Ponzi, il a donc échafaudé de nouvelles combines pour rembourser les précédentes.

Devis signé, acomptes payés cash, travaux abandonnés

Son modèle opératoire, pas franchement original, était souvent le même : engagé par des particuliers pour réaliser des chantiers, aussi bien dans les espaces verts que dans le bâtiment, il se faisait remettre d’importantes sommes d’argent liquide en guise d’acompte ou d’avance pour l’achat de matériaux, après avoir proposé un devis tout à fait raisonnable. Parfois, il recommandait de nouveaux travaux à ses clients, profitant de leur crédulité pour encaisser de nouveaux avoirs. Une fois l’argent récupéré, il honorait une partie du devis, de manière plus ou moins sérieuse, avant de disparaitre de la circulation, tantôt du jour au lendemain, parfois plus progressivement après avoir fourni toute une pile d’excuses pour expliquer les retards.

Usant d’identités différentes, parfois celle de son frère également entrepreneur, changeant aussi de numéro de téléphone et de société, Teva N. parvenait à chaque fois à se faire confier de nouveaux chantiers. Preuve de son habileté à mettre en confiance, il en obtenait même sur recommandation, à l’image de cette extension commandée par une retraitée de la Mission pour son habitation, à qui il a soutiré près de 3,5 millions de francs.

Il faudra finalement plusieurs plaintes, dont certaines d’anciens sous-traitants n’ayant jamais été rémunérés, ou une autre d’une femme à qui il avait promis d’échanger 500 000 francs en dollars sans jamais réapparaitre, pour voir les gendarmes endiguer cette nouvelle série d’arnaques et en exhumer d’anciennes, encore non traitées.

« Je suis contente que la justice pénale entende désormais poursuivre ces personnes »

Si le schéma est plutôt classique, les entrepreneurs peu scrupuleux étant régulièrement dénoncés sur les réseaux sociaux, il est plus rare de les trouver au tribunal correctionnel. « Ce n’est pas la première plainte pour ce genre d’agissement, mais, en ce qui concerne mon cabinet, c’est la première fois qu’une telle plainte est plaidée en correctionnelle », se satisfait Me Algan, avocate d’une des victimes. « J’aimerais que la population sache qu’il est possible de déposer plainte. Il existe beaucoup d’entrepreneurs en Polynésie française qui s’inventent bâtisseurs de domicile et qui abandonnent en ne finissant pas les chantiers. Je suis contente que la justice pénale entende désormais poursuivre ces personnes. En général, ces types de dossier sont plutôt réglés au civil ou au commercial, mais promettre un chantier moyennant argent et ne pas finir les travaux, c’est susceptible d’une sanction pénale », rappelle-t-elle.

Déjà suivi psychiatriquement, sous traitement antipsychotique, Teva N. s’est engagé à rembourser les victimes, assurant avoir déjà réussi à combler ses précédentes dettes. Il devra cette fois trouver un autre moyen pour s’en acquitter. Le tribunal l’a condamné à 3 ans de prison, dont six mois avec sursis probatoire de deux ans, après l’avoir reconnu coupable d’escroquerie et d’abus de confiance en récidive. Il devra, en outre, payer 4 799 000 francs d’indemnités à ses victimes, suivre des soins et une formation pour tenter de décrocher un emploi salarié à sa sortie, son interdiction d’entreprendre étant définitive.

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