ACTUS LOCALESÉCONOMIE Immobilier : les prix vont-ils enfin arrêter de grimper ? Charlie Réné 2023-03-05 05 Mar 2023 Charlie Réné Le Salon de l’immobilier a accueilli près de 1 300 visiteurs vendredi et samedi. Un succès qui laisse penser que le fossé sur le marché entre la demande des Polynésiens et l’offre de logements et de biens n’est pas prêt d’être résorbé. Les prix, déjà au plus haut, vont-ils continuer à grimper ? Des professionnels estiment pourtant, face à la hausse des taux d’intérêt, que le marché pourrait rapidement « stagner ». « Satisfaits », les organisateurs du Salon de l’immobilier et de l’investissement. Avec près de 1 300 visiteurs dans les salons de l’hôtel Hilton sur deux jours, Red Soyu et ses partenaires ont d’ores et déjà annoncé qu’ils lanceraient une deuxième édition l’année prochaine, probablement sur une période plus étendue. Les professionnels, eux, ne devraient pas se faire prier pour rempiler : tous ou presque parient sur un marché de l’immobilier « toujours très dynamique » dans les mois à venir. Dynamique en tout cas du côté des acheteurs, beaucoup plus nombreux que les vendeurs de maisons, d’appartements ou de terrains au fenua ces derniers temps. Parmi ces clients, des investisseurs locaux qui considèrent toujours la pierre comme une « valeur sûre » autant que des Polynésiens « cherchant à mettre un toit sur leur tête », explique Liliane Biancuzzi, de chez Poerava Immobilier. Résultat mécanique : des prix n’ont pas arrêté de grimper. « L’immobilier c’est cyclique, nuance la directrice d’agence associée. On a eu une baisse en 2009, quelques années difficiles, c’est remonté tout doucement, et ça s’est accéléré ces dernières années. Après, maintenant, il faudrait que ça se stabilise ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2023/03/IMMO-1-poerava-plus-dacquereur-que-doffre.wav À l’entendre, l’augmentation de l’imposition des plus-values immobilières a « aidé », en écartant les opérations de spéculation au plus court terme. Aujourd’hui, la professionnelle dit compter sur « les vendeurs qui doivent rester raisonnables » pour calmer le marché et faire en sorte que « l’ancien ne se vende plus au prix du neuf ». Avant d’aussitôt tempérer : difficile d’être raisonnable « quand on sait qu’il n’y a rien d’autre à vendre ». « Stagnation » peut-être, mais pas de baisse à l’horizon Peu de raisons de vendre sur un marché si porteur. Beaucoup de raisons, en revanche, d’acheter. Nicolas Jalier, cogérant et associé de la Cogep, groupe de gestion de patrimoine, de finance et d’immobilier, rappelle que la demande est tirée, entre autres, par les jeunes générations, qui souhaitent de moins en moins partager un logement avec leur famille, et qui se préoccupent de plus en plus de la constitution d’un patrimoine pour leur retraite. S’ajoute l’épargne amassée par les ménages polynésiens pendant la crise sanitaire, 40 milliards de francs en moins de deux ans d’après l’IEOM. Un « frein à l’investissement » pourtant, se fait de plus en plus visible : la remontée des taux de crédit, entamée en milieu d’année dernière. Pas de bond vertigineux pour l’instant : les taux moyens en matière d’habitat s’établissent à environ 2%. Mais tout le monde s’accorde à le dire : vu la tendance mondiale et la volonté des banques centrales de lutter contre l’inflation, ces taux pourraient bientôt « dépasser les 3%, voir les 4% ». « Pour l’instant, ça reste très raisonnable », reprend Nicolas Jalier, qui se souvient « de taux qui avoisinaient les 4% il y a quelques années sans que cela pose de grosses difficultés ». Mais cette montée devrait avoir son effet sur les foyers aux revenus les plus « justes » pour acheter, et de façon plus générale sur l’immobilier. « On pense à une stagnation des prix plutôt qu’une hausse, arrivé au seuil où on est aujourd’hui, reprend le spécialiste. Mais on ne voit pas l’immobilier baisser dans l’immédiat ». https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2023/03/IMMO-2-cogep-marche-toujours-dynamique.wav Le neuf grimpe, les permis coincent Il y a un secteur, pourtant, où les prix ne semblent pas prêt de stagner : le neuf, longtemps resté accessible malgré l’envolée des prix de l’ancien à Tahiti. La pression sur le foncier – qui a rendu « prohibitif » le prix de la plupart des terrains propices à des constructions de résidences – met depuis plusieurs années la pression sur les promoteurs. S’ajoutent désormais le prix des matériaux de construction, qui a connu une inflation record depuis 2021. « Les programmes déjà lancés restent dans des prix convenables, ceux qui se montent aujourd’hui vont être beaucoup plus chers », confie une agente immobilière. Beaucoup, chez les professionnels, demandent aux autorités davantage d’aide sur la construction de logements – « pas seulement sociaux » – ou le retour de la défiscalisation locales, « qui ne profite plus qu’aux hôteliers ». Davantage d’huile dans les rouages de l’administration, aussi. « Nous, ça fait pratiquement un an qu’on attend notre permis de construire », explique ainsi Agnès Barracosa, gérante de la Sogeco, connue pour son activité de syndic, mais qui commercialise aussi des appartements dans une future résidence Golden Bay, à Taunoa. Une résidence de 45 logements de standing, vendus en Vefa, et dont la livraison est prévue pour la fin d’année 2024. Comme tous les programmes neufs, pas si nombreux ces temps-ci, elle a attiré beaucoup de curieux – et de sérieux – au salon ce week-end. https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2023/03/IMMO-3-golden-bay-permis-de-construire.wav Travailler sur la généalogie pour aider à sortir des indivisions Parmi les éléments qui pourraient libérer le marché, agences, promoteurs ou banquiers citent aussi en chœur les indivisions, qui limitent encore beaucoup le développement immobilier à Tahiti. Et pourtant de ce côté là les choses avancent. En quelques années, et à la faveur de travaux entre le Pays et les notaires, la règlementation a évolué pour permettre aux familles de sortir moins difficilement de ces situations de propriété collective parfois très large. L’objectif de ces efforts est toujours le même, explique Jean-Philippe Pinna, le président de la chambre des notaires de Polynésie : « Simplifier les procédures pour éviter d’avoir 20, 30, 50 années de partage au tribunal, pour qu’en quelques actes, les familles soient à nouveau réellement propriétaires, qu’elles puissent être chez elles, sur leur terrain, avec leur nom à eux sur le plan cadastral et pas celui de leur ancêtre d’il y a 120 ans ». Le chantier est « énorme », et n’est pas terminé. Une loi cruciale permettant le partage des indivisions aux deux tiers – et non plus à l’unanimité des indivisaires – a été rendu applicable en Polynésie en 2019. Mais pour entrer réellement en action, manquent encore les règles de publicité qui serait associées à cette procédure. « Le travail suit son cours avec la Direction des affaires foncières », reprend le notaire qui interpelle aussi sur la professionnalisation du statut de généalogiste, « pour réellement sécuriser les familles dans leur descendance » : https://www.radio1.pf/cms/wp-content/uploads/2023/03/IMMO-4-Notaire-succession-indivision.wav À noter que les notaires du fenua sont des acteurs importants du marché de l’immobilier, mais cette activité ne représenterait que 15% de leur chiffre d’affaires, d’après la chambre. Sur les 75 000 personnes reçues dans les études l’an passé, et les 2 000 actes de notoriété, on trouve beaucoup de questions familiales ou d’adoption, pas moins de 2 000 successions ou encore 475 partages d’indivision. Les questions d’immobilier, mais aussi de construction, de décoration et de nouvelles technologies seront aussi discutées au Salon de l’Habitat, à partir du 30 mars à Mamao. Cliquez pour partager sur Facebook(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur Twitter(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquez pour partager sur LinkedIn(ouvre dans une nouvelle fenêtre)Cliquer pour imprimer(ouvre dans une nouvelle fenêtre)