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Indépendance : après le « quand », Brotherson et Temaru ne s’accordent pas sur le « comment »

Le président du Tavini s’est invité à la conférence de presse de présentation du nouveau gouvernement Moetai Brotherson II ce matin. Après s’être laissé aller à quelques commentaires ici et là, martelant l’idée d’une unité au sein du parti, le tavana de Faa’a a pris beaucoup de place en expliquant notamment que l’indépendance ne passait pas nécessairement par un référendum, option privilégiée par Moetai Brotherson. 

C’est sans siège ni micro réservé qu’Oscar Temaru a fait irruption à la présidence. Lundi matin, le président du Tavini tenait à faire acte de présence aux côtés des ministres, dont les nouveaux portefeuilles ont été présentés par Moetai Brotherson pour son premier remaniement, un an après son élection à la tête du Pays. Et rapidement, le tavana de Faa’a a attiré l’attention, chipant le micro à son voisin du jour, le ministre de la santé Cédric Mercadal.

« Aucun nuage » chez les bleu-ciel

Il a exprimé son envie « d’aller de l’avant », et notamment avec la nouvelle vice-présidente Minarii Galenon, aussi chargée des relations avec les institutions. Ce choix satisfait le leader indépendantiste, qui a fait allusion au passé, en rappelant que « c’est grâce à sa voix que nous sommes là », faisant sans doute référence au changement de bord de l’intéressée en 2011, qui lors le vote d’une motion de censure, avait précipité la fin du mandat de Gaston Tong Sang au profit d’Oscar Temaru. « Je sais comment faire pour me comporter avec le président du parti, mais aussi avec Antony Géros », a tenu à rappeler Minarii Galenon. Quelques secondes plus tôt, Oscar Temaru lui avait coupé la chique, en répondant à sa place au sujet des relations réputées tendues entre l’exécutif et la majorité bleu ciel à l’Assemblée. « Il n’y a aucun nuage, ça marche très bien entre le parti et le gouvernement », a-t-il martelé.

« Pourquoi forcément un référendum ? »

Des divergences de point de vue existent pourtant bien, nouvel exemple ce matin au moment de définir le processus d’accession à l’indépendance souhaité par le parti. « Le plus tôt sera le mieux », a encore rappelé le tavana, alors que Moetai Brotherson a souvent évoqué un horizon de « dix à quinze ans ». 

Oscar Temaru a surtout posé la question de l’organisation ou non d’un référendum, notamment pour des questions de corps électoral. « Actuellement, un métropolitain qui débarque ici, il peut voter six mois après : vous croyez que s’il y a un référendum, on peut accepter ça ? Ce n’est pas possible ». Et d’enchaîner : « Pourquoi un referundum ? Il y a d’autres stratégies », qui ont déjà été observées dans l’histoire, « comme au Vanuatu », où, près les élections législatives de 1975 et la percée électorale des indépendantistes, la France et le Royaume-Uni, qui coadministraient l’archipel, avaient fini par trouver un accord pour l’accession à l’indépendance. Des tensions avaient éclaté entre anglophones et francophones, mais le pays avait finit par accéder à la pleine souveraineté le 30 juillet 1980, sans référendum.

« Je pense que ce que le président du parti veut dire est que, si on va à une élection en faisant de l’accession à l’indépendance le point central du programme électoral, et qu’on obtenait une large majorité, ça pourrait être, je mets ça au conditionnel, considéré comme un référendum », a analysé Moetai Brotherson.

Dans un tout autre scénario, Oscar Temaru a aussi cité « ce pays d’Europe de l’Est, que la France a reconnu comme étant indépendant », en référence au Kosovo, très rapidement soutenu par Paris au moment de sa déclaration d’indépendance vis-à-vis de la Serbie en 2008. A l’époque, c’est le parlement de ce territoire qui avait voté le texte, ensuite proclamé par son premier ministre : « Il n’y a pas eu de référendum dans ce pays ! », a rappelé l’élu. Pas forcément un exemple d’accession à l’indépendance en douceur, puisque le Kosovo est toujours revendiqué par la Serbie et que son statut d’État indépendant n’est reconnu ni par l’ONU, ni par l’Union Européenne.

Moetai Brotherson « fan de l’option référendum »

Moetai Brotherson a, de son côté, reconnu « des lectures un peu différentes » de la question au sein d’un parti « où on a bien sûr le droit de discuter ».  Il a rappelé être « très fan de l’option référendum », sans doute la plus diplomate, qui permettrait notamment « la définition du corps électoral, du timing et de la question posée », mais surtout « des discussions en amont avec l’État français pour savoir ce qu’il se passera après ». Le président a aussi tenu à souligner que l’accession à la pleine souveraineté ne pourra se faire que « par les moyens démocratiques et légaux, de manière non-violente, comme il est inscrit dans les statuts du Tavini ».

Auparavant, Oscar Temaru avait déclaré qu’il « n’y a pas de crainte à avoir, à partir du moment où nous avons le soutien de la communauté internationale. On est là pour être un État souverain et pour être amis avec la France », a-t-il rappelé.

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Jt Vert 04/06/2024

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