Dans le cadre du Forum de Paris sur la paix, qui s’est tenu du 11 au 13 novembre, le ministère des Armées a présenté un document intitulé « Les Forces armées face au changement climatique », qui prévoit notamment une croissance des opérations d’assistance humanitaire aux Antilles et dans le Pacifique. Mais pour prévenir ces risques, l’institution militaire a élaboré une stratégie basée sur l’anticipation, l’adaptation, et l’atténuation.
Pour le ministère des Armées, « dans le contexte d’un dérèglement planétaire globalisé, la sécurité climatique et énergétique est d’ores et déjà un enjeu stratégique majeur ». Les déséquilibres environnementaux ont renforcé les interactions entre climat, biodiversité, sécurité internationale et enjeux de défense. « Le changement climatique, ajouté à d’autres facteurs crisogènes (démographiques, politiques, religieux, sociaux) place les territoires les plus exposés dans des situations de grande vulnérabilité », ajoute-t-il.
C’est notamment le cas dans les Outre-mer français et leur environnement régional, fréquemment victimes de catastrophes naturelles. « L’intensification des évènements climatiques extrêmes (cyclones, ouragans, etc.) entraînera une augmentation des opérations HADR (Humanitarian Assistance and Disaster Relief), en particulier dans les Antilles et l’Indopacifique », anticipent les auteurs du document. Dans ce contexte, les armées seront nécessairement impliquées. « C’est aujourd’hui une certitude, les armées seront de plus en plus souvent mobilisées en soutien des forces de sécurité civile. (…) Face à la violence de ces événements, seules les forces armées disposent de moyens dimensionnés pour intervenir et coordonner le déploiement de moyens navals et aériens afin d’acheminer des vivres ou d’évacuer les populations sinistrées. »
Plus qu’ « une simple variable opérationnelle », le changement climatique modifie donc en profondeur la donne stratégique pour les forces armées. « Pour continuer à assurer ses missions, le ministère des Armées doit travailler au maintien d’une capacité opérationnelle totale dans un environnement toujours plus dégradé », explique ce dernier. Concrètement, cela se traduit par exemple par l’étude de la vulnérabilité des équipements de base confrontés aux chaleurs extrêmes, ou celle des infrastructures militaires menacées par la montée des eaux.
Dans le Pacifique, des programmes d’anticipation
Depuis plus de cinq ans, le ministère des Armées planche sur l’élaboration d’une stratégie comportant trois volets : anticipation, adaptation, et atténuation. L’anticipation, qui est essentielle, a pour ambition de mieux prévoir les impacts du changement climatique. Pilotée par l’Observatoire Défense et Climat du ministère, elle a commencé par une entreprise de cartographie des risques engendrés par les bouleversements climatiques, dans les zones d’intérêt pour la France. « Une attention toute particulière a été portée sur la situation dans la zone Indopacifique où l’impact sécuritaire des changements climatiques est considéré comme la priorité stratégique numéro un. Une vigilance accrue qui s’explique par une hausse du niveau de la mer quatre fois plus rapide que sur le reste de la planète », détaille le ministère.
La pêche dans le Pacifique menacée
Ainsi, le programme Kivi Kuaka, qui analyse les comportements des oiseaux en réponse à des événements climatiques de type cyclones et tsunamis. En Polynésie française, une équipe de scientifiques a équipé un panel d’espèces cibles de bagues d’identification et de balises. « Elles permettent de récupérer des données météorologiques et GPS pour étudier le lien entre le déplacement de ces oiseaux lors de leur migration et les événements climatiques pour prévenir au plus tôt les catastrophes naturelles. Sur le long terme, ce programme pourrait également contribuer à une meilleure protection des populations et à la préparation des forces armées face aux catastrophes d’origine climatique ».
Autre exemple, le programme MICROPAC, dans la zone Pacifique, a pour objectif de comprendre le fonctionnement des écosystèmes océaniques où la ressource thonière est importante. Même s’il n’apparaît pas au premier abord, c’est un enjeu géopolitique majeur. « Les projections de l’impact du changement climatique indiquent que les ressources thonières vont se déplacer, entraînant un déplacement important des flottilles de pêches étrangères, une variation de l’activité de pêche par les flottilles locales et potentiellement un déplacement des activités terrestres liées », précise le document des Armées. « Une partie de l’activité risque donc de se déplacer dans les eaux internationales où l’activité est peu ou pas contrôlée menaçant ainsi la gestion durable des ressources ».
Avec Outremers360