Lors d’un récent contrôle routier, plus de la moitié des deux-roues légers testés par la DTT pouvaient dépasser la vitesse maximum règlementaire de leur catégorie de véhicule. La modification des vélos électriques sans permis, normalement limités à 25 km/h, et le débridage des scooter de 50 cm3 qui ne doivent pas rouler à plus de 45km/h, sont des pratiques très communes… Et aussi très dangereuses, puisque ces engins n’ont pas les freins ou la tenue de route adaptés à des vitesses supérieures. Les autorités promettent des contrôles et des sanctions, mais avec un seul « curvomètre » au fenua, difficile de repérer tous les deux-roues trafiqués.
« Et encore un qui est au dessus ! ». Jeudi soir, lors de la grande opération de contrôles à Arue, les gendarmes orientent une partie des deux-roues vers des agents de la Direction des transports terrestres (DTT). Devant eux un socle métallique équipé de deux cylindres sur lesquels on pose la roue arrière des motos, scooters et autres vélos électriques. La poignée de gaz est ensuite actionnée « à fond », faisant tourner le mécanisme de l’appareil et emballant le compteur auquel il est relié. De quoi mesurer la vitesse maximale du véhicule sans bouger d’un mètre. Cette machine, le « curvomètre », est la seule arme pour repérer les deux-roues « trafiqués », « kités » ou « débridés ».
Plus de la moitié des deux-roues testés sont hors des clous
Car après les certifications des véhicules « à l’import » effectuées par la DTT, toute « modification substantielle » du véhicule est par principe interdite par le Code de la route. Surtout si elle amène le deux-roues à dépasser la vitesse règlementaire de sa catégorie. 45 kilomètres par heure pour un « cyclomoteur » – vélos électriques immatriculés ou scooters de moins de 50 cm3 -, 25 kilomètres heures seulement pour les « vélomoteurs », catégorie comprenant les vélos électriques les plus courants, ne nécessitant pas d’immatriculation, d’assurance ou de permis autre que le BSR. Ce jeudi, à mi-parcours de l’opération de contrôle, plus de la moitié des engins de ces catégories testés sur le curvomètres dépassait la vitesse autorisée. Et il ne s’agit pas seulement d’un problème de règlementation, pointent les agents de la DTT : ces valeurs limite représentent des seuils de sécurité.
Ainsi, un engin qui roule plus vite que ce pour quoi il a été conçu n’a pas les freins adaptés, sera difficilement contrôlable lors des accélérations, a plus de chance de connaitre une défaillance mécanique en pleine conduite… Bref, il sera beaucoup plus dangereux. Et potentiellement non-assuré, si la modification était établi après un accident. Cette situation de non-respect généralisé de la règlementation est donc un problème sérieux. Surtout quand on sait que la mortalité routière est trois fois plus forte au fenua qu’en métropole… et que près des trois quarts des accidents mortels de 2023 impliquaient des deux-roues. Les autorités sont bien conscientes de la situation. Certaines mairie, comme celle d’Arue, ont déjà communiqué sur les vélos électriques lourdement modifiés, et taillés pour les « runs », parfois interceptée par leur muto’i. Quant aux scooters débridés, ils sont presque devenus la norme à la sortie des collèges et lycées.
Responsabilité du propriétaire
Pourquoi, alors, ne pas s’attaquer aux vendeurs et prestataires qui permettent de « débrider » les scooters – en désactivant les limitateurs de vitesse et de puissance installés « de série » sur l’engin -, de trafiquer les vélos ou de « kiter » les motos ? D’abord parce que ces modifications ne sont pas toutes illégales : elles le sont seulement quand elle font sortir le véhicule de sa catégorie règlementaire, ce qui est surtout le cas pour les plus petites cylindrées. Ensuite, parce que les débridages et « kitages » sont souvent réalisés par des non-professionnels, de façon « payante mais informelle ». Enfin parce que les pièces détachées vendues dans les commerces réguliers ne sont pas, en elles-mêmes, interdites, elles sont généralement importées en toute légalité. « Charge aux propriétaires, s’il doit remplacer des pièces, qu’elles soient équivalentes aux caractéristiques initiales du véhicule, explique le directeur de la DTT Lucien Pommiez. Charge à lui de ne pas changer de carburateur, mettre en place des segments de piston supérieurs ou d’autres opérations qui font que le véhicule va augmenter sa puissance et va aller plus vite ».
Le directeur assure que des « contrôles réguliers » sont mis en place par les services du Pays, en coopération avec les forces de l’ordre. Et les sanctions sont lourde, avec des amendes de quatrième classe, atteignant 16 100 francs pour les propriétaires. Mais ces contrôles sont, de fait, limités par les moyens : il n’existe qu’un seul curvomètre au fenua, celui de la DTT.