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Irmine Tehei relaxée : « Quand on défend les droits des femmes, ce n’est pas de la diffamation »

Irmine Tehei, présidente de l’Union des femmes francophones d’Océanie (UFFO), comparaissait ce mardi devant le tribunal de Papeete pour diffamation envers les quatre employés de l’hôtel InterContinental de Moorea, qui avaient été accusés de viol en réunion par une collègue. Une affaire dont le dossier avait été classé sans suite en octobre 2019. À l’issue de l’audience, Irmine Tehei a été relaxée.

Les propos estimés comme diffamatoires par la défense des quatre hommes, à savoir Me Cross, avaient été tenus par Irmine Tehei lors d’une interview à la télé. Selon son avocat Me Hellec, ses propos n’avaient rien de diffamants car sa cliente se serait livrée à une explication sémantique concernant le terme « violer » en tahitien, à savoir « mafera » qui pour Irmine Tehei n’exprime en rien toute la souffrance que la victime a ressenti. Ce que contestait Me Cross qui estimait que « quand vous écoutez ses propos, elle les considère comme coupables, et la diffamation est avérée. »

Ce mardi, le tribunal se devait d’apporter une réponse à la question : les propos mis en cause sont-ils diffamatoires, oui ou non ?

« Facebook est devenu un tribunal instrumentalisé par les associations féminines. »

Pour Me Cross, ils le sont assurément, mais avant d’aborder le fond du dossier, il a tenu à rafraîchir la mémoire du tribunal en rappelant l’affaire des huit douaniers accusés de viols par une collègue en 2012. Un dossier dont il avait la charge et qui a abouti à un non-lieu, mais qui a bouleversé la vie des douaniers. « La jeune femme avait menti sur toute la ligne, et j’avais espéré que cette affaire, où ils ont été salis et où ils ont tout perdu, serait un exemple pour les associations féminines. » « Mais non », reprend-t-il en regardant les membres de l’association Vahine O Rama, présentes dans la salle, « le lynchage médiatique continue », assurant que « Facebook est devenu un tribunal instrumentalisé par les associations féminines. Mais c’est le droit qui doit prévaloir sur l’opinion publique, et non l’inverse. »

Ainsi, sur le fond de l’affaire, il assure qu’Irmine Tehei a tenu des propos diffamatoires en septembre 2019, soit un mois avant que l’affaire ne soit classée sans suite. Des propos tenus en tahitien à la télévision et que Me Cross traduit ainsi : « je ne dirais pas qu’ils l’ont violée. Le viol c’est beau, il n’y a pas de douleur. Ils l’ont sautée. » Pour lui, pas de doute, « elle a bien utilisé le mot ‘mafera’ qui veut dire violer une femme durant son sommeil. » Et d’enfoncer le clou, « il y avait huit gendarmes sur cette affaire et il n’en est rien ressorti. L’affaire a été classée sans suite et tout ce que j’espère c’est que la soi-disant victime porte plainte en se portant partie civile afin que l’on ait un non-lieu. » Et de demander un million de dommages-intérêts pour chacun des quatre hommes.

«  Je pensais que l’on allait faire du droit, mais là, on nous fait la morale. »

« Je pensais que l’on allait faire du droit, mais là, on nous fait la morale, ce n’est pas bien ceci, ce n’est pas bien cela », attaque Me Hellec qui assure, « moi je vais faire du droit pour vous prouver qu’il n’y a pas diffamation. » Et il s’exécute, « la diffamation, c’est l’imputation d’un fait précis, alors que là, Me Cross a interprété les propos de ma cliente, en plus il ose lui imputer ces propos, ‘le viol c’est beau’». Il n’en démord pas, « elle ne dit pas qu’ils l’ont violée, mais que le terme tahitien ‘mafera’ ne reflète pas la souffrance d’un viol. »

Rebondissant sur l’argument de Me Cross qui déclarait que l’affaire a été classée sans suite, il estime « qu’un classement sans suite n’établit pas une vérité judiciaire, cela veut dire que les indices ne sont pas assez nombreux pour poursuivre un suspect. » S’adressant au juge, il déclare, « si vous deviez entrer en voie de relaxe pour ma cliente, je vous demande de les condamner à verser à ma cliente une somme de 500 000 Fcfp et à chacun une somme de 75 000 Fcfp pour les frais irrépétibles. »

Après en avoir délibéré, le tribunal, notant l’absence de traduction par un expert assermenté des propos tenus en tahitien, a relaxé Irmine Tehei des faits de diffamation et condamné les quatre hommes à lui verser la somme de 400 000 Fcfp, ainsi que 75 000 Fcfp chacun pour les frais irrépétibles. Des applaudissements ont accompagné la décision du tribunal.

Une décision juste, selon Me Hellec qui n’avait pas le moindre doute quant à l’issue du jugement. « Le tribunal a envoyé un message très fort, quand on défend le droit des femmes, ce n’est pas de la diffamation. »

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Un avis que ne partage pas son confrère, Me Cross, qui lui estime que Irmine Tehei a été relaxée au bénéfice du doute, parce que les propos tenus en tahitien n’ont pas été traduits par un expert, mais par lui.

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