Paris (AFP) – Aussi charismatique qu’intraitable sur l’orthodoxie religieuse, l’ancien grand rabbin de France Joseph Sitruk, guide spirituel de la première communauté juive d’Europe pendant plus de 20 ans, est mort dimanche à Paris à l’âge de 71 ans.
Victime d’une attaque cérébrale en 2001 et malade depuis plusieurs années, il est décédé à l’hôpital, a-t-on appris dans l’entourage du grand rabbin de France Haïm Korsia, qui fut son collaborateur et a fait part de sa « tristesse et douleur immense ».
Un office d’hommage aura lieu à 19H30 à la Grande synagogue de la Victoire à Paris.
Dès l’annonce de son décès, les réactions se sont multipliées pour saluer la mémoire de ce séfarade chaleureux, né à Tunis le 16 octobre 1944, qui a exercé les fonctions de grand rabbin de 1987 à 2008.
« Beaucoup de tristesse au moment où j’apprends la disparition du Grand Rabbin Joseph Haïm Sitruk Zats’al. Il fut un maître et un ami », a tweeté Gilles Berheim, qui lui avait succédé de 2009 à 2013.
« Que sa mémoire soit bénie », a réagi le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) dans un tweet faisant part de sa « tristesse », tout comme l’imam de Drancy, Hassen Chalghoumi, qui se souvient « de longues discussions tout au long de ces années » et des « souvenirs de Tunisie » partagés.
Côté politiques, l’ancien chef de l’Etat Nicolas Sarkozy a estimé dans un tweet qu' »avec la mort du grand rabbin de France Sitruk, la République perd une grande figure, ayant marqué durablement le judaïsme français ».
Pour le candidat à la primaire de la droite Alain Juppé « la France perd un grand homme de dialogue ».
Le chef de file des députés PS Bruno Le Roux a, lui, salué un homme « avec qui c’était toujours avec plaisir et joie que se menait l’échange ».
– Condamnation de l’homosexualité –
Tout au long de ses trois mandats de grand rabbin, cet homme à la barbe fournie aimait à cultiver des relations nourries avec les représentants des autres cultes et les responsables politiques.
Adjoint du grand rabbin de Strasbourg à 26 ans, il devient dès 1975, à 31 ans, grand rabbin de Marseille, avant d’être élu grand rabbin de France pour un premier mandat de sept ans en 1987.
Se disant favorable à « une société ouverte, contre toute forme de ghetto », il a défendu l’intégration des juifs mais pourfendu leur assimilation, voulant « rejudaïser les juifs » en les ramenant dans les synagogues.
Ce rabbin marié et père de neuf enfants a prôné une stricte observance de la loi juive, la « halakha », se montrant intransigeant sur les conversions, les mariages mixtes, le repos du shabbat ou dans la condamnation de l’homosexualité.
Il a également été critique d’une « laïcité intolérante » au risque de se heurter aux usages républicains, comme en 1994 lorsqu’il a appelé les juifs pratiquants à ne pas participer au second tour des élections cantonales, au motif qu’il coïncidait avec le premier soir de Pessah, la pâque juive.
Il avait à nouveau provoqué la polémique en juin à propos de la Gay Pride de Tel Aviv, qu’il considérait comme une « tentative d’extermination morale du peuple d’Israël ».
© AFP/Archives PATRICK HERTZOG
Joseph Sitruk lors d’une cérémonie à la Grande Synagogue le 15 avril 2016 à Paris