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Justice : une main broyée dans un accident du travail

En 2015 un ouvrier de la Charcuterie du Pacifique avait vu sa main écrasée alors qu’il nettoyait une machine à hamburger. Le procès qui l’opposait à la Charcuterie du Pacifique et son directeur ainsi qu’au chef de production de l’usine s’est déroulé ce mardi.  La société risque une amende de 4 millions de Fcfp, le directeur une amende de 1,5 million et le responsable de production une peine de 3 mois de prison avec sursis. 

Le directeur de la Charcuterie du Pacifique et son chef de production étaient sur le banc des accusés ce mardi après-midi au tribunal de Papeete. Poursuivis pour blessures involontaires dans le cadre d’un accident du travail qui avait invalidé un ouvrier de l’usine il y a sept ans, les deux hommes se sont longuement expliqués face aux juges.

L’affaire remonte à février 2015. Ce jour-là, Antoine, ouvrier de la partie production, prend ses fonctions à 5 heures du matin. Vers 13 heures, presqu’à l’heure de débaucher, il commence comme à son habitude le nettoyage d’une machine qui façonne les steaks hachés. « C’est moi le responsable de cette machine », explique la victime au tribunal, « j’ai l’habitude de l’utiliser et de la nettoyer ». Mais pour procéder au nettoyage de cette dernière sans faire de gâchis, le travailleur est obligé de prendre quelques risques et il en est conscient. D’autant plus que cinq ans auparavant une de ses collègues en avait déjà fait les frais. Pour nettoyer la machine elle était montée sur un escabeau, avait perdu l’équilibre et s’était coupé le doigt.

Une table inox

Après cet incident, l’inspection du travail avait préconisé la mise en place d’une table inox qui servirait d’échafaudage. « J’ai pas accepté la table ! Ça glisse, et c’est moi qui me cassait la figure à chaque fois », s’énerve la victime. « J’ai demandé un escabeau mais personne n’a fait attention à ce que je demandais ». Si la consigne est de se servir du plan de travail, Antoine préfère utiliser le monte-charge pour accéder au haut de la machine. « J’ai appuyé moi-même sur le bouton mais à un moment je ne l’atteignais plus. C’est là que je lui ai demandé de m’aider pour continuer de monter », se souvient Antoine. C’est donc le responsable de production qui l’aide à grimper. Par mégarde Antoine avait placé sa main au mauvais endroit, elle se coince entre les rails de la machine et du monte-charge. Sa main est écrasée et l’ouvrier souffre de multiples fractures. Un an après l’accident, la victime démissionne de la société. « J’étais devenu trop lent et j’avais beaucoup de pression », explique l’homme.

David contre Goliath

Pour l’avocate de la victime, même s’il ne le dit pas clairement, c’est l’employeur qui l’a « enjoint à démissionner ». Elle demande plusieurs millions de francs d’indemnisation. L’avocat du responsable de production demande la relaxe de son client qui selon lui n’a pas de responsabilité pénale dans cette histoire. Le conseil du directeur de la Charcuterie du Pacifique, Me Varrod, s’attache à la qualification juridique des faits et met en avant également une éventuelle prescription de l’affaire. Sur le fond, il estime qu’il faut faire du droit et « pas non plus faire une vendetta contre une société, qu’on a présentée comme extrêmement fructueuse et prospère. On n’est pas là pour faire le procès d’une société prospère. On n’est pas là pour dire, c’est David contre Goliath et donc donner nécessairement raison à David.« 

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Pour le ministère public, la justice doit forcément rentrer en voie de condamnation pour les deux prévenus. Il a requis 3 mois de prison avec sursis pour le responsable de production et deux amendes pour un total de 5,5 millions à l’encontre de la charcuterie et de son directeur. La décision sera rendue le 6 décembre.