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La CTC met encore une très mauvaise note au Syndicat intercommunal des Tuamotu-Gambier

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Le rapport d’observations définitives de la chambre territoriale des comptes sur la gestion, de 2018 à 2023, du Syndicat intercommunal à vocation multiple des Tuamotu-Gambier (SIVMTG) est tout aussi sévère que le précédent. Et pour cause, quasiment rien n’a été fait depuis pour redresser la barre. La gestion de son président, le maire de Tatakoto  Ernest Teagai, récemment élu à l’assemblée sous la bannière Tavini, est fortement critiquée par la CTC qui évoque des « manœuvres grossières », des frais de mission abusifs, et des projets mal conduits.

Le Syndicat intercommunal à vocation multiple des Tuamotu-Gambier, qui rassemble 17 communes, n’a clairement pas grand-chose à faire des recommandations de la CTC, qui déjà en 2018, dans son précédent rapport, dénonçait une gestion déficiente. Cinq ans plus tard on retrouve les mêmes dysfonctionnements. Toujours pas de rapport annuel d’activité, de registre des délibérations, des procès-verbaux de réunions non transmis aux communes, et toujours pas de site Internet pour faciliter la communication. La CTC note aussi des interventions du directeur général des services, Teretino Houariki, sur des dossiers « qui l’intéressent personnellement » dans sa commune de Napuka, et qui ont provoqué plusieurs procédures pour lesquelles, d’ailleurs, il lui a été octroyé une protection fonctionnelle dans des conditions discutables.

Une gestion budgétaire et RH au doigt mouillé

Absence de débat d’orientation budgétaire, prévisions approximatives, taux d’exécution perfectible, dotations aux provisions absentes, dotations aux amortissements poussées au maximum, absence de régularisation du rattachement des charges et des dépenses, absence de tenue d’inventaire, capacité d’autofinancement dégradée…. Des manquements en face desquels la CTC note que les investissements ont été limités à 42 millions sur la période de contrôle, ce qui n’a pas permis la modernisation des systèmes informatiques pourtant nécessaires aux missions du SIVMGT.

Les communes les plus importantes se réapproprient de plus en plus l’assistance budgétaire, comptable et administrative, note la CTC, « compte tenu de la montée en compétence du personnel communal et de moyens de télécommunications plus modernes. » Quant à l’assistance relative aux marchés publics, elle reste faible par manque de maîtrise de l’analyse des offres et des procédures de passation.

L’évaluation annuelle des agents en poste, une obligation statutaire, déjà demandée en 2018, n’a pas été effectuée. Le suivi des congés et des jours de maladie « laisse apparaître des discordances importantes » et même « des manœuvres grossières ».  La recommandation de 2018 de « renforcer significativement le nombre de cadres » n’a pas été suivie non plus, menant à « des discordances entre les postes créés, les profils recrutés et le tableau des emplois et des effectifs », malgré les multiples mises en garde du Haut-commissariat. Trop cher, a déclaré aux magistrats financiers le président du syndicat, qui a pourtant toléré une hausse moyenne annuelle des dépenses de personnel de 8%, et qui en revanche ne s’est pas montré avare lorsqu’il s’agit de ses propres frais.

« Des frais de déplacement du président insuffisamment contrôlés »

Il s’agit ici d’Ernest Teagai, maire de Tatakoto et représentant Tavini à l’assemblée, à la tête du SIVMTG depuis 10 ans. Un président qui touche chaque année une indemnité de fonction de 1,2 million de Fcfp, le « taux maximum possible », et des frais de déplacement, de repas et de nuitées.  « Il a comptabilisé jusqu’à 195 jours de mission en 2020, et depuis 2021 ses frais de mission ont été multipliés par deux, soit 1,33 millions de Fcfp en 2021 pour 122 jours de déplacement (dont 66 nuitées remboursées) et 1,48 millions de Fcfp en 2022 pour 161 jours de déplacement (dont 62 nuitées remboursées). » Le tavana a ainsi comptabilisé 3,9 millions de frais de mission depuis 2019, dont une proportion certaine de trop-perçus, fustige la CTC.

… mais ce n’est pas sa commune qui va s’en plaindre

« Bien qu’ayant déposé peu de dossiers sur la période, la commune ayant obtenu le plus de subventions sur la période 2018-2021, rapportées au nombre d’habitants, reste celle de Tatakoto, 294 habitants, avec 854 478 F CFP par habitant », note la chambre territoriale des comptes qui ne va pas jusqu’à « remettre en cause » les déclarations du maire, selon qui Takakoto est une commune très dynamique, mais qui engage le syndicat à « toujours veiller à un traitement équitable de l’ensemble des communes ayant déposé des dossiers ». Car pour certaines municipalités, les retards dus au manque de technicité du syndicat aurait conduit à des pertes de subventions.

L’impossible mutation en communauté de communes

Le projet de mutation en communauté de communes est toujours au point mort, alors qu’il en est question depuis 2021, date à laquelle deux compétences à partager ont été retenues, les voiries communales et l’assistance à maîtrise d’ouvrage, sans que les charges afférentes soient estimées, mais avec l’intention affichée de percevoir des « produits institutionnels de l’État », et « sans même étudier les besoins des communes sur des sujets majeurs dans les îles comme la collecte et le traitement des ordures ménagères, la gestion des eaux usées ou encore le transport maritime entre les îles », note la CTC. Bref, la transformation en « com com » n’a pas abouti, « faute de clarté et d’intelligibilité ». La faute aussi, reconnait la CTC, aux grandes différences entre les 17 communes, certaines se développant grâce au tourisme, d’autres pas.

Ainsi, les communes de Gambier et Makemo ont demandé à se retirer du SIVMTG, comme Fakarava et Rangiroa qui souhaitent créer une communauté de communes des Tuamotu de l’Ouest, avec également Arutua.

L’immeuble de Papeete, un boulet…

Enfin la situation de l’immeuble Fare Miro de l’avenue Prince Hinoi, acquis en 2005, n’est toujours pas régularisée : il n’a pas la qualification d’établissement recevant du public, les mises aux normes pourtant budgétées n’ont pas été effectuées, et les communes qui disposent de bureaux individuels contredisent les déclarations du président sur l’utilisation des locaux. Le SIVMTG voulait intégrer la future Maison des communes du SPC, qui a refusé en expliquant que « le projet ne visait à accueillir que les intercommunalités et non les représentations des communes ». Un débat devenu vain pour l’instant, puisque le gouvernement a mis fin à l’espoir du SPC de s’associer à l’OPT sur le projet du Fare Hinoi. De toute façon, souligne la CTC, le financement dont aurait besoin le SIVMTG pour intégrer une Maison des communes est hors de sa portée sans vendre l’immeuble Fare Miro (longtemps surévalué), opération impossible puisque les communes individuelles se retrouveraient alors à la rue…

La Chambre territoriale des comptes conclut : « Que l’on s’oriente vers le maintien du syndicat dans sa forme actuelle ou vers une transformation en communauté de communes, une montée en compétence technique, toujours nécessaire, ne pourra se faire sans une professionnalisation des recrutements et un renforcement de la structure administrative. » Elle formule 7 recommandations :

 

Le rapport intégral de la chambre territoriale des comptes :

Rapport CTC – SIVMTG by Fred Ali