Le secteur aérien mondial veut se tourner vers un modèle plus vert : des objectifs ambitieux d’utilisation de carburant d’aviation durable (SAF) ont été fixés. Il s’agit de combustibles issus d’un mélange de kérosène avec des déchets ou des biomasses. Au fenua, la direction de l’aviation civile ambitionne de suivre la tendance, en développant une filière locale de production de carburant vert.
« Explorer des solution innovantes ». C’est le leitmotiv du directeur de l’Aviation civile Marangai Moeroa. Le DAC vient de lancer un appel à candidatures, et recherche un partenaire pour favoriser l’intégration des carburants d’aviation durable (CAD, plus communément appelé SAF, pour sustainable aviation fuel) dans l’aviation polynésienne. Vantés par de nombreuses compagnies aériennes soucieuses de verdir leur image, ces combustibles permettent au secteur de réduire ses émissions de CO2.
Un carburant produit avec des déchets
Il existe plusieurs types de SAF. Selon les différentes générations, ils sont produits en mélangeant le kérosène habituel avec des ressources récupérées au quotidien, telles que des déchets et résidus de jardinage, alimentaires, agricoles, des huiles de cuisson, de l’hydrogène ou encore des algues. Les nombreuses filières de développement prennent soin d’éviter d’utiliser des biomasses cultivées au prix d’une importante déforestation, telles que l’huile de palme ou le soja.
D’après l’Agence européenne pour la sécurité aérienne (EASA) « la réduction globale des émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie grâce à l’utilisation de CAD peut atteindre 70 % ou plus de 90 % par rapport aux carburéacteurs fossiles ». Avantage, ces biocarburants sont adaptés aux moteurs de la flotte aérienne existante. Il sont en revanche plus couteux pour les compagnies que le kérosène traditionnel, cinq à six fois plus cher. Ce qui n’empêche pas les acteurs du secteur de viser une incorporation des SAF dans les carburants habituels à hauteur de 70% d’ici 2050.
La DAC veut étudier le potentiel d’une filière polynésienne
Au fenua, la DAC va lancer une étude de faisabilité relative à la production de ce type de carburant, « une démarche pionnière pour l’avenir du transport aérien durable en Polynésie française » poursuit le directeur sur les réseaux sociaux. La DAC ne prévoit pas d’installer une usine au fenua, mais de développer une filière de production de biomasses locale « en prenant en compte la faisabilité technique, économique et environnementale » pour la livrer ensuite sur des sites de fabrication de carburant.
L’étude devra par exemple identifier la disponibilité de biomasse en Polynésie française, « notamment dans la filière coco » mais aussi la canne à sucre, le bois ou les déchets. D’après la DAC, « 50% de la biomasse verte actuelle » dont dispose le fenua, « n’est ni utilisé ni recyclé, et pourrait donc être valorisé pour la production locale de SAF ». Ces carburants viendraient ensuite ravitailler les avions de passage à Tahiti-Faa’a. « Ainsi, au-delà de l’impact symbolique fort qu’aurait la production de SAF à partir de la biomasse polynésienne pour promouvoir un tourisme environnemental, cette initiative contribuerait à réduire le risque de perdre des touristes soucieux de l’écoresponsabilité », plaident les porteurs du projet.
Le coût financier et environnemental de la production de ces carburants sera pris en compte, tout comme les créations d’emplois que la filière pourrait engendrer. Il s’agira aussi de déterminer quels obstacles pourraient être rencontrés, réglementaires comme économiques. D’après l’aviation civile, ATN, Air France et French Bee sont « très favorables à l’utilisation de SAF produit localement et deux de ces compagnies sont prêtes à participer directement à cette production ». Les cabinets d’étude potentiellement intéressés ont jusqu’au 10 janvier pour se faire connaitre.