Les militants de la Fraap marché ce matin depuis la présidence jusqu’à Tarahoi. Changement de piquet, mais aussi d’interlocuteur : vu le blocage des négociations avec Moetai Brotherson sur la coûteuse question du point d’indice, la Fraap mise sur le président de l’assemblée. Tony Géros a donc « écouté », transmis les revendications dans un comité de majorité… Qui a confirmé que le président du Pays était en charge des négociations. Pour lui presser le pas, la Fédération de Jean-Paul Urima a contacter le SFP, A Tia i Mua et le Fissap pour qu’ils participent aux pourparlers.
[Article mis à jour à 18h30 avec de nouvelles réactions syndicales]
Une marche pour trouver un nouvel interlocuteur. C’était le plan de la Fédération de rassemblement des agents des administrations de Polynésie (Fraap) au quatrième jour de grève de la fonction publique territoriale. Le syndicat de Jean-Paul Urima, rejoint dans son mouvement par le SFP, a quitté son piquet de la présidence dans la matinée pour rejoindre le parvis de Tarahoi, au moment où commençait une importante séance plénière et budgétaire de l’assemblée. L’objectif : interpeller les élus du Pays sur le « refus du président Moetai Brotherson de négocier ». Un refus contesté par l’intéressé, qui répète de plateaux en micros que sa porte est « ouverte », et que c’est la Fraap qui « balaie » ses invitations. Qui que soit le fautif, le fait est que les discussions sont bloquées depuis près d’une semaine sur le premier et plus gros point du cahier de revendication: l’augmentation de plus de 40% du point d’indice des fonctionnaires, une question de « justice sociale » pour les grévistes, et une proposition « pas sérieuse » par le chef de l’exécutif.
Une interpellation en plénière, un comité de majorité… mais pas de réponse
À Tarahoi, où se trouvaient aussi ce matin Moetai Brotherson et tout son gouvernement, les chefs de file du mouvement espéraient donc trouver une oreille plus attentive chez le président de l’assemblée. Et Tony Géros a bien accepté de laisser son perchoir pendant près d’une demi-heure pour les écouter. « Il a été très sensible à nos explications, nos interrogations, se félicite Jean-Paul Urima. Il nous a assuré qu’il tiendra un comité de majorité pour soumettre la question aux élus du Pays ».
Un comité de majorité qui a bien eu lieu, avant la reprise de la séance plénière en début d’après-midi. Quelques minutes pour relayer les doléances du syndicat, et confirmer que c’était bien la question du point d’indice qui était bloquante dans le conflit. Pas de réaction à la sortie, ni de précision de Tony Géros. Ce qui ne veut pas dire que la majorité Tavini reste insensible au mouvement : plus tôt dans la journée, l’élu bleu et maire de Tatakoto Ernest Teagai avait pris la parole pour demander au président de « prendre en considération » les habitants des îles, bloqués par la mobilisation des pompiers d’aéroport. « Il faut régler cette situation avant les fêtes » avait insisté le tavana. Toujours sans réponse.
La question de cette revendication salariale va forcément revenir dans le débat à Tarahoi, puisque l’étude du budget 2025 du Pays a débuté ce lundi après-midi et doit d’étendre jusqu’à ce mardi voire ce mercredi. Parmi les points chauds de la discussion : la hausse de charges de 757 millions de francs de la masse salariale du Pays, amenant les charges de personnel à 34,9 milliards de francs. La présidence avait précisé que la revendication de la Fraap – un « point de départ des négociations », comme le rappelle Jean-Paul Urima – ajouterait environ 11 milliards de francs annuels à ce total.
« La situation est déjà assez grave »
Face à cette équation compliquée, Jean-Paul Urima attend de Tony Géros « qu’il mette la pression sur le président, et que le président du pays prenne ses responsabilités ». « La situation est déjà assez grave, qu’est ce qu’il attend, que tout s’arrête dans ce pays ? interroge le secrétaire général. Ce n’est pas ce que nous recherchons. Ce que nous recherchons, c’est de pouvoir engager des négociations sur le premier point de ce préavis de grève ».
En fin de journée, le syndicat a fini par avoir un retour du cabinet du chef de la majorité. Le président du Pays est en charge du dossier, réaffirme le patron de l’assemblée, et c’est à lui de négocier. « Qu’il négocie, alors », lâche Jean-Paul Urima, qui relève que Moetai Brotherson a expliqué qu’il ne peut parler du point d’indice des fonctionnaires qu’avec tous les syndicats. La Fraap a donc contacter, en plus du FSP, qui s’est déjà rallié à son mouvement, A tia i mua, très représenté dans la fonction publique territoriale, et le Sifap, syndicat hospitalier dirigé par Mireille Duval. « Ils veulent bien venir », annonce le chef de file des grévistes, même si la CSTP-FO, l’autre poids lourd du secteur, et que Jean-Paul Urima avait quitté – fâché – pour créer sa fédération en 2017, n’a pas été contactée. Qu’importe, l’essentiel, est de pousser le Pays a convoquer lui-même ces partenaires sociaux. Et pas en mars, comme la présidence l’a prévu de longue date. « Il veut consulter les organisations syndicales, nous lui disons ‘ok, convoquez les cinq organisations dès maintenant, ils viendront. Si on veut se sortir de cette ornière, de ce conflit, c’est la seule manière de le faire ».